FootballComment Franck Surdez est devenu le leader offensif de Xamax
L’ailier neuchâtelois, 21 ans à peine, s’est imposé comme un titulaire incontournable dans son club formateur et affiche une efficacité redoutable. Sa progression est phénoménale.
- par
- Brice Cheneval
À n’en pas douter, Franck Surdez a traversé les fêtes de fin d’année l’esprit apaisé. Au contraire de l’an passé. Il y a 12 mois, le jeune ailier neuchâtelois - 21 ans - se morfondait en 1re Ligue dans les rangs de la réserve xamaxiennne, écarté de l’équipe première en raison d’un conflit avec ses dirigeants né de son transfert avorté au Lausanne-Sport. Cette période n’est plus qu’un mauvais souvenir. Surdez a repris le fil d’une progression entrevue lors de l’exercice 2021-2022, avant d’être stoppée net à l’été 2022, jusqu’au mois d’avril.
Aujourd’hui, il décroche son téléphone dans la peau du joueur le plus décisif de Challenge League. Cette saison, personne ne fait mieux que lui dans la division au classement combiné des buts et passes décisives (7 à son compteur dans les deux catégories). À lui seul, il est directement impliqué dans plus de la moitié des réalisations de Xamax. Un sacré bond pour celui qui, jusqu’alors, ne s’était fait l’auteur que de 4 buts et 3 assists en 42 apparitions chez les professionnels. «Je tire un bilan très positif de ce premier tour. Je ne pouvais pas rêver mieux», se satisfait-il.
Plus percutant et finisseur
Sa progression statistique raconte d’abord l’évolution de son statut: de titulaire en devenir à cadre indiscutable. À l’exception d’un déplacement à Bellinzone mi-décembre pour lequel il était suspendu, Franck Surdez a été titularisé à chaque journée. 6e élément le plus utilisé de l’effectif, il dispute en moyenne près de 72 minutes par rencontre toutes compétitions confondues, contre 52,2 en 2022-2023 et 36,4 en 2021-2022. Illustration de la confiance évidente que lui témoigne le staff neuchâtelois, à commencer par Uli Forte. L’entraîneur zurichois, arrivé au chevet d’un Xamax malade en avril, n’a pas tardé à accorder une place de choix à son jeune protégé dans ses compositions. «J’ai tout de suite vu qu'il avait un talent spécial», confiait-il récemment auprès du «Blick», ajoutant: «Je le soutiens toujours et il le rend à toute l'équipe.»
Au-delà du temps de jeu, Uli Forte s’est attelé à développer les qualités offensives du joyau. «Il m’a fait comprendre que je n’étais pas assez décisif, relève ce dernier. Avant, je restais trop collé à la ligne de touche. Il m’a incité à être plus présent dans la surface, à faire plus de courses dans la profondeur.» Message reçu: l’ailier a inscrit 6 de ses 7 buts dans les 16,5 mètres, indicateur d’une activité accrue dans la zone. Qui se remarque aussi par son nombre de ballons touchés dans la surface (4,36 par match, la 6e plus haute moyenne de Challenge League) et son nombre de tirs (3,09, 4e).
Lorsqu’il ne rôde pas en pointe, Franck Surdez oeuvre à la percussion sur les côtés. Avec 8,78 dribbles et 3,58 courses progressives par sortie, il se classe 4e du championnat dans ces deux domaines. Il en est deux autres dans lesquels il excelle: le nombre de passes clé (1,42 par match, 3e total parmi les joueurs de moins de 23 ans observés dans 73 ligues à travers le monde par la plateforme d’analyse Wyscout) et les centres (6,32 par match, meilleure marque de Challenge League).
C’est d’ailleurs sur ce type d’action qu’il a réalisé ses 7 passes décisives. Difficile, à ce stade, de ne pas y voir une consigne du staff. «Le coach connaît ma capacité à faire des différences. Il me demande de toujours aller de l’avant balle au pied, d’éliminer mes adversaires par ma vitesse pour, derrière, servir mes coéquipiers dans l'axe», confirme le principal intéressé.
