Commentaire - Face à la haine ordinaire, la Ligue doit frapper fort

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CommentaireFace à la haine ordinaire, la Ligue doit frapper fort


Les insultes racistes et les cris de singe proférés à Saint-Gall à l’intention de Timothy Fayulu, le portier du FC Sion, ne doivent pas rester impunis. Face à des actes aussi abjects, la répression doit être suffisamment dissuasive.

Nicolas Jacquier
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Nicolas Jacquier
Sous les yeux de Nicolas Lüchinger, Geoffroy Serey Die cherche à consoler le malheureux Timothy Fayulu.

Sous les yeux de Nicolas Lüchinger, Geoffroy Serey Die cherche à consoler le malheureux Timothy Fayulu.

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Parce qu’on ne voulait ni le voir, ni surtout l’entendre, on pensait naïvement que ça n’existait pas. Ou que cela faisait figure d’exception, vite cachée sous le tapis pour arranger les bien-pensants. Ou de manière plus accommodante encore, que cela ne pouvait se produire qu’à l’étranger, donc loin de chez nous.

Mais cela s’est produit samedi soir chez nous en Suisse, à Saint-Gall, sur une pelouse de Super League. Une fois de plus, une fois de trop. Pris pour cible d’un déferlement de haine ordinaire, Timothy Fayulu, gardien du FC Sion, a été victime d’insultes racistes descendues des tribunes du Kybunpark. Le jeune portier a entendu des cris de singe et il en a été tout retourné, ce que l’on peut aisément comprendre.

Si les faits n’ont pas encore pu être clairement établis, il n’y a pas à douter de la parole du gardien valaisan. On ne s’effondre pas en pleurs dans un vestiaire parce que son équipe vient d’égaliser quelques secondes plus tôt. Si Fayulu s’est retrouvé en larmes, c’est tout simplement parce qu’il a été confronté à la stupidité crasse des hommes de petite tenue, mal ou peu éduqués. Comme l’étaient aussi ceux qui, assis derrière la tribune de presse, ont cru bon fêter l’égalisation valaisanne en déversant des flots de bière sur des ordinateurs aussitôt noyés par un tel déversement d’abomination.

Océan de tristesse

Ce qui s’est produit à Saint-Gall n’est qu’une goutte d’eau dans un océan de désolation et de tristesse, la face sombre d’un monde qui ne reconnaît plus les dérapages qu’il génère, préférant s’y complaire jusqu’à parfois même les tolérer. S’il n’y a pas lieu de stigmatiser le comportement du public saint-gallois, magnifique dans son ensemble, il faut en exclure les brebis galeuses, en les traînant devant la justice s’il le faut.

Personne ne doit s’habituer à la haine ordinaire, à des torrents d’insultes racistes, au fallacieux prétexte qu’un stade ressemblerait à un exutoire et que ses tribunes seraient transformées en défouloir de toutes les frustrations abjectes.

Dans cette affaire sordide, le rôle de la Swiss Football League sera suivi avec la plus grande attention. Ses responsables ne peuvent pas toujours se contenter de faire de la prévention et des beaux discours. Quand les choses dérapent de façon aussi nauséabonde, il y a lieu de les condamner avec la plus grande vigueur, sans se draper dans des attitudes de mièvrerie au risque d’en devenir complice.

Aujourd’hui, la Ligue doit frapper fort en prononçant des sanctions exemplaires, suffisamment lourdes pour dissuader les imbéciles de reprendre leurs odieux forfaits à la prochaine occasion. Parce qu’il y en a définitivement marre de voir ce genre de scènes se répéter à l’infini, peu importe où.

Le silence du FC Saint-Gall

Après avoir vécu une année sans public à l’instar des autres clubs du pays, Saint-Gall se réjouissait d’une communion retrouvée avec ses spectateurs. Mais il va urgemment lui falloir faire le ménage parmi ceux-ci. Déjà confrontés à des débordements de racisme au printemps 2020, le club de Suisse orientale, dont on se plait à louer la très forte identification régionale avec ses fans, a le devoir de nettoyer le kop.

Alors que l’on espérait une réaction officielle de la part de ses dirigeants, rien n’a transpiré depuis samedi soir. Aucune condamnation, aucune prise de parole, rien. Leur silence assourdissant n’en est que plus gênant.

Face à l’ignominie, un devoir de paroles s’impose.

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