FootballSaint-Gall, le retour dans la lumière
Fléchettes et ping-pong, respect et énergie, individualités et union sacrée. Entraîneur de la meilleure équipe de 2022 derrière Zurich, Peter Zeidler explore les pistes du renouveau saint-gallois. Les Brodeurs joueront à Sion ce samedi (20h30).
- par
- Florian Vaney
C’est la mi-temps. Celle du printemps. Saint-Gall vient de remporter la première période sur ce qui s’apparente à un bon 4-0. Il remplit son stade tous les quinze jours, n’a pas perdu un seul match en 2022 (21 points sur 27), s’est définitivement éloigné des places à risque de Super League. On lui prête les qualités d’un cador et le plus grand pouvoir d’attractivité du pays à l’heure actuelle. Il roule sur les traces de sa glorieuse version de 2019/2020, mais traîne avec lui son fardeau: ce premier tour de misère qui semble à présent si loin, si flou. «Pourtant, pas tant de choses ont changé.» À mi-chemin entre le renouveau saint-gallois du début d’année et la ligne d’arrivée, Peter Zeidler se veut intriguant.
On le comprend vite, c’est une façon de garder les pieds sur terre. «À Lucerne, on perdait 2-0 après 10 minutes. Contre YB, c’était même 3-0 pour eux à la 50e. On bat Zurich 3-0, mais la victoire aurait très bien pu nous échapper.» De la nuance, toujours, pour l’entraîneur saint-gallois, qui ne se laisse pas placer sur un piédestal sans réagir. Il y a là aussi une manière de temporiser cette aspiration vers le sommet, pas si évidente que ça à expliquer.
Jordi Quintilla, le retour de l’équilibre
Plus que de grands chamboulements ou de nouvelles méthodes révolutionnaires, Peter Zeidler parle d’énergie, de bien-être intérieur. Le cas du capitaine, Lukas Görtler, est particulièrement intéressant ici. «Il a porté beaucoup de la négativité accumulée durant l’automne sur ses épaules. Il se sentait moins bien et cela a fini par se ressentir sur le terrain. Le retour de Jordi Quintilla, durant la trêve, lui a fait énormément de bien. Au niveau de l’équilibre au milieu, du partage des responsabilités.»
Sion pour un quatre sur quatre
L’Allemand a retrouvé un très bon niveau. Tous les Brodeurs en profitent, particulièrement le côté droit où il évolue. Et à gauche, les Saint-Gallois ont fait émerger la révélation de l’année: Isaac Schmidt. Le latéral par qui quasiment tout passe en ce moment. Pour le pire (son match contre Bâle) et le meilleur (la plupart des autres). «En revisionnant notre partie contre Lucerne, ça saute aux yeux: c’est de la gauche que partaient presque toutes nos offensives. Parce qu’Isaac a une créativité au-dessus de la moyenne. D’ailleurs, on voit qu’il a été très bien formé par le Lausanne-Sport, notamment sur tout ce qui s’apprend entre 8 et 12 ans. La capacité à mettre un ballon au sol proprement, par exemple. Chez nous en tout cas, il est adoré!»
S’attarder sur les individualités, c’est se rendre compte que beaucoup de Saint-Gallois évoluent à un haut niveau en ce moment. Peut-être même jusqu’à sur-performer pour certains. Si le mouvement est commun, c’est vraisemblable qu’il se passe quelque chose de positif à l’interne, dans le vestiaire, sur le plan collectif. «Tout est là. Si je n’avais pas peur de reprendre un cliché d’entraîneur, je dirais que le groupe vit bien. Pas qu’il ait vraiment mal vécu avant, mais plutôt qu’il vive particulièrement bien actuellement.»
Peter Zeidler évoque cette table de ping-pong ou cette cible de fléchettes prises d’assaut par ses protégés après l’entraînement. Sorte de prolongement de la vie de groupe auquel tout le monde adhère. Ou ces minutes qui précèdent chaque entraînement. Les francophones forment un groupe, les germanophones un autre. «On imagine toujours un petit jeu, avec un gage pour les perdants. Comme laver les chaussures des autres, par exemple», sourit le technicien. Pas de quoi créer deux camps pour autant: «Les joueurs s’associent par langue, ça a toujours été comme ça. C’est aussi un moment où ils peuvent échanger sur tout et n’importe quoi, avant de se réunir tous ensemble.»
Hiérarchie et pouvoir du public
Respect et énergie, voilà les deux mots qui sortent le plus de la bouche du coach allemand. Le respect, c’est notamment celui de la hiérarchie. Celui auquel les recrues hivernales dont on a tant parlé (Julian von Moos, Bastien Toma, Jordi Quintilla, Alexandre Jankewitz, Christopher Lungoyi et Matej Maglica) ont dû se plier. «Tous ont montré beaucoup de compréhension à cet égard. À Saint-Gall comme ailleurs, il y a des cadres. Görtler, Stillhart, Fazliji, Quintilla qui a longtemps joué chez nous avant de revenir. Il ne s’agit pas de favoritisme, mais ils possèdent un statut et chacun doit l’accepter.»
L’énergie, elle, descend des gradins à chaque fois que le Kybunpark est à l’honneur. Les joueurs donnent, ils reçoivent en retour. «C’est plus que ça. J’ai l’impression que tout ce que le monde vit actuellement – la guerre, la peut-être fin du Covid… – renforce le sentiment d’être simplement heureux d’assister à un match de foot et de pousser en avant son équipe. Il se dégage quelque chose de très fort de nos fans en ce moment.» L’union sacrée. Saint-Gall n’a pas l’intention de lever le pied en seconde mi-temps. Jouez!