Qatar 2022Trois questions pour préparer Brésil – Suisse
Le plan de Murat Yakin? Comment Neymar sera-t-il remplacé? Quelles solutions pour faire face au contre-pressing brésilien? Tout ce qu’il faut avoir en tête, avant lundi 17 heures.
- par
- Valentin Schnorhk Doha
S’il y a un exploit à faire, c’est peut-être celui-là. Il y a bien plus grand que de battre le Portugal et l’Espagne en Ligue des nations, et même que de terminer devant l’Italie championne d’Europe lors des qualifications au Mondial. Cette fois, c’est de la Coupe du monde qu’il s’agit, et les projecteurs du Stade 974 de Doha seront braqués sur l’équipe de Suisse, lundi (17h00 au pays, 19h00 au Qatar).
Au début, bien sûr, les téléspectateurs du monde entier surveilleront d’un œil attentif ce Brésil privé de Neymar. Mais le moment pour briller interviendra plus tard, dans le déroulement de la partie: si Murat Yakin et l’ensemble de l’équipe de Suisse entendent faire un coup et gagner en crédibilité, ce sera bien dans ce deuxième match de groupe, lors duquel ils n’ont rien à perdre. Ça ne fait pas baisser l’excitation: voici les trois questions majeures pour préparer le match.
Que prépare Murat Yakin?
Murat Yakin a une idée derrière la tête. Ça ne peut pas en être autrement. La part de mystère qu’il a tenté de dissimuler en conférence de veille de match, dimanche, l’a laissé entendre. Plusieurs fois interrogé sur les options qu’il pourrait prendre face au Brésil, le sélectionneur de l’équipe de Suisse a enrobé ses réponses de fausses pistes, laissant entendre qu’il y a à chaque fois bien des manières de procéder. Ou alors en restant très vague.
La défense à quatre? «Il n’y a pas de raison de revenir dessus», a-t-il ainsi consenti. Tout en ajoutant différents éléments, qui laissent à penser à certaines adaptations: «Nous avons montré que collectivement, nous pouvons atteindre notre objectif. Nous sommes bien préparés. Nous devons surtout être dans le bon timing, avec la bonne intensité. Sur les côtés, tant Rodriguez que Widmer sont assez expérimentés pour défendre correctement.»
Le positionnement de Granit Xhaka, probablement plus bas que contre le Cameroun, afin de ressortir les ballons plus facilement face à la pression haute brésilienne? «Nous savons que les phases de transition haute sont particulièrement bien appréhendées par le Brésil, a acquiescé Yakin. Mais nos joueurs, à l’instar de Granit, sont assez expérimentés pour jouer là où cela correspond le mieux à leurs qualités. Par rapport au match contre le Cameroun, nous devrons faire mieux, mais pas changer fondamentalement. Si l’on avait mieux trouvé Granit, jeudi, il aurait pu se trouver cinq ou six fois en position de conclure.» Avant de se référer à sa flexibilité.
Bref, Murat Yakin brouille les pistes. «Ce sera un match tactique et il est évident que ça me plaît de devoir trouver la solution», a-t-il aussi souri. Ce genre de confrontation, face à un adversaire réputé beaucoup plus fort que son équipe, c’est ce qu’il aime le plus. La quête de l’idée magique: c’était Fabian Frei contre l’Italie lors du 0-0 de Bâle, c’était Noah Okafor en pointe au retour à Rome. Il y avait aussi Breel Embolo sur une aile et Haris Seferovic en pointe contre le Portugal en juin.
Et cette fois-ci, quelle sera cette solution imaginée? Que peut-il bien nous trouver? La défense à quatre semble une évidence. Autre certitude: ce sera sans Okafor, blessé (lire ci-dessous). Mais ensuite? Le dispositif tactique pourrait changer. Yakin sait que, sur les côtés, il faudra être prudent, penser à des prises à deux: peut-être donc que Xherdan Shaqiri n’y évoluera pas, laissant par exemple Djibril Sow s’occuper de l’aile droite. Il l’avait déjà fait en République Tchèque en juin. Ce sont des pistes. Mais Yakin se plaît à les brouiller.
La composition probable de la Suisse: Sommer; Widmer, Akanji, Elvedi, Rodriguez; Sow, Freuler, Xhaka, Vargas; Shaqiri; Embolo.
Comment le Brésil va-t-il remplacer Neymar?
