CommentaireEn Valais, le suicide assisté plus fort que le péché
Les Valaisans ont accepté largement de laisser le libre choix aux personnes en fin de vie. Même si le suicide assisté est considéré par l’Église catholique comme un «grave péché».
- par
- Eric Felley
Le sujet était présenté comme très délicat dans un canton où les valeurs chrétiennes traditionnelles sont encore bien implantées. Mais le résultat de ce week-end montre un Valais qui s’est largement émancipé sur le sujet. Plus de trois Valaisans sur quatre ont soutenu la proposition du Grand Conseil d’obliger les EMS et les homes à accepter le choix des patients, qui veulent partir avec une assistance au suicide.
Les milieux conservateurs, sous l’égide du comité «Pro Liberty», ont mené une campagne bien organisée pour défendre la liberté de ces institutions contre la liberté des patients. Mais ce message n’est pas passé. Même le Haut-Valais a voté oui à cette loi, à part quelques petites communes. Il y a vingt ans, le Valais l’aurait probablement refusée. Mais, année après année, le suicide assisté est entré dans les mœurs comme une solution pour quitter cette terre dignement sans être soumis aux règles divines de la «mort naturelle» et son lot d’agonie et de souffrance. Le droit à «une fin de vie digne» a d’ailleurs été introduit dans la nouvelle Constitution.
Un «grave péché»
Le comité Pro Liberty, emmené par l’ancien conseiller aux États Jean-René Fournier ou le conseiller national Benjamin Roduit, se défendait d’être «un groupe d’intérêts religieux», mais il n’en était pas moins composé de personnes engagées sur ce plan. La doctrine chrétienne dénonce sans ambiguïté l’évolution des pratiques qui permettent d’abréger la fin de la vie: «Ceux qui adoptent des lois sur l’euthanasie et le suicide assisté sont complices du grave péché que d’autres commettront», dit un texte sur le sujet signé par le pape François en 2020.
Même une simple présence
Dans le même texte, l’Église catholique considère que l’aide au suicide est «une collaboration indue à un acte illégal. De telles pratiques ne sont jamais une aide réelle pour la personne malade, mais une aide pour mourir». Cela va plus loin encore: «Aucun geste extérieur n’est admissible de la part de ceux qui assistent spirituellement ces personnes malades, qui puisse être interprété comme une approbation de l’action euthanasique, comme rester présent au moment de sa réalisation. Une telle présence ne peut être interprétée que comme une complicité».
En votant oui à cette loi, la population valaisanne a montré qu’elle était depuis un moment déjà sur le chemin de la laïcité. Il ne lui reste plus qu’à supprimer «Au nom de Dieu Tout-Puissant» comme préambule à sa nouvelle Constitution. Un sondage réalisé l’année dernière par «Le Nouvelliste» avait montré que 39,5% des personnes interrogées étaient encore attachées à cette formule contre 60,5% en faveur du texte de la Constitution fribourgeoise qui parle d’un peuple «croyant en Dieu ou puisant ses valeurs à d’autres sources».