FootballCe Servette sait se transcender
Le 1-1 contre l’AS Rome de jeudi se lit au travers de l’instant un peu unique que vivent actuellement les Grenat. Est-ce annonciateur de grandes choses?
- par
- Valentin Schnorhk - Genève
Il est sans doute un petit peu compliqué de comprendre l’instant que vit Servette. Il faudra un certain recul pour le jauger, pour estimer de son irrationalité ou, au contraire, de quelque chose d’annonciateur de grands moments.
Reste que le 1-1 de jeudi contre l’AS Roma s’intègre assez bien dans les jolis moments qu’a vécus le club grenat dans son histoire. Surtout, le fait que tout cela intervienne quand les Genevois enchaînent les victoires en Super League fait réaliser que la période est très particulière. Et que, dans le fond, tout cela est probablement soutenu par quelque chose de solide.
Les trois enseignements
Il faut placer les choses dans leur contexte: Servette reste un petit d’Europe, mais sa capacité à ne pas se faire écraser sur l’ensemble d’un match par l’AS Roma, finaliste de la dernière Europa League, raconte de véritables progrès. C’est en comparant la performance de jeudi à celle du match aller (défaite 4-0 à Rome) qu’on les constate.
Tout était spécial dans ce match-là, à commencer par la Praille pleine à craquer. L’énergie mentale qu’ont déployée les Grenat est à la source de leur performance d’ensemble, de leur capacité à se battre sur tous les ballons et de répéter les courses. Une nouvelle preuve que cette équipe sait se transcender.
À l’heure où un documentaire se tourne sur le «nouveau Servette», le club grenat est en train d’écrire une page de son histoire, un moment qui peut nourrir les générations émergentes de supporters. Et l’assurance de disputer les 16es de finale de Conference League en février va continuer d’y contribuer.
Le meilleur Servettien: Timothé Cognat
S’il avait marqué une des deux frappes qu’il a eues en dehors de la surface, on aurait pu évoquer un match proche de la perfection. Timothé Cognat ne surprend plus grand monde à Servette, mais il existe désormais aussi au niveau européen.
Dans ce Servette de Weiler, il est précieux dans sa capacité à se trouver toujours dans la zone du ballon. L’activité qu’il déploie est nécessaire pour mener à bien ce football vertical, parfois désorganisé, mais toujours très intense. Jeudi, il n’a cessé d’être connecté au jeu, avec et sans ballon. Prestation de grande classe.
Le moins bon Servettien: Anthony Baron
Il aurait été légitime de ne sélectionner aucun Servettien, parce que la prestation d’ensemble devait surtout être vue collectivement parlant. Et Servette, sur ce plan-là, n’a pas failli. Mais peut-être qu’Anthony Baron a été un peu plus confronté à ses limites que d’autres.
Parce que le football va vite et qu’il évoluait encore en Promotion League il n’y a pas si longtemps, difficile de lui en tenir rigueur sur un match d’Europa League. Mais là, son jeu long a laissé à désirer et il a parfois laissé un petit peu trop de latitude à Paulo Dybala sur les deux occasions que l’Argentin s’est créé en seconde période.
La décla’
Le fait tactique: les limites organisationnelles servettiennes
On peut sortir d’un match nul 1-1 contre l’AS Roma avec des points à améliorer. Jeudi, Servette a été admirable de solidarité, avec une débauche d’énergie incroyable, et cela a sans doute fortement contribué à la solidité défensive démontrée.
Parce qu’il est difficile d’affirmer que le plan défensif servettien était parfaitement huilé. Le 4-4-2 qu’utilise René Weiler est intéressant lorsque les Grenat peuvent presser et récupérer haut. Mais en bloc médian, il manque de rigueur dans son organisation. Notamment parce que le milieu de terrain ne travaille pas vraiment de manière collective.
Ce qui a frappé contre la Roma, c’est la tendance des uns et des autres (Cognat, Ondoua notamment) à être très orientés «homme», donc à sortir sur le porteur, à suivre certains déplacements, et donc à ne pas être forcément concentrés sur leur zone respective. Sachant que le 3-5-2 de Mourinho permettait aux Italiens d’avoir des supériorités à la relance et dans le cœur du jeu, il y avait de quoi être surpris. Parce cela «cassait» la ligne médiane servettienne et laissait certains espaces dans l’axe.
Est-ce désiré? Cela paraît osé, même si c’est sans doute ce qui a mis une certaine pression sur les Romanistes. Servette l’a-t-il payé? Non, parce que les compensations (de Bolla, de Stevanovic, des latéraux, des attaquants) ont été constantes.
Et de la sorte, toutes les limites sont gommées et, de fait, tout plan est légitimé. Il faudra être capable de le reproduire, même si les Grenat auront sûrement rarement aussi peu le ballon (moins de 40% du temps jeudi).
La statistique
58%, comme le pourcentage de duels au sol remportés par les Servettiens jeudi. Dans les airs, la statistique est largement à l’avantage des Romains. Cela raconte les filières offensives différentes, avec des Grenat plus directs et des Italiens plus posés.
Une question pour penser l’avenir
Quelle énergie mentale a laissé le Servette FC dans ce match-là, à quelques jours d’aller défier Young Boys au Wankdorf?