FootballEn Conference League, le projet du FC Bâle gagne en légitimité
Les buts d’Andy Diouf et de Zeki Amdouni contre la Fiorentina (1-2) valident en partie une politique basée essentiellement sur le talent. En Europe, ça marche.
- par
- Valentin Schnorhk Florence
Dans ces moments-là, on ne fait plus que négocier avec l’histoire. À quel prix acceptera-t-elle de faire entrer dans sa légende le FC Bâle? Là, avec ce but de Zeki Amdouni à la 92e minute de cette demi-finale aller à Florence, elle peut se montrer plus généreuse.
Car un club suisse n’a jamais été aussi près de se qualifier pour une finale de Coupe d’Europe. Et même s’il s’agit de la Conference League, rien n’enlève de la valeur à ce succès 2-1 sur la pelouse de la Fiorentina.
Les trois enseignements
Il ne faut jurer de rien avec cette équipe. En Conference League, Bâle a des ressources qui se rapprochent plus de l’irrationnel qu’autre chose. Mais à force, ce ne peut plus complètement être une surprise: le FCB semble ne jamais paniquer et a suffisamment de talent pour faire tourner les matches dans le bon sens. Et à ce stade de la compétition, c’est la seule chose qui compte.
Parce qu’elle s’est écartée de ce qui a longtemps fait l’essence du club rhénan, à savoir sa formation locale, la politique de David Degen est fondamentalement critiquable. Mais le projet du FC Bâle, qui cherche à promouvoir les jeunes joueurs pour les revendre ensuite, gagne en légitimité avec le talent d’Andy Diouf et de Zeki Amdouni. En Coupe d’Europe, sur cette scène qui suggère moins de régularité que le championnat, il se voit plus que jamais.
Bâle doit toutefois faire attention à ne pas se reposer sur ses lauriers. Si son plan de jeu était de rester compact le plus longtemps possible, Heiko Vogel doit bien concevoir que son équipe a été incapable de véritablement sortir de son camp pendant près de 70 minutes. Et il vaudrait mieux ne pas manquer de solutions pour éliminer la pression d’ici une semaine à Saint-Jacques.
Le meilleur: Andy Diouf
S’il n’y avait que son but, cela serait déjà beaucoup. En y ajoutant la prestation d’ensemble, le match d’Andy Diouf devient énorme. Le Français n’aura 20 ans que la veille du match retour, mais il dégage déjà une assurance et une confiance qui prédisent une grande carrière. Celui qui a d’abord été prêté par le Stade Rennais, avant que Bâle ne lève l’option d’achat la semaine passée, se révèle aux yeux de l’Europe, après avoir été déjà très performant lors du match aller contre Nice en quart de finale.
À Florence jeudi, Andy Diouf a surtout marqué par sa capacité à faire souffler son équipe. Lui donner la balle, c’est la promesse de gagner des mètres. Pas un ou deux: cela se compte par dizaine. Sa force de percussion balle au pied et sa justesse ensuite font de son profil un idéal du football moderne, et celui de demain. Et si en plus il est capable de marquer des buts comme celui du 1-1, alors on doit bien se dire qu’on assiste à l’émergence d’un grand. Bâle l’a d’ailleurs empêché de partir à la Coupe du monde des moins de 20 ans en Argentine avec la France: la finale de Conference League dépend notamment de lui.
Le moins bon: Jean-Kevin Augustin
Un petit traquenard. C’est sans doute son entrée décisive contre Nice au tour précédent qui a incité Heiko Vogel à préférer Jean-Kevin Augustin à Andi Zeqiri pour accompagner Zeki Amdouni à la pointe de l’attaque bâloise. Était-ce vraiment justifié? Certes, le Français a su garder quelques ballons importants et a fait preuve d’une certaine débauche d’énergie.
Mais dans l’approche qui a longtemps été celle du FCB, à savoir jouer des ballons aériens plein axe, «JKA» n’a pas pu se mettre en valeur. Régulièrement battu au duel par la paire Martinez Quarta-Ranieri, le joueur formé au PSG était sans doute la mauvaise personne dans la mauvaise zone. Il n’est pas seul responsable de son match moyen, mais il l’est quand même.
La décla’
Le fait tactique: les sorties de balles bâloises
Jeudi, la Fiorentina était le favori. Alors elle a joué comme un favori. Avec comme indicateurs notables une possession largement à son avantage et, aussi, un pressing très haut. C’est en combinant ces deux aspects que la Viola a longtemps eu une emprise totale sur le FC Bâle. Mais ce dernier aurait sans doute pu faire un petit peu mieux que ça. Notamment dans sa capacité à sortir la balle, particulièrement en première période, lorsque la pression était la plus intense.
Un point à saluer pour les Rhénans: ils avaient envie de ne pas faire n’importe quoi. Leur relance est travaillée. Ainsi, sur les dégagements aux 6 mètres, Marvin Hitz avait à ses côtés Michael Lang et Andy Pelmard. Le défenseur axial Kasim Adams se situait, lui, plus haut. De quoi être ciblé par les trois attaquants italiens, Cabral marquant directement Adams.
Mais c’est plus haut sur le terrain qu’il y avait une particularité, déjà entrevue lors de matches précédents: Andy Diouf se positionnait à la hauteur des attaquants. Pendant ce temps-là, les deux autres milieux Taulant Xhaka et Wouter Burger descendaient plus bas, pour attirer les milieux adverses. Bien que coupé en deux (ce qui favorisait notamment les ballons mi-longs directement vers Augustin), Bâle a contraint la Fiorentina à faire un choix.
Que faire du positionnement de Diouf? C’est le latéral gauche Cristiano Biraghi qui s’en est chargé. Alors Dan Ndoye, positionné comme un latéral devait avoir face à lui un autre vis-à-vis. Le désigné? Le milieu relayeur Mandragora, pendant qu’Amrabat et Bonaventura surveillaient la paire Burger-Xhaka. Et côté gauche bâlois?
C’est là où l’espace aurait dû être plus souvent trouvé par le FCB. Parce que Riccardo Calafiori avait plus de temps que ses partenaires. En effet, compte tenu de la triple menace bâloise sur la défense florentine, le latéral droit Dodô s’est souvent voulu conservateur, en accompagnant ses partenaires pour les protéger et garantir une supériorité numérique derrière.
Sauf que Bâle n’est presque jamais sorti depuis son côté gauche, où il y avait pourtant d’éventuelles combinaisons à exploiter avec Amdouni. Par manque de confiance? Peut-être plutôt par absence de repères, sachant que Calafiori a très peu occupé ce rôle ces derniers temps. Il y a sans doute un scenario à préparer un peu mieux en vue du match retour, sachant qu’il faudra trouver un moyen d’effacer la pression italienne.
La statistique
9, comme le nombre de fois où Bâle est entré dans la surface de la Fiorentina jeudi. C’est le plus faible total des Rhénans cette saison, toutes compétitions confondues. Et cela dit beaucoup de leur réalisme.
Une question pour penser l’avenir
À quel point Bâle est-il capable de gérer un avantage durant l’ensemble d’un match, sachant qu’il y a un rendez-vous avec l’histoire à la clé?