FootballAlain Geiger: «J’ai passé cinq années fantastiques à Servette»
Pour sa dernière conférence de presse en tant qu’entraîneur des Grenat, le Valaisan de 62 ans s’est lâché. Devant son staff et certains joueurs.
- par
- Valentin Schnorhk
Salle de presse comble, ou presque, par rapport à d’habitude. Ce n’est pas une conférence de presse comme les autres. Le rendez-vous a pourtant le même but: on se projette sur le match du lendemain. Jeudi, c’est contre Bâle que Servette jouera, histoire de consolider sa deuxième place et pourquoi pas de valider officiellement sa qualification pour le 2e tour préliminaire de la Ligue des champions. De ce match-là, son dernier à domicile, Alain Geiger n’a que très peu parlé.
C’était en effet son dernier point presse d’avant-match en tant qu’entraîneur de Servette. Ce moment lors duquel, durant cinq ans, le technicien de 62 ans s’était amusé avec les journalistes. Parfois, il répondait totalement à côté des questions qui lui étaient posées, parce qu’il fallait dissimuler une partie de la vérité. Le plus souvent, il en donnait beaucoup, n’hésitait pas à divaguer pour contenter ses quelques interlocuteurs.
Ce mercredi, son staff technique au complet a pu s’en rendre compte, lui qui a choisi d’assister à cette conférence de presse, comme pour lui rendre hommage. Il y avait aussi le capitaine Jérémy Frick, ainsi que Steve Rouiller. «J’ai l’impression de faire partie du conseil d’administration du club, avec une grande cour devant moi», s’est marré Alain Geiger. Alors il s’est laissé porter, parfois dans de longs monologues. Histoire de savourer l’instant. Une dernière fois.
Alain Geiger, cela doit vous faire quelque chose ce dernier match à domicile.
Bien sûr. J’ai passé cinq années fantastiques. J’étais envahi de responsabilités dans cette mission. En tant qu’entraîneur, on n’est pas que des mercenaires, à aller de club en club. On a aussi envie de laisser une trace, d’être humain. Durant ces cinq ans, nous avons beaucoup parlé de football, de développement footballistique. Nous avons progressé systématiquement, aussi grâce à tous les collaborateurs qui sont là. Nous avons formé un groupe qui a toujours mis le mot «développement» au centre. Nous avons sans arrêt cherché à nous améliorer. Ce sera aussi le mot d’ordre après: continuer à grandir, pour se projeter vers le futur, s’aguerrir en pensant à l’Europe.
Comment allez-vous vivre ce match-là?
Je m’en rendrai compte après. Là, je suis un peu trop dans l’action, dans le «finish» du championnat. Mais c’est comme une scène de spectacle: je suis encore dessus, mais quand le match va se terminer, le rideau va se fermer et il faudra se retirer. Mon passage à Genève comme entraîneur de la première équipe sera consommé. Il faudra se reconstruire dans d’autres aventures. Mais c’est comme dans un spectacle, où un chanteur doit faire son dernier refrain. J’espère simplement que je n’aurai pas à chanter à la fin du match (il rigole). Mais cela fait partie de la vie. Je suis tout heureux de pouvoir finir avec du succès et avec autant de bonheur dans un club que j’adore.
Si on se plonge cinq ans en arrière, vous avez dû taper deux fois à la porte de Servette pour qu’elle s’ouvre. Qu’est-ce qui fait que vous aviez une telle foi en vous?
Cela aide quand on est passé dans un club en tant que joueur. Il y a toute l’histoire de Servette qui pèse. Quand on a entendu parler de Jean Snella, de Peter Pazmandy, de tous ces gens qui ont été entraîneurs avant moi… Le fait de connaître l’histoire, cela permet de s’imprégner. Moi, je l’étais complètement. J’avais envie de réussir. Je suis venu en tant que personne qui était concerné par la vie du club. Parce que j’ai pu connaître les présidents de l’époque: Marcel Righi (président de 1957 à 1969), Roger Cohannier (1974-1980). J’ai bu des verres de whisky avec Righi, qui était mon voisin quand j’étais joueur. Ces anciens me parlaient de Snella, de Rachid Mekhloufi.
J’ai la chair de poule en parlant de ça. Cela vous confère la responsabilité de réussir. Parce que si on vient à froid dans un club, sans émotions… J’avais une motivation terrible pour venir. C’est pour ça que j’ai pris ma bagnole et je suis venu à Genève, pour voir Didier Fischer et Constantin Georges à l’époque. J’avais envoyé mon dossier au mois de mars 2018 à l’époque, mais il n’avait pas été reçu. Et puis, on m’avait dit au mois de juin qu’ils n’avaient toujours personne. Au Servette, il faut venir au dernier moment, c’est comme ça (il se marre).
Est-ce qu’à ce stade de la saison, la troisième place pourrait-elle être vue comme un échec?
Non, parce que nous, nous avons toujours commencé la saison en visant le maintien. Cette année aussi. Après, l’appétit vient en mangeant. Et on s’aperçoit qu’on a progressé dans le jeu. Ainsi, on fait des points. C’est notre meilleure saison à domicile, nous avons fait 32 points. Si je compare, Sion n’en a fait que 10. Il ne faut donc pas s’étonner que Sion soit dernier et nous deuxièmes. C’est la qualité de notre football. Parce que nous avons parlé de football, ici.
Nous avons une culture football à Servette. Mais ce n’est encore pas suffisant. Il faut que nous parlions encore plus de football à Servette, aussi avec les dirigeants, avec ceux qui nous entourent. Dans cette salle, il y a du foot. Jamais Servette n’avait été aussi fourni sur ce plan-là. En Suisse alémanique, il y a l’exemple Young Boys. Mais je crois qu’on peut dire qu’en Suisse romande, nous sommes les leaders. Mais nous ne sommes malheureusement pas assez reconnus.