PologneUn producteur veut démythifier le caviar russe
Un entrepreneur polonais s’est juré de mettre à mal l’association historique entre le produit de luxe et la Russie.
Du caviar, oui, mais polonais! L’un des principaux producteurs de caviar en Europe veut mettre un terme une fois pour toutes à l’association historique entre le précieux produit et la Russie. «Pour la plupart des gens le caviar c’est la Russie, alors que c’est faux depuis longtemps», explique à Agata Lakomiak-Winnicka, une responsable d’Antonius Caviar, société du nord-est de la Pologne.
Pêché jusqu’à l’extinction dans la nature - y compris les eaux russes et iraniennes de la mer Caspienne - l’esturgeon existe désormais presque exclusivement dans des fermes, la plupart en Chine. L’année dernière, Antonius Caviar, située à Rus, près d’Olsztyn, a produit 42 tonnes de caviar noir, derrière les Chinois, et devant les Italiens et les Français. La compagnie exporte principalement aux Émirats arabes unis, aux États-Unis, en France, au Danemark. Son caviar d’esturgeon se vend au détail, selon le pays, pour 1200 à 2400 euros le kilogramme, pour le caviar albinos le prix s’envole à 8000 euros. Elle fournit aussi une douzaine de restaurants étoilés Michelin à travers le monde, dont trois établissements deux étoiles
Mythe du caviar russe sauvage
Désormais, comme la majorité de ses concurrents, Mme Lakomiak-Winnicka lutte contre «le mythe du caviar russe», alors que «si on regarde bien n’importe quelle boîte de caviar portant l’inscription ‘tradition russe’ou ‘méthode russe', on verra qu’en 99% des cas elle ne vient pas de Russie».
Et depuis le début de la guerre en Ukraine, il arrive souvent que des clients «refusent d’acheter du caviar russe. C’est une occasion d’expliquer que le caviar est un produit qui ne vient plus de Russie», que le caviar russe sauvage n’est plus disponible sur le marché international depuis de longues années, insiste-t-elle.
En effet, les esturgeons sauvages de la mer Caspienne et de la Volga qui produisaient les précieux œufs, ont été pratiquement exterminés après la chute de l’URSS. Leur commerce international a commencé à être strictement réglementé depuis la fin des années 1990, y compris par des conventions internationales.
«La mer Caspienne n’a plus aucune importance dans la production, confirme le responsable de la production d’Antonius, Marek Szczukowski, et la quasi-majorité du caviar vendu dans le monde provient de l’aquaculture». Y compris en Russie.
Renommé caviar d’esturgeon
Dans les bassins de Rus, des milliers d’esturgeons, certains de plus d’un mètre de longueur, grouillent dans l’eau pure et claire, puisée dans une rivière qui traverse les forêts protégées tout autour. «Pour ne plus laisser planer aucun doute, à la demande expresse des clients nous changeons désormais d’étiquette», explique Mme Lakomiak-Winnicka. Exit le mot «russe» dans le nom. Désormais ce sera uniquement «caviar d’esturgeon». En haut, figurera toujours, comme c’est le cas depuis le lancement de la marque, l’inscription: «Fièrement produit en Pologne».