FranceDeux ans après Orpea, nouveau scandale dans des Ehpad
Des familles de seniors accusent le groupe Emera de maltraitance. Celui-ci dénonce une campagne de «désinformation».
Deux ans après le scandale Orpea, qui avait jeté une lumière crue sur les résidences pour seniors en France, c’est au tour du groupe privé Emera d’être accusé de manquement par des familles et de «maltraitance». «Il apparaît que le groupe Emera entretient un système de maltraitance généralisée qui s’opère chaque jour auprès de leurs (…) résidents et (…) salariés», affirme la numéro un de la CGT Sophie Binet, dans une lettre au gouvernement.
Le syndicat a «été alerté par de nombreux salariés et familles de résidents du groupe de situations de violences physiques et verbales, de manquements au soin, à l’hygiène», écrit-elle. Fondé en 1987, le groupe Emera est sous le feu des projecteurs depuis le dépôt de plaintes et des témoignages visant ses Ehpad. En Gironde, une enquête a été ouverte pour «violences habituelles sur personne vulnérable», selon le parquet de Bordeaux, après une plainte visant l’établissement «Douceur de France», à Gradignan.
«Obligée de faire sa toilette seule»
À l’origine de cette plainte, Alice Legendre a dit avoir retrouvé «sa grand-mère au réfectoire, sans dentier, donc cela voulait dire qu’elle n’avait pas pu manger, et après avoir découvert son matelas imbibé d’urine». «Ma grand-mère est obligée parfois de faire sa toilette toute seule alors qu’elle a 96 ans et qu’elle est en fauteuil roulant», affirme-t-elle, confiant son «émotion» à la retrouver «sale et ne sentant pas bon».
Contacté par l’AFP, le groupe Emera a apporté «un démenti formel aux accusations portées à l’encontre de (son) personnel», se disant «particulièrement ému par cette campagne de désinformation qui touche de plein fouet (ses) salariés». Au total, l’avocat d’Alice Legendre, Pierre Farge, assure qu’une dizaine de plaintes visant Emera ont été déposées et sont suivies par son cabinet. Le groupe affirme, de son côté, avoir recensé, en octobre, cinq plaintes en l’espace de deux ans.
Situation «effarante»
«Nous avons une politique de transparence vis-à-vis des tutelles et d’échange avec les familles dès survenance d’un événement», ajoute Emera, assurant ouvrir systématiquement «des enquêtes internes» et mettre en œuvre «des actions correctives.» Un ancien responsable de la région Centre Nord du groupe Emera, qui a requis l’anonymat, décrit une situation «effarante» dans ce même établissement francilien avec des vols, des «résidents oubliés», des «médicaments donnés aux mauvais patients» ou de la «morphine qui n’est pas donnée le soir, faute d’infirmier présent».
Ces derniers développements surviennent près de deux ans après le scandale Orpea qui avait éclaté en janvier 2022 dans le sillage de la publication du livre enquête «Les Fossoyeurs», du journaliste Victor Castanet, sur des cas de maltraitances de pensionnaires du groupe privé de maisons de retraite. À la suite de ce scandale, l’exécutif a annoncé un renforcement des contrôles des Ehpad par les agences régionales de santé et les conseils départementaux. Il a également annoncé une stratégie de lutte contre la maltraitance des personnes vulnérables et un texte sur le «Bien vieillir», avec un axe consacré à cette question.