EspagneUne investiture improbable pour la droite, la gauche en embuscade
Selon les experts, les chances d’Alberto Núñez Feijóo de devenir Premier ministre espagnol sont maigres. Pedro Sánchez, lui, devra convaincre deux partis catalans pour rester au pouvoir.
![Alberto Núñez Feijóo a certes fini en tête aux dernières législatives, mais il n’a pas de marge de manœuvre pour obtenir d’autres soutiens que ceux de l’extrême droite et de deux petits partis régionaux. Alberto Núñez Feijóo a certes fini en tête aux dernières législatives, mais il n’a pas de marge de manœuvre pour obtenir d’autres soutiens que ceux de l’extrême droite et de deux petits partis régionaux.](https://media.lematin.ch/4/image/2023/11/01/736ce42a-39dd-4ed8-9bfb-d1a81535deff.jpeg?auto=format%2Ccompress%2Cenhance&fit=max&w=1200&h=1200&rect=0%2C0%2C1899%2C1339&fp-x=0.40916271721958924&fp-y=0.6026885735623599&s=ad14a1e5bdcdab742cf2af309998d44b)
Alberto Núñez Feijóo a certes fini en tête aux dernières législatives, mais il n’a pas de marge de manœuvre pour obtenir d’autres soutiens que ceux de l’extrême droite et de deux petits partis régionaux.
AFPLe leader de la droite espagnole, Alberto Núñez Feijóo, va tenter, fin septembre, d’être investi comme Premier ministre, tandis que le socialiste Pedro Sánchez, à la tête du gouvernement sortant, joue la montre en négociant l’indispensable appui des indépendantistes catalans.
C’est en tant que «candidat du groupe politique ayant obtenu le plus grand nombre de sièges» aux législatives du 23 juillet, selon les termes employés par la Maison royale, qu’Alberto Núñez Feijóo, à la tête du Parti Populaire (PP, conservateurs), a été chargé, mardi, par le roi Felipe VI de former un gouvernement.
Mais ses chances d’aboutir semblent bien maigres. Pour l’instant, il dispose de 172 votes maximum: les 137 des députés du PP, 33 du parti d’extrême droite Vox et deux de députés de petits partis régionaux.
Le débat d’investiture, qui doit se tenir les 26 et 27 septembre, donne, selon la présidente du Congrès des députés, Francina Armengol «un délai plus que raisonnable pour que le candidat puisse mener des négociations avec les représentants des différentes formations politiques».
En position de faiblesse
Le temps ne pourra sans doute rien à l’affaire, car le décompte est sans équivoque: la droite ne parviendrait pas en l’état à la majorité absolue de 176 sièges sur les 350 députés du Congrès et ne pourrait donc pas être investie au premier tour. Quant au second tour, où une majorité simple est suffisante, le bloc de droite s’y retrouverait également en position de faiblesse, puisqu’il aurait 178 votes contre.
En cas d’échec serait alors déclenché un compte à rebours de deux mois pendant lesquels le Premier ministre sortant, le socialiste Pedro Sánchez, pourrait tenter à son tour d’être investi. S’il n’y parvenait pas, de nouvelles élections seraient convoquées, probablement à la mi-janvier.
Le PP, qui a indiqué qu’il commencerait à discuter avec les autres partis à partir de lundi prochain, s’est montré optimiste mercredi. «Il nous en manque quatre et nous espérons donc parvenir à obtenir ces soutiens pour former un gouvernement», a déclaré un porte-parole du parti, Elías Bendodo.
Au moins renforcer son leadership
Le PP a «très peu de chances» d’y parvenir, étant donné qu’il n’a pas de marge de manœuvre pour obtenir d’autres soutiens, explique cependant Moisés Ruiz, expert en communication à l’Université européenne de Madrid. Même si tout laisse à croire qu’il va échouer, Alberto Núñez Feijóo ira se présenter à l’investiture avec la «volonté de renforcer son leadership» au sein de la droite.
De l’autre côté de l’échiquier politique, Pedro Sánchez peut compter sur ces quelques semaines pour continuer à négocier et former un gouvernement dans le futur, souligne Paloma Román, docteure en sciences politiques à l’Université de la Complutense, à Madrid. «Il s’agit du meilleur scénario pour lui, parce que s’ouvrent des négociations très ardues.»
«Pedro Sánchez sait tirer les ficelles»
Pedro Sánchez peut actuellement compter sur 164 votes, dont les 121 de son parti, 31 de l’extrême gauche, onze des partis basques et un d’un petit parti galicien. Il espère ajouter à ceux-ci les votes de deux partis indépendantistes catalans et atteindre les 178 voix, comme ça a déjà été le cas la semaine dernière, lors de l’élection de la présidente du Congrès, qui a vu la victoire de la socialiste Francina Armengol.
Mais ces deux partis catalans, ERC et Junts per Catalunya, ont annoncé qu’ils négocieraient ferme leur soutien pour reconduire le gouvernement de Pedro Sánchez. Le second réclame un référendum sur l’indépendance de la Catalogne et une amnistie générale pour toutes les personnes inculpées après la tentative de sécession avortée, en 2017.
Les socialistes ont indiqué qu’ils respecteraient les termes de la Constitution, ce qui écarte d’emblée l’hypothèse d’un référendum sur l’indépendance d’une région d’Espagne. Mais certains, comme Moisés Ruiz, entrevoient des «possibilités» pour le leader socialiste, car «s’il y a bien une personne qui sait tirer les ficelles dans les moments politiques de confusion, c’est Pedro Sánchez». Celui-ci a gouverné trois ans et demi avec la gauche radicale et est parvenu à obtenir le soutien des partis indépendantistes lors du vote de différentes lois.