RéchauffementL’EPFZ montre en images l’impressionnant recul des glaciers
En se basant sur des photos historiques, les chercheurs ont pu déterminer que les glaciers suisses ont perdu la moitié de leur volume entre 1931 et 2016. Et ça continue.
![Le glacier de Fiesch (VS) en 1928 (noir et blanc) et 2021. Le glacier de Fiesch (VS) en 1928 (noir et blanc) et 2021.](https://media.lematin.ch/4/image/2023/11/08/bb06927d-2dda-401c-a753-871f9d45cfb1.gif?auto=format%2Ccompress%2Cenhance&fit=max&w=1200&h=1200&fps=10&interval=3&rect=0%2C0%2C1200%2C624&fp-x=0.5&fp-y=0.5&s=c541bee34868b2cba38395ab1751aab2)
Le glacier de Fiesch (VS) en 1928 (noir et blanc) et 2021.
swisstopo et VAW/ETH ZurichLes glaciers suisses perdent de leur volume, cela se voit à l’œil nu. Mais à quelle vitesse et dans quelles proportions depuis un siècle, difficile de le calculer précisément, tous n’étant pas sous surveillance et certaines anciennes données pouvant être imprécises.
Pour avoir une idée bien plus nette de la situation, des chercheurs de l’EPFZ et de l’Institut fédéral de recherches sur la forêt, la neige et le paysage (WSL) ont reconstitué la topographie des glaciers grâce à la stéréophotogrammétrie. Cette technique permet de déterminer la nature, la forme et la position de n’importe quel objet sur la base de paires d’images. Et pour ce faire, ils ont utilisé les relevés des ingénieurs du Service national suisse de la topographie (aujourd’hui swisstopo) faits dès la Première Guerre mondiale jusqu’à la fin des années 1940, couvrant de vastes étendues des Alpes suisses à partir de quelque 7000 emplacements à l’aide de photothéodolites (une combinaison d’un appareil photo et d’un appareil de mesure d’angle).
Une base de 21 700 photos
Ces images d’archives (21 700 photographies prises entre 1916 et 1947) couvrent 86% de la surface glaciaire suisse. «Sur la base de ces photos, nous avons déterminé la topographie de surface du glacier. Si nous connaissons la topographie de surface d’un glacier à deux moments différents, nous pouvons calculer la différence de volume de glace», explique l’auteur principal de l’étude parue dans «La Cryosphère», Erik Schytt Mannerfelt de l’EPFZ et du WSL.
Les conclusions de l’étude sont impressionnantes: le volume des glaciers a été divisé par deux entre 1931 et 2016. Tous les glaciers ne perdent pas leur masse au même rythme. La fonte dépend de trois facteurs: l’altitude du glacier, à quel point son museau (extrémité inférieure) est plat et la quantité de débris sur le glacier.
Les scientifiques ont également constaté que les glaciers n’ont pas fait que reculer au siècle dernier. Dans les années 1920 et 1980, il y a eu une croissance de leur masse, les glaciers individuels avançant. «Bien qu’il y ait eu une croissance sur des périodes à court terme, il est important de garder à l’esprit la situation dans son ensemble. Notre comparaison entre les années 1931 et 2016 montre clairement qu’il y a eu un recul glaciaire important au cours de cette période», déclare Daniel Farinotti, professeur de glaciologie à l’EPFZ et au WSL, et coauteur de l’étude.
De plus, le rythme de cette fonte s’accélère de plus en plus, comme le montre le réseau de surveillance des glaciers GLAMOS, géré par l’EPFZ. Si les glaciers ont perdu la moitié de leur volume entre 1931 et 2016, ils ont encore perdu 12% entre 2016 et 2021, soit en seulement six ans.
«Le recul des glaciers s’accélère. Observer de près ce phénomène et quantifier ses dimensions historiques est important car cela nous permet de déduire les réponses des glaciers à un changement climatique. Ces informations sont nécessaires pour développer des scénarios fiables pour les changements futurs des glaciers», déclare Farinotti.