Politique française: La bataille continue après le passage en force de Macron sur les retraites

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Politique françaiseLa bataille continue après le passage en force de Macron sur les retraites

Vendredi, les oppositions revigorées vont déposer leurs motions de censure contre le gouvernement Borne et les syndicats tenteront d’amplifier le mouvement social.

Quelques milliers de manifestants s’étaient rassemblés dès jeudi après-midi pour dénoncer le recours au 49.3.

Quelques milliers de manifestants s’étaient rassemblés dès jeudi après-midi pour dénoncer le recours au 49.3.

KEYSTONE/AP PHOTO/THOMAS PADILLA

Fragilisés par le passage en force du gouvernement sur la réforme des retraites à l’Assemblée nationale, Emmanuel Macron et sa Première ministre Elisabeth Borne feront face vendredi à des oppositions revigorées qui déposeront leurs motions de censure et des syndicats qui tenteront d’amplifier le mouvement social.

Après le coup de tonnerre de jeudi et le recours à l’article 49.3 de la Constitution pour adopter sans vote le projet de réforme des retraites, presque unanimement considéré comme un revers pour Emmanuel Macron qui a beaucoup misé de son crédit politique sur cette réforme clé de son second quinquennat, les opposants vont tenter de faire basculer l’exécutif dans une crise politique.

Trois motions de censure pourraient être déposées avant l’heure limite en milieu d’après-midi: une par le parti d’extrême droite Rassemblement national, une par la coalition de gauche Nupes, et une troisième par un petit groupe centriste dissident.

Elles seront ensuite votées au moins 48 heures plus tard, plus probablement lundi. Pour faire chuter le gouvernement, elles devront rassembler une majorité absolue de députés, ce qui semble difficilement atteignable vu que la coalition présidentielle dispose d’une majorité relative et que le parti de la droite traditionnelle Les Républicains, qui a un rôle pivot, a assuré qu’il n’en voterait aucune. Mais certains députés LR frondeurs pourraient ne pas suivre la ligne officielle.

Emmanuel Macron à Paris le 16 mars 2023.

Emmanuel Macron à Paris le 16 mars 2023.

AFP

«Nous avons un problème de démocratie parce que ce texte, qui va changer la vie des Français, va être adopté sans qu’il y ait eu le moindre vote à l’Assemblée nationale», a assuré le député LR Aurélien Pradié auprès de BFMTV. «Que chacun mesure la gravité de la situation et le risque de rupture démocratique qu’il y a dans notre pays».

Sur le front social, les syndicats vont tenter de redonner du souffle aux manifestations et grèves qui émaillent la vie des Français depuis la mi-janvier, mais qui étaient en perte de vitesse jusqu’à jeudi.

Manifestations prévues

Ils appellent à des «rassemblements locaux de proximité» ce week-end ainsi qu’à une neuvième journée de grèves et de manifestations le jeudi 23 mars.

Les syndicats ont dénoncé un passage «en force» et mesurent «avec gravité la responsabilité que porte l’exécutif dans la crise sociale et politique qui découle de cette décision, véritable déni de démocratie».

Dans la soirée, les forces de l’ordre ont dû disperser les manifestants à l’aide de canons à eau et de gaz lacrymogènes.

Dans la soirée, les forces de l’ordre ont dû disperser les manifestants à l’aide de canons à eau et de gaz lacrymogènes.

KEYSTONE/EPA/YOAN VALAT

Quelques milliers de manifestants s’étaient rassemblés dès jeudi après-midi place de la Concorde, non loin de l’Assemblée nationale, pour dénoncer le recours au 49.3, avant que la situation dégénère et que les forces de l’ordre les dispersent dans la soirée, à l’aide de canons à eau et de gaz lacrymogènes.

La présidente du groupe Renaissance --le parti présidentiel-- à l’Assemblée nationale, Aurore Bergé, a demandé jeudi soir au ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin de «mobiliser les services de l’État» pour la «protection des parlementaires» de la majorité, pris pour cible par des opposants à la réforme des retraites.

Poubelles

Gouvernement et opposition de gauche s’accusent mutuellement de pousser à la violence.

Le député écologiste (Nupes) Julien Bayou a accusé jeudi le gouvernement d’être «prêt à mettre le pays à feu et à sang», tandis que Mme Borne s’est dite sur TF1 «très choquée» par l’attitude de certains députés de l’opposition, évoquant les «hurlements» sur les bancs de la Nupes, les coups sur les pupitres du côté du RN.

«Ils veulent le chaos à l’Assemblée et dans la rue», a-t-elle mis en garde alors que les grèves dans certains secteurs d’activité qui durent depuis plusieurs jours, énergie, ports et ramassage d’ordures, créent quelques perturbations dans le pays. D’autres blocages pourraient survenir vendredi.

À Paris, dont certains quartiers croulent sous des tonnes d’ordures, les autorités vont réquisitionner des personnels pour évacuer les poubelles.

Selon Elisabeth Borne, la décision de recourir à l’article 49.3 fut «collective» entre le gouvernement et le chef de l’État. Elle est largement considérée comme un revers pour Emmanuel Macron après plusieurs semaines de pourparlers avec partis politiques et syndicats.

À Paris, certains quartiers croulent sous des tonnes d’ordures.

À Paris, certains quartiers croulent sous des tonnes d’ordures.

AFP/Christophe ARCHAMBAULT

C’est un «révélateur de l’isolement d’Emmanuel Macron» pour le journal Le Monde. «La suite du quinquennat risque d’être durablement plombée» pour le journal de gauche Libération. Le patron du syndicat CFDT Laurent Berger évoque un «naufrage».

«C’est un crash», estimait même un responsable du groupe présidentiel à l’Assemblée, sous couvert d’anonymat, avant d’ajouter: «il faut une dissolution» de l’Assemblée nationale et convoquer des élections législatives anticipées.

(AFP)

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