FranceAffaire Bygmalion: Sarkozy bientôt fixé sur son sort
L’ex-chef de l’Etat risque un an de prison dont six mois avec sursis dans l’affaire des dépenses excessives de sa campagne présidentielle. Réponse jeudi.
L’ex-président Nicolas Sarkozy sera fixé sur son sort jeudi quand le tribunal rendra son jugement à l’issue du procès Bygmalion, sur les dépenses excessives de sa campagne 2012, le parquet ayant requis contre lui un an de prison dont six mois avec sursis.
En mars, dans l’affaire dite «des écoutes», il était devenu le premier ancien président de la Ve République à être condamné à de la prison ferme – trois ans dont un ferme - pour corruption et trafic d’influence. Il a fait appel.
Interrogé par l’AFP, son entourage n’a pas souhaité donner d’indications sur sa venue au tribunal jeudi. La décision sera rendue à 10 heures.
Jugé aux côtés de 13 autres prévenus – anciens cadres de la campagne et de l’UMP (devenue LR), ainsi que de la société Bygmalion qui avait organisé ses meetings – Nicolas Sarkozy n’avait fait qu’une seule apparition au tribunal sur cinq semaines d’audience, le jour de son interrogatoire.
Une attitude qui avait ulcéré le parquet.
«Son choix, sa stratégie, c’est de ne pas se considérer comme un justiciable comme les autres, c’est de se placer au-dessus de la mêlée, à distance des personnes qui ont travaillé pour lui», avait désapprouvé la procureure Vanessa Perrée dans son réquisitoire – à deux voix.
La «totale désinvolture» de celui qui «ne regrette visiblement rien» est «à l’image de la désinvolture dans sa campagne», avait-elle aussi lâché.
Contrairement à ses coprévenus, Nicolas Sarkozy n’est pas mis en cause pour le système de double facturation imaginé pour masquer l’explosion des dépenses de campagne autorisées. Il n’était jugé que pour «financement illégal de campagne». Il encourt un an d’emprisonnement et 3750 euros d’amende.
Selon l’accusation, en demandant «un meeting par jour», des «shows à l’américaine» sans se soucier des dépenses, le président-candidat avait «incontestablement» bénéficié de la fraude, disposant de moyens bien supérieurs à ceux que la loi autorisait – au moins 42,8 millions au total, soit près du double du plafond légal à l’époque.
«Une fable»
«Il était président au moment des faits. C’est une fonction qui exige un comportement irréprochable», avait dit le procureur Nicolas Baïetto.
Nicolas Sarkozy avait lui tout nié en bloc. «Une fable !», s’était-il emporté à la barre.
«Elle est où la campagne qui s’emballe? Elle est où la campagne en or massif?", avait-il aussi scandé, prenant tout le monde à partie.
«Il y a eu des fausses factures et des conventions fictives, c’est avéré». Mais «l’argent n’a pas été dans ma campagne, sinon ça se serait vu», avait martelé l’ancien chef de l’État, estimant que Bygmalion – fondé par des personnes très proches de son rival Jean-François Copé – s’était «goinfré» sur sa campagne.
Sa défense avait plaidé la relaxe. «Il n’a signé aucun devis, il n’a signé aucune facture, il a accepté toutes les restrictions qu’on lui a demandées. Il est loin d’être un candidat hystérique, insatiable», avait mis en avant son avocate Me Gesche Le Fur.
Révélé deux ans après la défaite de Nicolas Sarkozy, le scandale avait entraîné des déflagrations politiques en série à droite.
Seuls quatre prévenus – trois ex-cadres de Bygmalion et l’ancien directeur de campagne adjoint du président-candidat Jérôme Lavrilleux – ont reconnu, partiellement, leur responsabilité.
«Il y a quatorze prévenus et presque autant de versions». La plupart «n’ont rien vu, rien su, rien entendu, ils ont été victimes de manipulations ou ont servi de fusibles», avait moqué le parquet.
«Un cortège de dénégations», avait résumé le procureur Nicolas Baïetto, mais leur culpabilité «ne fait aucun doute».
Une question, centrale, restera pourtant en suspens. «Qui a ordonné le système ?»
«Nous n’avons pas assez d’éléments pour le démontrer», avait admis Vanessa Perrée.
A l’encontre des coprévenus de Nicolas Sarkozy, le parquet a requis des peines de dix-huit mois à quatre ans de prison avec sursis et des amendes allant jusqu’à 150’000 euros (162’000 francs)
Contre Jérôme Lavrilleux – seul à l’UMP à avoir en partie admis la fraude, notamment dans une surprenante confession télévisée en 2014 – le ministère public a requis trois ans de prison avec sursis et 50’000 euros d’amende (54’000 francs). Selon son avocat, il sera présent à l’audience pour entendre le jugement.