VaudPrise d’otage, séquestration, menaces: mère et filles accablent l’accusé
Sofiane*, 31 ans, comparaît depuis ce mardi matin à Yverdon (VD). Il est fortement suspecté d’avoir enlevé sa fillette en Algérie, frappé sa belle-fille et gravement maltraité son épouse.
- par
- Evelyne Emeri
Arrêté le 21 mars 2021, détenu depuis à la prison de Champ-Dollon (GE), ce ressortissant algérien est accusé d’une série d’infractions perpétrées à l’endroit de ses proches – sa femme, la fille de celle-ci et leur enfant en bas âge – ainsi que d’une jeune fille rencontrée sur un site de rencontre. Les premiers délits remonteraient à 2018 et se seraient prolongés jusqu’au moment de l’interpellation du prévenu: près de trois ans de sévices sur sa famille avec laquelle il était installé dans le Nord vaudois.
Fichiers intimes
L’acte d’accusation de la procureure Florence Jolliet est pour le moins étayé et décrit les faits reprochés à Sofiane*, 31 ans, par le menu. Ainsi le suspect aurait commencé son chemin répréhensible en 2018 déjà, alors qu’il est en couple avec la future mère de leur bébé, déjà maman d’une fillette née d’une précédente union. Il aurait commencé par abuser d’une jeune femme sur une app de rencontres en se faisant passer pour deux personnes distinctes afin d’obtenir ses faveurs – filmées et photographiées –, puis par lui imposer d’autres relations sexuelles en la menaçant de diffuser leurs fichiers intimes.
Menacée avant la naissance
L’homme s’en serait également pris à plusieurs reprises à son épouse, qui souhaitait mettre un terme à leur vie commune. Il aurait, entre autres, menacé de la tuer et d’obtenir la garde de leur enfant à naître. Il aurait aussi attenté à son intégrité ainsi qu’à celle de sa belle-fille. Des hématomes attestent de ces maltraitances. S’en seraient suivies des menaces de confier les enfants à la protection des mineurs, de lui faire perdre son travail et de lui enlever ses deux filles. Pour qu’elle obéisse, il lui aurait fait croire qu’il avait accès à tous ses messages sur son téléphone et qu’il pouvait la géolocaliser.
Un garçon ou l’avortement
Début 2021, la tension monte d’un cran. Sofiane est soupçonné d’avoir prétexté un voyage dans sa famille en Algérie avec la cadette en sachant, a priori, qu’il ne la ramènerait pas. Pour qu’il accepte de rentrer, il aurait ordonné un tas de conditions à sa femme dans un message retrouvé par les enquêteurs. Ceci dans le but qu’elle cesse les démarches de séparation et que le droit de garde sur leur enfant lui soit octroyé. Mais encore qu’elle lui prouve l’amour qu’elle devait lui porter: un autre bébé, mais uniquement un garçon sinon elle devait avorter, un tatouage explicite, des vidéos de leurs rapports, des sorties à deux obligatoires, la religion musulmane, le ramadan… Paniquée, elle s’est exécutée.
Chantage au suicide
Désireux de vérifier ses exigences, l’auteur présumé a été interpellé le 21 mars 2021 à la douane de la gare de Cornavin. Afin de maintenir l’emprise qu’il exerçait sur Madame depuis plusieurs années, il avait laissé leur enfant dans sa famille algérienne. Même depuis son lieu de détention genevois, il aurait réussi à manipuler les siens au pays pour qu’il ne remette pas la petite aux institutions chargées de son rapatriement et fait du chantage au suicide. Avec l’aide du Département fédéral des affaires étrangères (DFAE), de Fedpol et des instances algériennes, la maman a pu aller récupérer son enfant.
6h dans une armoire
La belle-fille de la plaignante aurait subi nombre de mauvais traitements, physiques et psychiques, de la part du prévenu. En particulier, des propos affirmant qu’il allait lui couper la tête avec des couteaux de cuisine et tuer sa mère, des coups à la tête ainsi que des prises violentes aux poignets et à la mâchoire. Elle aurait encore été séquestrée dans une armoire par Sofiane durant six heures et aurait réussi à s’enfuir en demandant à aller aux toilettes. En la retrouvant, le beau-père l’aurait alors frappé à la tête avec des chaussures et des classeurs.
Fillette au volant
Des coups de poing et de pied, respectivement dans son ventre et sur ses jambes, lui auraient également été assenés. La constatation d’hématomes et de bosses le confirme. La jeune victime a développé des symptômes de stress post-traumatique et anxiogènes. Le coupable présumé l’aurait encore mise au volant malgré son très jeune âge. Dès ce mardi matin et pour deux jours et demi devant le Tribunal criminel d’Yverdon, l’Algérien va devoir répondre, principalement de prise d’otage, de séquestration, d’enlèvement de mineur, de contrainte, de viol, de menaces et de lésions corporelles simples qualifiées.
*Prénom d’emprunt