VaudQuel bonheur de retrouver les dessins de Burki!
Une exposition, un livre et même une plateforme numérique nous font redécouvrir le talent du dessinateur de «24 heures», disparu en 2016.
- par
- Michel Pralong
Il n’y avait jamais un mot plus haut que l’autre chez Raymond Burki. D’ailleurs, il n’y avait jamais de mot du tout (ou quasi). C’était là l’une des grandes forces de celui qui a dessiné pour le quotidien vaudois «24 heures» pendant presque 40 ans. Il parvenait à chaque fois à faire mouche sans devoir expliquer, sans parole. Et son autre atout majeur, c’était la virtuosité de son trait. Car non seulement Burki comprenait le monde qui l’entourait et savait nous en montrer son absurdité, ses excès ou sa dérisoire suffisance, mais en plus, sous ses crayons, il le rendait plus beau.
Décédé à 67 ans en 2016, deux ans seulement après avoir pris sa retraite, Burki a laissé derrière lui quelque 8000 dessins, quasi tous parus en une, deux ou der du journal vaudois. Une mine d’or de ce roi du crayon que le grand public va pouvoir découvrir ou redécouvrir grâce à une exposition, un livre et une plateforme numérique. Burki est sous les feux de la rampe comme jamais, un comble pour celui qui était un grand timide.
Pour faire rire la galerie
L’expo, tout d’abord, se tient du 21 janvier au 10 avril dans le magnifique Espace Arlaud à Lausanne. Sur quatre étages, on découvre quelque 500 de ses dessins, à admirer dans une scénographie intelligente et aérée. Du bonheur à l’état pur, jamais on avait vu Burki dans un pareil écrin, ça fait du bien. Renseignements sur le site de l’Espace.
Il y a aussi un livre qui sort en parallèle, qui aurait pu être un catalogue de l’expo mais est bien plus que cela au final: un «Aburkicédaire». Raymond Burki avait rangé, si l’on ose dire ainsi, ses 8000 dessins dans des cartons à chaussures, non datés et non légendés. Son épouse Catherine et son fils Stan ont fait un gros travail de classement, qui a permis ensuite de sélectionner près de 450 dessins pour retracer toute l’étendue du talent de Burki. D’«argent» à «zoo» en passant par «armée» (qu’il détestait tant). Brélaz, Couchepin et tant d’autres, c’est non seulement une rétrospective de 40 ans d’actu que l’on retrouve, mais également une finesse d’esprit rare.
Burki était incisif, parfois cruel, révolté quand il le fallait, souvent moqueur mais jamais méchant et les textes qui accompagnent les dessins, signés par les journalistes Marie-Madeleine Gabioud et Jean-Philippe Jutzi, nous en apprennent plus sur ses marottes et agacements. Les rédacteurs en chef de «24 heures» avec qui il a travaillé dressent son portrait au boulot tandis que les autres dessinateurs (de presse ou pas) tressent ses louanges.
Pour ceux qui en veulent encore, ils peuvent non seulement avoir plus, mais carrément tout Burki. Sa famille a en effet travaillé avec une start-up de l’EPFL pour créer une plateforme de tous ses dessins, numérisés. Accessible à tous dès aujourd’hui sous letrait.ch, elle fonctionne comme un moteur de recherche. Tapez des mots-clés (genre Blocher ou vache) et vous obtiendrez les œuvres que le dessinateur a consacrées au sujet. Un vrai trésor pour notamment un usage scolaire, mais pas que. Bref, on ne va pas vous faire un dessin, mais précipitez-vous d’une manière ou d’une autre sur ceux du grand Raymond!