ÉconomieLe luxe affiche une forme olympique et multiplie les records
Les marques de luxe ont affiché en 2021 une forme insolente et entendent maintenir leurs marges en 2022 malgré des coûts en hausse et l'inflation, ce qui devrait induire des hausses de prix.
Les géants du luxe ont annoncé des résultats financiers sur 2021 dépassant, parfois largement, ceux d’avant la pandémie, grâce notamment au dynamisme des ventes en Asie et aux États-Unis. Le No1 mondial LVMH a battu tous les records avec 64 milliards d’euros (près de 67 milliards de francs) de chiffre d’affaires soit 10 milliards de plus qu’en 2019 et un bénéfice net bondissant à 12 milliards d’euros contre 7,8 milliards en 2019.
Aussi Kering et Richemont
Kering (Gucci, Yves Saint Laurent, Bottega Veneta) dépasse ses ventes d’avant pandémie à 17,6 milliards d’euros (18,4 milliards de francs) en 2021 avec un bénéfice net de 3,17 milliards d’euros et Hermès frôle les 9 milliards d’euros de ventes avec un bénéfice net supérieur de près d’un milliard à celui d’avant la pandémie à 2,44 milliards.
Le groupe genevois Richemont, propriétaire de Cartier, qui publie ses résultats en décalé, a lui aussi annoncé mi-janvier pour son troisième trimestre des ventes en hausse de 38% par rapport au même trimestre de 2019 à 5,6 milliards d’euros (5,85 milliards de francs).
Confiance dans le luxe
Cette bonne santé financière n’a pas étonné les analystes. Dans son étude annuelle parue en novembre, le cabinet Bain and Company estimait que «le marché des produits de luxe personnels pourrait atteindre 360 à 380 milliards d’euros d’ici à 2025, avec une croissance soutenue de 6 à 8% par an.» Et ce ne sont pas les restrictions sanitaires et risques inflationnistes qui vont refroidir les ardeurs des groupes qui attaquent 2022 très confiants.
«Nous avons un avantage sur pas mal d’autres sociétés et d’autres groupes, c’est de pouvoir avoir une certaine flexibilité sur nos prix, donc face à l’inflation on a des moyens de réagir», a déclaré le patron de LVMH Bernard Arnault lors de la présentation des résultats.
Hausses des prix
La flexibilité sur les prix «est une des principales caractéristiques de l’industrie du luxe», estime la banque UBS dans une note de début février estimant que «les grandes marques telles que Louis Vuitton (LVMH) ont augmenté leurs prix au cours des 20 dernières années en moyenne de 2,5 fois le taux d’inflation.»
«Travailler la désirabilité»
«A chaque nouvelle saison, on crée une nouvelle collection, on revoit toutes les matrices de prix», a expliqué le patron de Kering François-Henri Pinault lors de la présentation des résultats à la presse. Mais s’il note depuis quelque temps «une inflation gigantesque sur les transports», il attribue les hausses de prix aussi au fait de «travailler la désirabilité des maisons», selon lui, qui passe par «la sophistication des produits», la «montée en gamme», avec «des produits dont le prix augmente».
Augmentations chez Rolex
«Dans certains cas, la demande dépasse l’offre, ce qui signifie que les consommateurs vont à la fois acheter et accepter de payer des prix plus élevés», explique la banque HSBC dans une note de janvier. Rolex, «qui s’est largement abstenu d’augmenter ses prix au cours des deux dernières années, a démarré l’année 2022 avec des hausses de prix moyennes de plus de 3% et, pour certains modèles, elles ont atteint jusqu’à 12%», selon cette note.
Attention aux hausses brusques
Hermès, qui a fait face à une demande «très forte» de ses produits, augmente ses prix une fois par an, selon son gérant Axel Dumas interrogé sur le sujet lors de la présentation de ses résultats. «Tous nos produits ont les mêmes marges, on ne joue pas avec nos prix. Ils sont liés au prix de fabrication et pas à leur désirabilité», a-t-il expliqué, estimant l’augmentation autour de 3,5%. La fabrication artisanale des sacs fait qu’ils «sont peut-être moins soumis que d’autres aux prix de l’énergie et des matières premières», a-t-il ajouté.
Attention toutefois à ces hausses de prix, prévient Arnaud Cadart, gérant de portefeuille chez Flornoy, «cela peut freiner les achats». «Il y a des limites. Un sac à 1000 euros qui passe à 1200 euros le lendemain, cela peut freiner la demande», ajoute-t-il.