AllemagneDernier voyage officiel pour Angela Merkel en Grèce
Très peu appréciée en Grèce depuis la crise de la dette grecque, Angela Merkel se rend une dernière fois à Athènes vendredi pour refermer un douloureux chapitre.
La chancelière allemande Angela Merkel, à Athènes vendredi pour son dernier voyage officiel en Grèce, vient refermer un chapitre houleux des relations gréco-allemandes, qui s’était ouvert pendant la crise de la dette grecque.
«L’une des femmes les plus détestées de Grèce», selon le tabloïd allemand «Bild», Angela Merkel a confié en septembre que «le moment le plus difficile de son mandat a été lorsqu’elle avait tellement demandé à la Grèce».
À partir de 2010, la chancelière réclame au Premier ministre grec socialiste d’alors, George Papandréou, des mesures d’austérité pour réduire les déficits publics du pays. Dès lors, elle est considérée en Grèce comme la «dame de fer» de l’Europe qui demande des efforts inconsidérés aux Grecs.
Plans de sauvetage
Avec son ministre des Finances de l’époque, Wolfgang Schäuble, Angela Merkel exige d’Athènes des coupes budgétaires douloureuses et des hausses d’impôts drastiques en échange de trois plans de sauvetage internationaux de plus de 300 milliards d’euros (319 milliards de francs).
Les retraites sont diminuées, le salaire minimum tombe à quelque 500 euros (530 francs), les privatisations sont lancées à tour de bras, les services publics et notamment les hôpitaux doivent fonctionner en sous-effectifs et souffrent de pénuries de médicaments et de matériel.
En 2012, au plus fort de la crise de la dette, la chancelière est accueillie en Grèce par un large rassemblement anti-austérité avec des croix gammées nazies et des caricatures la représentant avec une moustache d’Hitler.
«Rentrer chez elle»
Avec l’élection du leader de gauche radicale, Alexis Tsipras, en janvier 2015, un véritable bras de fer s’enclenche. Le Premier ministre grec souhaite «déchirer les mémorandums», et appelle «Angela Merkel à rentrer chez elle». Athènes est même menacée d’être exclue de la zone euro, avant de céder sous la pression à ses créanciers et de se résoudre à prendre de nouvelles mesures d’austérité.
Au terme de ses 16 années à la chancellerie allemande, Angela Merkel reste peu appréciée des Grecs. Selon un sondage réalisé dans 16 pays par le Pew Research center, seulement 30% des Grecs disent avoir confiance en elle contre une moyenne de 77% dans les autres pays.
L’actuel Premier ministre grec Kyriakos Mitsotakis «pense qu’elle sera la première à admettre, après tout elle l’a déjà fait, qu’elle a demandé beaucoup, à plusieurs reprises, aux Grecs et que l’austérité est allée au-delà de ce que la société grecque pouvait supporter», a-t-il dit le 22 octobre à Bruxelles.
«La visite d’adieux d’Angela Merkel à Athènes est un signal important indiquant que les années passées, très difficiles, de la crise économique en Grèce peuvent maintenant être considérées comme étant à mi-chemin de leur conclusion», estime Alexander Kritikos, membre du conseil d’administration de l’Institut allemand de recherche économique (DIW) interrogé dans les médias allemands.
«Normalité»
Avec le gouvernement grec conservateur actuel, Angela Merkel a trouvé une atmosphère de travail amicale qui «signale enfin la normalité», ajoute l’économiste. «La visite d’Angela Merkel à Athènes marque un tournant pour la Grèce qui est désormais allée de l’avant après la crise», renchérit une source gouvernementale grecque.
La crise énergétique et la pandémie seront au menu des discussions vendredi. Les relations avec la Turquie, la question migratoire ou encore la situation en Libye seront également abordées, selon cette source. Athènes espère surtout que le prochain chancelier allemand ne sera pas aussi conciliant avec le président turc Recep Tayyip Erdogan.
L’exploration gazière de la Turquie dans des zones maritimes disputées avec la Grèce et Chypre empoisonne ses relations avec ses voisins méditerranéens depuis des mois. La crise entre Athènes et Ankara s’était intensifiée avec le déploiement en août 2020 d’un navire turc de recherches sismiques dans des zones disputées. Depuis la Grèce s’est rapprochée de la France et s’est dotée de nouveaux rafales. La Turquie quant à elle compte s’approvisionner en sous-marins allemands.