EnquêteUn tiers des produits ménagers «potentiellement nocifs»
Irritants, allergisants, voire cancérogènes, mutagènes ou toxiques: le magazine français «60 millions de consommateurs» jette une lumière crue sur les produits qui garnissent nos placards.
Derrière les listes de produits aux noms souvent imprononçables, un tiers des produits ménagers contiennent une quantité importante de substances «potentiellement nocives», assure le magazine «60 millions de consommateurs» dans un hors-série publié jeudi.
Lingettes et sprays
Le magazine édité par l’Institut national de la consommation (INC) a étudié la composition de 119 produits nettoyants de 52 marques achetés en avril et en juillet 2021, en se basant sur les étiquettes, les listes d’ingrédients publiés par les industriels sur leur site et des fiches de données de sécurité, qui indiquent la concentration des substances.
Il a ensuite attribué à chacun un Ménag’Score pour les évaluer sur une échelle de A à E, de «produits à utiliser sans réserve» à «produits fortement déconseillés, trop de substances problématiques».
Au total, 39 références sont déconseillées, car notées D ou E. Elles contiennent une quantité importante de substances irritantes ou allergisantes, comme certains parfums, ainsi que des substances «très nocives pour la santé ou pour l’environnement», dont certaines sont soupçonnées d’être cancérogènes, mutagènes, toxiques pour la reproduction ou d’être des perturbateurs endocriniens.
«Ces produits ne vont pas forcément poser de problème à tous, les personnes allergiques, par exemple, vont y être plus sensibles», indique à l’AFP Sophie Coisne, rédactrice en chef de ce hors-série. «Mais les fabricants ont encore des efforts à fournir», précise-t-elle.
«60 millions de consommateurs» invite surtout à se méfier des lingettes désinfectantes, pour WC et multisurfaces, car 75% sont notées D ou E. Même chose pour les sprays désinfectants et les désodorisants, dont la moitié environ sont déconseillés par le magazine.
«Parfaitement sûrs»
«Les désinfectants, c’est indispensable quand on veut se débarrasser des micro-organismes et des virus, surtout dans cette période», a réagi auprès de l’AFP Virginie d’Enfert, déléguée générale de l’Association française des industries de la détergence, de l’entretien et des produits d’hygiène industrielle (AFISE), qui représente les fabricants.
Selon elle, les produits actuellement sur le marché sont «parfaitement sûrs» à condition de respecter les précautions d’emploi, car ils sont soumis à des contrôles.
Le Ménag’Score a été mis au point par des experts de l’INC en 2019 sur le modèle du Nutri-Score dans l’alimentation, afin d’évaluer le risque chimique des produits d’entretien pour l’environnement et pour la santé. Il donne plus de poids, dans son calcul, «aux composants les plus préoccupants pour la santé humaine et aux ingrédients les plus concentrés», précise «60 millions de consommateurs» sur son site.
Mais la méthode exacte de calcul du Ménag’Score n’est pas connue, critique l’AFISE, qui plaide pour «une méthodologie partagée avec les fabricants».
L’INC avait lancé en août 2019 une pétition pour demander l’apposition de cet étiquetage sur les produits ménagers, qui a récolté plus de 38’000 signatures. De son côté, le gouvernement a annoncé en mai dernier qu’il comptait lancer courant 2022 un Toxi-Score sur les produits ménagers afin d’évaluer leur nocivité.
Si les fabricants de produits d’entretien ne sont pas hostiles à cette idée, ils mettent néanmoins en garde contre le risque d’une utilisation trop simpliste. Même sur les produits bien notés, «il ne faut pas que le consommateur baisse la garde parce qu’il y a quand même des précautions d’emploi», prévient Virginie d’Enfert.