FootballLa Suisse possède un grand potentiel mais ne l’exploite pas assez
D’après une étude menée par le cabinet de conseil LTT Sports, la Suisse est le 6e pays européen possédant le plus grand potentiel de développement. Éclairage de l’un de ses experts.
![Brice Cheneval](https://media.lematin.ch/4/image/2024/11/12/73ce5745-9100-466b-89f4-80831c29186a.jpeg?auto=format%2Ccompress%2Cenhance&fit=crop&w=400&h=400&rect=949%2C112%2C2052%2C1366&crop=faces&s=778b1a24173ffdea3cccc1308c0e5ce4)
![Dan Ndoye (à gauche) et Kastriot Imeri, deux des plus grands espoirs du football suisse, évoluent respectivement à Bâle et Young Boys, les deux meilleures équipes du pays. Dan Ndoye (à gauche) et Kastriot Imeri, deux des plus grands espoirs du football suisse, évoluent respectivement à Bâle et Young Boys, les deux meilleures équipes du pays.](https://media.lematin.ch/4/image/2023/11/08/52d75262-6bb3-4179-80b0-6ea4c98a8716.jpeg?auto=format%2Ccompress%2Cenhance&fit=max&w=1200&h=1200&rect=0%2C0%2C2048%2C1365&fp-x=0.48828125&fp-y=0.2945054945054945&s=eec66cde22f08386350a4fc4efd2eeca)
Dan Ndoye (à gauche) et Kastriot Imeri, deux des plus grands espoirs du football suisse, évoluent respectivement à Bâle et Young Boys, les deux meilleures équipes du pays.
FreshfocusLa Suisse dispose de ressources qui pourraient lui permettre de figurer juste derrière les meilleures ligues européennes, mais elle n’en tire pas suffisamment profit. C’est l’enseignement d’une étude réalisée par LTT Sports. Ce cabinet de conseil spécialisé dans le football, basé à Genève, aiguille clubs et championnats sur leur stratégie afin de les aider à croître. Cet automne, il a établi un classement des pays du Vieux Continent selon leur potentiel de développement. L'Irlande trône en tête, devant l’Allemagne, la France, la Russie et la Finlande. Fait intéressant: la Suisse - 13e au ranking UEFA - se retrouve 6e. Cela suggère une importante marge de progression.
«On a pris en compte 21 éléments tirés de trois axes majeurs: sportif, économique et social, détaille Olivier Jarosz, l’un des experts de la structure. Cela va de la situation des nations à l’indice UEFA à leur produit intérieur brut (PIB) en passant par leur nombre d’habitants ou encore le montant de leurs droits télé à l’international… On a modelé tous ces indicateurs de manière à obtenir un coefficient pour chaque pays et ainsi les hiérarchiser.»
La démarche est née à la suite d’un constat. Le football européen se divise en trois strates: le «Big Five» omnipotent (Angleterre, Espagne, Allemagne, Italie et, à un degré moindre, France), les championnats mineurs voués à rester ancrés dans leur localité et ceux appartenant à une catégorie intermédiaire. Ces derniers se vouent une féroce concurrence pour se rapprocher du top 5 avec, en toile de fond, une question existentielle: comment grandir?
La Suisse n’y échappe pas. C’est même l’un des pays les plus concernés par ce débat. La récente réforme sur le format de la Super League - les clubs helvétiques ont, dans un premier temps, voté pour l’instauration de play-off à partir de la saison prochaine, avant de se rétracter sous la pression populaire puis d’adopter le modèle dit écossais - le démontre: la Swiss Football League (SFL) se cherche une identité plus vendeuse et a entamé une action concrète en ce sens.
Richesse mal exploitée
Rien ne garantit qu’il s’agit de la meilleure solution mais l’initiative colle au besoin mis en lumière par l’étude de LTT Sports, qui consiste à élever la Suisse vers un rang plus conforme à ses prédispositions. «Plusieurs facteurs jouent en sa faveur», indique Olivier Jarosz. Le principal réside dans la richesse de sa population. La Suisse possède l’un des PIB et PIB par habitant les plus élevés au monde, mais son football n’en profite pas assez, selon l’expert: «Cette richesse est à la fois un énorme atout et un frein. Comme elle est très bien répartie, même les petits clubs jouissent d’une place relativement confortable. De fait, l’environnement n’invite pas à aller plus loin.»
Les droits télé, par exemple, pourraient être maximisés puisqu’ils sont actuellement trop bas en proportion du niveau de vie. «En Angleterre, la valeur des droits TV par individu est équivalente à 30 francs, ce qui est le plus haut du panier. En France et en Italie, cela oscille entre 15 et 18 francs. Chez nous, on n’est qu’à 7 ou 8.»
«La vraie question, c’est que fait-on pour développer notre ligue plutôt que de la préserver?»
Autre secteur à optimiser, les infrastructures. «Malgré l’organisation de l’Euro 2008, nos stades n’ont pas suivi la modernisation que réclame le sport d’élite, déplore Olivier Jarosz. Il y a, de toute évidence, des investissements à engager sur ce point.» Comme une réflexion à mener sur la formation. Celle-ci a fait ses preuves, en illustre les progrès de la sélection et l’exportation de talents dans les grands championnats, mais elle peut sûrement être peaufinée.
![À l’image du vétuste stade de Tourbillon, à Sion, le football suisse est limité par ses infrastructures. À l’image du vétuste stade de Tourbillon, à Sion, le football suisse est limité par ses infrastructures.](https://media.lematin.ch/4/image/2023/11/08/572dd617-9682-462d-802d-4b1219ad2e71.jpeg?auto=format%2Ccompress%2Cenhance&fit=max&w=1200&h=1200&rect=0%2C0%2C2048%2C1365&fp-x=0.5&fp-y=0.5003663003663004&s=975e67d58ce1753ddaacae7ecb582197)
À l’image du vétuste stade de Tourbillon, à Sion, le football suisse est limité par ses infrastructures.
FreshfocusSelon Olivier Jarosz, le football suisse doit opérer une profonde remise en question sur de nombreuses thématiques - bien au-delà, donc, de son format de compétition - s’il entend se valoriser. «Notre étude souligne la nécessité de s’appuyer sur une stratégie globale. Le problème, complète-t-il, c’est que la plupart de nos dirigeants sont en poste depuis un certain temps et qu’ils sont habitués à une certaine gestion, à laquelle ils ne veulent pas toucher. La vraie question, c’est que fait-on pour développer notre ligue plutôt que de la préserver?»
La réponse vaut son pesant d’or.