JuraLa police se fait recadrer avec ses photos de motards
Photographier des dégâts peut être utile pour aller en justice, par contre, la juge a refusé de regarder les images montrant leurs auteurs.
- par
- Vincent Donzé
La pratique sauvage de la moto est interdite dans la forêt jurassienne, mais pour identifier des motards casqués et masqués qui roulent sans plaque, la police jurassienne n’a pas lésiné sur les moyens en 2021. Des perquisitions ont été menées, mais les gendarmes ont aussi posé des pièges photo sur un sentier forestier.
Sur quatre motards condamnés, trois se sont opposés à la sanction du Ministère public. S’ils sont adeptes d’enduro, ils affirment ne rouler que sur circuit. Les photos prises en Haute-Ajoie? Elles montrent d’autres personnes: «Mon client est identifié par la police sur deux clichés pris à quelques minutes d’intervalle, dans deux lieux distincts, avec deux habits différents!» a plaidé un avocat cité par «Le Quotidien Jurassien».
Code de procédure
La juge Marjorie Noirat n’a pas examiné les photos, ce moyen de preuve fourni par la police étant… illégal! Pour des infractions sanctionnées par des contraventions, le Code de procédure pénale n’autorise l’usage de moyens de surveillance que sur la base d’indices concrets d’un crime ou d’un délit perpétré ou préparé.
De fait, les trois recourants sont exemptés de toute faute, mais les frais de défense ne seront pas pris en charge par l’État: selon la juge, il n’est pas nécessaire d’engager un avocat quand la sanction encourue est une simple contravention.
Ce jugement risque de modifier la pratique de la gendarmerie. La police cantonale jurassienne «prend acte de la décision de justice», mais n’a pas de commentaire à formuler.
Des actions ponctuelles de grande envergure sont menées par l’Office de l’environnement, mais elle nécessite beaucoup d’intervenants dans un canton où les sports motorisés ont la cote, aussi bien l’enduro que le trial.
Fonction de délassement
Selon les autorités, la moto et le quad sauvages sont davantage pratiqués en Haute-Sorne qu’en Haute-Ajoie. Cette pratique cause des nuisances importantes à la faune et à la flore, mais elle est aussi jugée «incompatible avec la fonction de délassement de la forêt».
Des signalements de motos ou de traces de passage en forêt parviennent régulièrement à l’Office de l’environnement, soutenu dans ses campagnes de sensibilisation par la Fédération jurassienne des sports motorisés.
L’expérience a montré que les motards s’adonnent généralement à leur passion à des moments où la surveillance et la fréquentation de la forêt sont restreintes, comme les matinées en week-end et les fins de journée.
Dépourvus de plaques
Les engins sont généralement dépourvus de plaque d’immatriculation et les conducteurs sont difficiles à intercepter et à identifier, malgré la surveillance des agents de l’État et des gardes forestiers de triage. Certains adeptes viennent des cantons voisins.
L’Office de l’environnement insiste sur le fait que la forêt est un refuge pour la faune et la flore. «Chaque forêt appartient à un propriétaire qui en prend soin et doit la mettre à disposition du public», est-il précisé.
Les motards ont disposé de tout temps de sites d’entraînement, comme celui de Riesel à Ederswiler du Vané à Vicques et de Montchoisi à Bassecourt. Le canton délivre aussi aux clubs actifs des autorisations pour la tenue ponctuelle de compétitions.