Bande dessinée: à Berlin, Blake et Mortimer vont droit dans le mur

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Bande dessinéeÀ Berlin, Blake et Mortimer vont droit dans le mur

Un duo de scénariste inédit use et abuse de références pour lancer nos héros à la rescousse de Kennedy. Un passage en Suisse ne suffit pas à sauver de l’ennui.

Michel Pralong
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Michel Pralong

En préambule de ce 29e tome de Blake et Mortimer, les deux nouveaux scénaristes José-Louis Bocquet et Jean-Luc Fromental font part de leur admiration pour l’œuvre d’Edgar P. Jacobs. Et c’est sans doute pour trop vouloir lui rendre hommage en utilisant de nombreux ingrédients que savait doser leur illustre prédécesseur qu’ils nous livrent un plat particulièrement indigeste.

Car non seulement ils piochent dans le répertoire jacobsien, mais ils multiplient les autres références. Comme il s’agit d’un récit d’espionnage, ils font appel à «L’affaire Tournesol», brillante incursion d’Hergé dans le genre. Ce qui nous vaut la visite à Genève et sur le Léman du capitaine Blake, dont la voiture finira dans le lac dans une scène copiée collée des aventures de Tintin.

Hitchcock mais pas hitchcockien

Pourquoi ne pas faire également appel à Hitchcock, qui apparaît lui-même dans l’album, avec des images de «Psychose» et une ambiance qui rappelle «Le rideau déchiré», qui est d’ailleurs l’un des moins bons films du maître du suspense. Car oui, nos héros sont en pleine guerre froide et leur aventure va les emmener dans le Berlin coupé en deux par le mur, le jour de la fameuse visite du président Kennedy.

Là, les scénaristes innovent, raccrochant l’univers imaginaire de Blake et Mortimer à une réalité historique. Jacobs ne l’avait pas fait et on comprend pourquoi; ça ne colle pas. Pourquoi si on se lance là-dedans ne pas faire ensuite Blake et Mortimer et Martin Luther King ou avec les Beatles?

Olrik, comme d’habitude

Et puis il y a Olrik, évidemment. C’est lui que l’on retrouve derrière un terrifiant complot, mais en fait, cela aurait tout aussi bien pu être un froid et cruel colonel soviétique. Cet épisode n’apporte rien au machiavélique personnage qui joue sa partition sans la moindre surprise.

En accentuant certains tics de Jacobs, les scénaristes confondent hommage et maladresse. Donner chaque marque d’automobile ou d’avion dans les récitatifs devient vite assommant. Et c’est sans doute pour faire un clin d’œil à une naïveté dont pouvait faire preuve Jacobs que les auteurs nous servent un Blake «subtilement grimé» pour passer à l’Est, alors qu’il n’a qu’un chapeau, des lunettes et un costume prince de Galles. Sous un faux nom particulièrement recherché puisque Blake devient… White. Ridicule!

Aubin au dessin, qui avait fait «L’onde Septimus» sur un scénario de Dufaux, livre une partition étrange, oscillant entre un classicisme ronronnant et des expressions de visage extrêmes, comme cette scène qui fait référence (encore!) à «Orange mécanique».

On vous l’avoue, on a même sauté la lecture de quelques cases pour en finir plus vite avec ce pensum et ces rebondissements qui n’en finissent pas. Pas facile d’utiliser les ingrédients de Jacobs pour livrer une recette savoureuse. Même Van Hamme et Yves Sente ont alterné bons et moins bon albums. Trop de références tuent les références. Et trop de Blake et Mortimer risque de lasser le public. Ce tome est à oublier et on finit même par ne plus se réjouir du prochain.

«Les aventures de Blake et Mortimer: huit heures à Berlin», de Bocquet, Fromental et Aubin, Éd. Blake et Mortimer, 64 pages, sortie ce 25 novembre.

«Les aventures de Blake et Mortimer: huit heures à Berlin», de Bocquet, Fromental et Aubin, Éd. Blake et Mortimer, 64 pages, sortie ce 25 novembre.

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