Tour de RomandieHumeur: Ces fans qui viennent remplir leur Pokédex
L’arrivée des bus des équipes lance une forme de chasse aux Pokémons. Bien des personnes en roue libre semblent décidées à s’offrir le plus de signatures.
- par
- Rebecca Garcia - Leysin
L’ambiance aux abords des bus d’équipe a de quoi interloquer.
Dans le défilé constant des voitures de directeurs sportifs, de cyclotouristes, de journalistes et de curieux, il y a bien des personnes en train de remplir leur Pokédex (Cycledex?). De quoi sortir de sa bulle.
Et même s’il y a énormément de curieux, d’admirateurs aux yeux brillants et d’enfants en découverte d’une nouvelle vocation, ce n’est pas d’eux dont il est question ici. Il n’y a pas que des Sacha qui prennent soin de leur Pikachu.
Non, là il faut parler de la Team Rocket. Ces chasseurs de Pokémons qui vont tendre leur carton au premier venu pour une signature, sans même leur adresser un regard. De ces photos qui n’ont d’humain que les sujets. S’ils pouvaient leur balancer une balle dans la figure pour les capturer et les montrer aux copains, nul doute que certains se lanceraient.
À Fribourg autour des bus, cette phrase d’un enfant de 12 ans en trottinette en dit long: «Moi je ne pars pas d’ici tant que je n’ai pas un selfie avec le gagnant!» Manque de bol: il est passé au moins trois fois devant le bus de l’équipe sans jamais percuter que Dorian Godon en était membre.
Attrapez-les toutes
La palme de la scène la plus grandiose est décernée à cette petite fille à Oron. Coiffée d’une douzaine de casquettes, elle en a demandé une nouvelle à un badaud passant à côté du bus de l’équipe Groupama-FDJ. Jamais douze sans treize.
«Je ne travaille pas ici», s’est défendu l’homme, assez étonné. Autour d’eux, d’autres passants ont entendu la scène. Ils ont surtout vu les casquettes empilées, certaines visières pointaient à gauche, les autres à droite. Les commentaires ont fusé: «Elle en a pas assez sur la tête?» ou encore «Elle veut ouvrir une boutique?»
Un de ses camarades ne voulait pas repartir les mains vides. «Vous avez pas une gourde, ou quelque chose?» Il l’a obtenue, comme cette famille qui était manifestement passée au même endroit le matin même. «Tu reconnais? Ce sont eux qui t’ont donné le bidon», a soufflé le papa à son enfant.
À force de les voir arriver, il devient évident que les équipes sont habituées et préparées à ces collectionneurs de contenants. «J’en ai des différentes de l’an dernier», prévient un membre de Bahrain-Victorious, en ravitaillant un couple.
«Ici ça va encore, affirme Milan Mensen (ndlr: de l’écurie Joyco-AlUla). Si vous allez sur un Grand Tour comme le Tour de France ou la Vuelta, c’est complètement fou pour les meilleurs coureurs.»
Fou comment? «Ils prennent les bidons de votre vélo une fois que vous franchissez la ligne d’arrivée», décrit le Belge. On dirait qu’avec le temps, ça devient plutôt marrant d’être observateur privilégié de ce phénomène. «Les enfants de nos jours… rigole-t-il. Quand ils demandent, ça va.»
«Le public est important pour nous. Ils sont là pour nous soutenir et nous motivent vraiment», estime Sergio Andres Higuita Garcia (BORA-Hansgrohe). Alors s’il faut seulement lâcher des sourires et des bidons pour les avoir à sa cause, pourquoi pas.