Présidentielle au Nigeria: Légère avance pour Tinubu, l’opposition crie à la manipulation

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Présidentielle au NigeriaLégère avance pour Tinubu, l’opposition crie à la manipulation

Les partis d’opposition ont dénoncé des «manipulations» alors que Bola Tinubu, du parti au pouvoir, semblait prendre une légère avance lundi soir, après un décompte encore partiel.

Bola Tinubu le 21 février 2023 à Lagos.

Bola Tinubu le 21 février 2023 à Lagos.

AFP

Plus de 87 millions d’électeurs ont voté samedi pour choisir parmi 18 candidats la personne qui aura la lourde tâche pendant quatre ans de redresser le pays le plus peuplé d’Afrique, plombé par une économie en berne, les violences récurrentes de groupes armés et de bandits, ainsi qu’un appauvrissement généralisé de la population.

Les Nigérians élisaient un successeur au président Muhammadu Buhari, 80 ans, qui se retire après deux mandats (comme le veut la Constitution), mais aussi leurs députés et sénateurs.

Lundi soir, lorsque la Commission électorale a ajourné le décompte pour le reprendre mardi à 10 h 00 GMT (11 h en Suisse), elle avait jusqu’ici annoncé les résultats officiels de la présidentielle dans 14 États sur les 36 du pays, outre la capitale fédérale Abuja. Et Bola Tinubu, de l’APC, le parti du président sortant, menait avec plus de 3,8 millions de voix, contre 3 millions de voix pour Atiku Abubakar, le candidat du PDP, le principal parti d’opposition.

Les deux devançaient l’outsider de cette présidentielle Peter Obi dont la popularité auprès de la jeunesse, qui le voit comme intègre et compétent, a pris tout le monde de court: le candidat, soutenu par le parti travailliste (LP) avait jusqu’ici remporté 1,6 million voix.

Toutefois, ces résultats ne sont absolument pas finaux, puisque la grande majorité des États restaient encore à être annoncés. Et notamment des Etats-clés comme Kano (nord), Kaduna (nord-ouest) et Rivers (sud-est).

Accusations de fraudes

Le vote de samedi s’était globalement déroulé dans le calme, malgré quelques incidents sécuritaires et des couacs logistiques. Mais des retards dans le décompte, et d’importantes défaillances dans le transfert électronique des résultats (expérimenté pour la première fois au niveau national) ont alimenté les inquiétudes et accusations de fraudes.

La Commission électorale «est compromise», et le parti au pouvoir «l’a influencée pour que les résultats soient modifiés», a accusé lundi soir le représentant du PDP, Dino Marleye. Le directeur de campagne du parti travailliste, Akin Osuntokun, a demandé la suspension de l’annonce des résultats, affirmant que les décomptes avaient également été manipulés.

Devancé au niveau national, Peter Obi a toutefois créé la surprise lundi matin en remportant (de très peu) le plus grand nombre de voix dans l’État stratégique de Lagos, la bouillonnante capitale économique de 20 millions d’habitants, et pourtant fief de Bola Tinubu.

Le «parrain de Lagos», comme est surnommé Tinubu du fait de son immense influence politique dans la mégalopole qu’il gouverna de 1999 à 2007, n’a pas encore commenté les résultats nationaux partiels. Mais il a reconnu sa défaite à Lagos, dans un communiqué, appelant aussi au calme après des éruptions de violences.

«Il ne faut pas exagérer l’importance» de la victoire d’Obi à Lagos, selon Amaka Anku, analyste du groupe Eurasia. «Ce qui est important, c’est de voir ce que fait Tinubu dans le nord – jusqu’à présent, il semble qu’il se débrouille bien – et ailleurs dans (ses fiefs du) sud-ouest».

L’annonce des résultats complets devrait prendre du temps: jusqu’ici Bola Tinubu avait remporté 6 États (Ekiti, Ondo, Kwara, Oyo, Ogun, Jigawa), tandis que Atiku Abubakar en avait gagné cinq (Osun, Yobe, Katsina, Adamawa, Gombe) et Peter Obi, trois (Lagos, Enugu et Nasarawa).

Course serrée

Cette course présidentielle est l’une des plus serrée que n’ait jamais connu le Nigeria. Et pour la première fois depuis le retour à la démocratie en 1999, le pays pourrait connaître un deuxième tour. Car pour être élu dès le premier tour, le vainqueur doit obtenir, outre la majorité des suffrages exprimés, au moins 25% des voix dans les deux tiers des 36 États de la fédération auxquels s’ajoute le territoire d’Abuja.

Les voix de nombreux États du nord n’ont pas encore été comptabilisées. Bola Tinubu, 70 ans, et Atiku Abubakar, 76 ans, tous deux musulmans, bénéficient d’une vaste assise dans cette région. Tandis que Peter Obi, un chrétien de 61 ans, pourrait compter sur les votes du sud-est, sa région natale.

Le vote communautaire est important au Nigeria qui compte plus de 250 groupes ethniques, polarisé entre un nord majoritairement musulman et un sud à dominante chrétienne.

Ce scrutin est crucial: le Nigeria – 216 millions d’habitants – devrait devenir en 2050 le troisième pays le plus peuplé au monde, dans une région d’Afrique de l’Ouest menacée par un fort recul démocratique et la propagation de violences djihadistes.

La première économie du continent est devenue une puissance culturelle mondiale, grâce notamment à l’Afrobeats, genre musical qui enflamme la planète avec des stars comme Burna Boy. Mais face aux immenses difficultés du quotidien, aggravées par de récentes pénuries, de nombreux Nigérians appellent au «changement», écœurés par des décennies de mauvaise gouvernance et une élite vieillissante et réputée corrompue.

(AFP)

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