MusiqueD’idole de la K-pop à star du hip-hop, le parcours cahoteux de Jay Park
Après avoir été contraint de quitter le boys band 2PM en 2009, l’artiste américano-coréen a réussir à se bâtir un empire culturel.
Idole de la K-pop. Vendeur de pneus usagés. Star du hip-hop. L’artiste américano-coréen Jay Park a connu un parcours inhabituellement cahoteux vers la célébrité. Un succès obtenu de haute lutte mais sans «amertume», explique-t-il dans un entretien à l’AFP.
«J’ai dû faire face à beaucoup de réactions négatives», déclare Jay Park, devenu l’un des artistes les plus connus de la scène sud-coréenne, après avoir été un temps «en quelque sorte mis à l’index de l’industrie».
Tout a commencé par les critiques que l’adolescent d’alors poste en ligne: il y fustige le régime d’entraînement intensif des jeunes talents, l’industrie de la K-pop et la Corée du Sud elle-même.
Les médias sud-coréens se déchaînent contre lui. Contraint de quitter 2PM, un boys band appartenant à JYP Entertainment, le rappeur fuit le scandale et rentre à Seattle, dans son État natal de Washington, sur la côte ouest américaine.
Là, il travaille dans un magasin de pneus usagés.
Deux millions de vues en une journée
Mais il ne renonce pas à ses rêves musicaux et finit par publier une reprise de «Nothin› on You», une chanson de B.o.B et de Bruno Mars, sur sa chaîne YouTube.
«Je voulais juste montrer à mes fans que je me débrouillais bien et je voulais aussi montrer aux gens quel type de musique j’aime, quel type d’artiste je suis. J’ai donc mis en ligne une reprise et ça a pris de l’ampleur», raconte aujourd’hui la star de 36 ans.
Avec plus de deux millions de vues en une journée, le tube l’a catapulté dans l’industrie musicale et marqué «un nouveau départ».
Car il en profite pour recalibrer son style musical et passer de la pop au rap, une décision qui contribuera à transformer la scène hip-hop sud-coréenne naissante.
«Si je dis que je suis un rappeur, alors je ne peux que rapper. Mais j’aime rapper, j’aime danser, j’aime chanter». Le musicien reste pour autant «toujours reconnaissant envers la culture hip-hop», qui l’a aidé à relancer sa carrière.
L’histoire plutôt inhabituelle d’un succès musical: il est rare de se reconstruire ainsi après avoir quitté l’une des plus grosses agences, autour desquelles se structure l’industrie du disque.
Bien sûr, «cela ne s’est pas fait du jour au lendemain. Il est évident que cela a demandé beaucoup de travail», confie-t-il.
«Faibles chances de survie»
Des centaines de milliers d’aspirants stars de la K-pop passent par un système épuisant de formation connu pour son stress élevé et ses longues heures de travail.
Seuls 60% des stagiaires parviennent à faire leurs débuts, selon les chiffres de l’industrie, et la quasi-totalité de ceux qui y parviennent sont engagés par de grandes agences comme HYBE, l’agence de BTS, ou sa grande rivale SM Entertainment.
Sans ce soutien, «les chances de survie sont très faibles», explique le critique musical Kim Do-heon, précisant que nombre «de groupes se séparent».
Après avoir quitté 2PM, Park s’est retrouvé seul à naviguer à travers cette industrie. Difficile, selon lui, par exemple de trouver des musiciens prêts à figurer sur son premier album solo.
Mais «il y a une limite à ce que les agences peuvent faire pour vous et il semble que le courage et la détermination soient ce qui peut combler cette lacune», insiste-t-il.
Derrière deux labels de hip-hop en Corée
Aujourd’hui, la boucle est bouclée: le producteur a créé deux des principaux labels de hip-hop de Corée, sorti une série de tubes et fondé un label pour produire un boys band.
Mais il l’a fait à sa manière: plutôt que les formations épuisantes des grandes agences, ses nouveaux stagiaires auront un mentor – ce sera Park –, une formule dont il dit avoir rêvé lorsqu’il a commencé dans l’industrie à 18 ans.
«Je ne suis pas amer pour quoi que ce soit. Je ne déteste personne. Je n’ai pas le temps pour ça». «Pas le temps» non plus de penser au passé. «Je ne peux pas changer le passé, mais ce que je peux changer, c’est l’avenir, et c’est là-dessus que je travaille».