Les regrets d’abord. Tite sait que la thématique revient depuis trois jours, et qu’il aurait peut-être pu l’éviter. Ce sont presque des excuses: «Je n’avais pas remarqué que Neymar était blessé et je l’ai laissé dix ou douze minutes sur le terrain avec sa blessure, a expliqué le sélectionneur brésilien. C’était une erreur, que j’ai également commise avec Danilo.»
C’est ainsi. Neymar reviendra peut-être durant cette Coupe du monde. Il passe son temps à soigner sa cheville, jusqu’à 5 ou 6 heures du matin avec les kinés, assure-t-on dans les rangs de la Seleçao. Sauf que lundi, contre la Suisse, il faudra faire sans. Et il faudra le remplacer. Toutes les équipes n’ont pas les mêmes problèmes: Tite a du choix.
Quelles options va-t-il prendre? «Je ne souhaite pas partager l’information», s’est tu l’entraîneur à succès du football auriverde. Il y en a deux vraisemblables: celle où il renforce son milieu de terrain avec Fred ou Bruno Guimarães pour accompagner Casemiro devant la défense, amenant Lucas Paqueta à monter d’un cran, en soutien de Richarlison. Ou alors en introduisant Rodrygo, l’attaquant du Real Madrid, poste pour poste pour Neymar, dans une forme de deuxième attaquant, un rôle qu’il a occupé contre la Serbie lorsqu’il est entré en jeu.
«La Suisse est une équipe différente de la Serbie, a reconnu César Sampaio, l’adjoint de Tite. Déjà, elle joue à quatre défenseurs. Elle a aussi des joueurs intelligents au milieu. Nous ferons face à une configuration différente et nous devons adopter l’approche appropriée en fonction de ça. Je pense par exemple qu’il y aura beaucoup moins de ballons aériens que contre la Serbie.» Une raison peut-être pour aligner Dani Alves sur le côté droit de la défense, en remplacement de Danilo. L’alternative étant le Madrilène Eder Militão, qui est plutôt un défenseur central.
La composition probable du Brésil: Alisson; Eder Militão (ou Dani Alves), Marquinhos, Thiago Silva, Alex Sandro; Lucas Paqueta, Casemiro; Raphinha, Rodrygo, Vinicius; Richarlison.
Les infos bonus
La clé tactique: comment sortir du contre-pressing brésilien?
Le Brésil, ses stars, son talent fou, ses capacités techniques sans égales, ou presque. Et son sens de l’organisation. Surtout, ce qui a frappé le staff de l’équipe de Suisse (qui a assisté du stade à la victoire 2-0 contre la Serbie), c’est son contre-pressing. Autrement dit, sa capacité à récupérer le ballon immédiatement après la perte. Le temps de récupération moyen des Brésiliens sur ce premier match atteste de cette domination: 8,7 secondes. C’est un des meilleurs scores depuis le début de la compétition, qui plus est dans un schéma où le score a mis du temps pour se décanter.
«Le but sera bien sûr de sortir de cette pression», admettait Vincent Cavin, l’assistant de Murat Yakin, vendredi. «En théorie, tout est facile, mais s’ils jouent comme contre la Serbie, il sera très compliqué de faire un résultat», ajoutait-il. Parce que le Brésil s’organise avec le ballon en anticipant la perte. Un joueur est particulièrement important dans ce projet: Casemiro. Le milieu de Manchester United est le premier étage de la fusée à la perte de balle: il a récupéré dix ballons jeudi. Souvent, il suffit, même si la défense centrale composée de Marquinhos et Thiago Silva est là pour couvrir, le cas échéant, et à même de défendre en avançant.
La clé pour l’équipe de Suisse, c’est donc de sortir de cette pression immédiate. Sans quoi le risque de voir le Brésil s’installer dans son camp sur des séquences interminables. Et qui peuvent régulièrement se terminer par une occasion ou, au moins, une situation chaude.
Comment y parvenir? En sortant le plus rapidement possible de la zone de pression. Cela ne signifie pas forcément jouer immédiatement de l’avant, sous peine de voir le ballon revenir d’autant plus vite. Une passe latérale, voire en retrait, peut suffire à se donner de l’air, pour ensuite sauter la pression. C’est exactement le type d’exercice pratiqué à l’entraînement de veille de match dimanche, sur le petit quart-d’heure accordé à la presse.
Ce n’est pas anodin: la Suisse s’est mise en situation de résister à la pression ces derniers jours. Et peut-être que, pour y parvenir, le rôle de Granit Xhaka sera capital. Plus proche il sera du ballon, mieux la Suisse peut s’en porter.