Défenseuse acharnée du suicide assisté, Jacqueline Jencquel s’en est allée

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FranceDéfenseuse acharnée du suicide assisté, Jacqueline Jencquel s’en est allée

La Française qui martelait que «la vieillesse est une maladie incurable» a fait son dernier voyage à 78 ans.

Renaud Michiels
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Renaud Michiels
«La dépendance et la décrépitude me font bien plus peur que la mort. Je ne veux pas devenir plus vieille», a écrit Jacqueline Jencquel.

«La dépendance et la décrépitude me font bien plus peur que la mort. Je ne veux pas devenir plus vieille», a écrit Jacqueline Jencquel.

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Jacqueline Jencquel a longtemps milité pour l’Association française pour le droit de mourir dans la dignité (ADMD). Elle tenait un blog hébergé par «Le Temps» au titre limpide: «La vieillesse est une maladie incurable». La Française avait défrayé la chronique en disant sa volonté d’en finir avant de souffrir ou de trop perdre de son autonomie, avec des termes parfois très crus. Jacqueline Jencquel, 78 ans, n’était atteinte par aucune maladie grave. Elle s’est donné la mort la semaine dernière, rapporte «Libération».

Elle avait aidé de nombreux Français à obtenir un suicide assisté en Suisse. Elle avait planifié son propre départ, pour janvier 2020, à Bâle. Avant de renoncer suite à la naissance d’un de ses petits-enfants. Et avait parfois choqué. Pas question de «finir avec des couches», d'«emmerder ses enfants», de «trembler, boiter, baver, puer». Exclu aussi que sa peau devienne «ridée comme un vieux sac en croco Hermès», avait-elle par exemple balancé.

Le 29 mars, jour de son décès, elle a publié un dernier texte poignant sur son blog. Sans dire comment, elle y explique avoir obtenu du pentobarbital, «interdit pour les humains, mais autorisé pour les chiens», souligne-t-elle.

«Droit à IVV, l’interruption volontaire de vieillesse»

«J‘ai l‘âge de mourir. Le danger est de vieillir encore plus. La dépendance et la décrépitude me font bien plus peur que la mort. Je ne veux pas devenir plus vieille. C‘est mon choix. Mon droit aussi», a-t-elle écrit. «Je ne veux pas assister à ma propre déchéance. Je ne veux pas être déjà mourante pour avoir le droit de mourir. (…) Aujourd’hui je revendique mon droit à l’IVV (interruption volontaire de vieillesse). Un vieillard qui meurt, c’est dans l’ordre des choses, tout comme un bébé qui naît.»

Selon ce dernier texte, Jacqueline Jencquel s’est donné la mort chez elle, à Paris. Elle aurait pu obtenir un suicide assisté en Suisse. Mais «je n‘ai pas eu envie de m‘exiler pour mourir», a-t-elle précisé.

La Française a pesté une dernière fois contre les lois de son pays, qui n’autorisent ni l’euthanasie ni le suicide assisté. Et qui l’ont contrainte à partir seule, a-t-elle regretté. Si elle avait été accompagnée, ses proches auraient pu être poursuivis pour «non-assistance à personne en danger», a-t-elle relevé.

«J‘espère que la loi va changer»

«Je regrette de ne pas pouvoir être entourée de ceux que j‘aime. J‘espère que la loi va changer et que d‘autres, après moi, auront la possibilité de partir, entourés de leurs proches, lorsqu‘ils l‘auront décidé et qu‘ils auront atteint l‘hiver de leurs vies. Devoir se cacher pour mourir, voilà ce à quoi nous sommes réduits si nous refusons de vieillir au-delà du seuil qui nous paraît acceptable», a-t-elle souligné.

«Je meurs seule. C‘est vrai. Mais je suis chez moi», a-t-elle encore écrit. «Je regarderai intensément le visage de mes enfants avant de fermer les yeux pour toujours. Je penserai à tout l‘amour qu‘ils m‘ont donné et que je leur ai bien rendu.»

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