Dribbler et accélérer, Surdez savait déjà faire. Il a ajouté à cela finition, vision du jeu et science du positionnement. Autant de composants qui font désormais de lui l’un des plus gros créateurs de danger de Suisse. «Je me sens plus efficace dans mes gestes», relate-t-il.
Intégration réussie en équipe de Suisse M21
Le Neuchâtelois profite en outre d’un cadre collectif plus abouti. Finis, les errements de la saison passée. Sous Uli Forte, Xamax sait dans quelle direction il avance. Et cela profite à Surdez. «À chaque match, je sais ce que je dois faire», indique l'attaquant, qui oscille entre le poste d’ailier et celui de piston en fonction du dispositif de sa formation (défense centrale à quatre ou à trois). Voilà qu’il brille également par sa polyvalence…
Ses performances, remarquables, lui ont ouvert les portes de l’équipe de Suisse M21. Sascha Stauch - successeur de Patrick Rahmen en juillet - en a fait l’un des piliers de la nouvelle génération post-Euro Espoirs 2023. Convoqué pour la première fois en septembre, il a été rappelé lors des deux rassemblements suivants, apportant totale satisfaction. À son crédit: 4 passes décisives en 5 sélections, à chaque fois dans le onze de départ, le tout en étant aligné tantôt latéral gauche, tantôt ailier - à gauche comme à droite - et même milieu relayeur.
Autre honneur réservé à son égard: une nomination au trophée de meilleur joueur de l’année en Challenge League, en concurrence avec Valon Fazliu (Aarau) et Daniel Dos Santos (Thoune). L’identité du lauréat sera dévoilée le 15 janvier, au cours d’un gala organisé au Casino de Berne.
Dans son sillage, Xamax traverse une saison bien plus sereine que les précédentes. Actuellement 4es, à 14 points du duo de tête composé de Sion et Thoune, les Rouge et Noir ont peu de chance de se mêler à la lutte pour la montée. Mais, à nouveau ambitieux, ils entendent se pérenniser dans le haut de tableau. «On ne veut pas répéter les mêmes erreurs qu’avant, à courir derrière un objectif, tempère Franck Surdez. Dans ce championnat, tu peux dégringoler aussi vite que tu es monté, alors il faut se focaliser uniquement sur le match suivant. Ce qui est certain, c’est qu’on a un super groupe. On a conservé l’ossature de la saison dernière. Les moments difficiles nous ont soudés, ont créé des liens solides qui nous ont permis de prendre un départ idéal cet été.»
Convoité en Super League et à l’étranger
En parlant de départ, lui-même pourrait-il changer de crémerie cet hiver? Son profil, rare en Suisse, conjugué aux progrès affichés et à son nouveau statut d’international, suscite des convoitises en Super League. Mais pas que: ces derniers jours, il était question d’un intérêt de Bordeaux (Ligue 2 française). De leur côté, les dirigeants xamaxiens - a priori épargnés par la menace de relégation - pourraient être tentés de surfer sur la vague pour récupérer une belle somme d’argent. Comme ils l’ont fait récemment avec Zachary Athekame, cédé à Young Boys en vue de l’été prochain.
«Je ne ressens pas l’envie de partir, mais je ne ferme pas non plus la porte si un projet alléchant se présente», éclaire Surdez. Ce dernier apporte néanmoins une précision d’importance: «Je ne m’en irai pas sans l’accord du club. Je ne ferai pas le forcing.» Conscient que son attitude frondeuse adoptée il y a un an et demi a pu écorner son image, notre interlocuteur prône l’apaisement: «C’est de l’histoire ancienne. Aujourd’hui, la relation avec les dirigeants est bonne, saine. On a choisi de s’écouter, de se respecter.»
Et s’il était amené à boucler le 2e tour du côté de la Maladière, qu’en attend-il? «Je m’étais fixé comme objectif d’atteindre les 20 buts en fin de saison. Je m’en approche. Et si je pouvais flirter avec les 15 passes décisives, je serais ravi.»
L’appétit vient en mangeant. Et en ce moment, Franck Surdez est d’humeur gloutonne.