PolémiqueQuand le prix d’une cartouche menace la défense de la Suisse
Les tireurs suisses sont fâchés contre la Confédération, qui veut réduire sa subvention à la munition GP11 largement utilisée dans les stands de tir.
- par
- Eric Felley
«Il y a de la frustration, de l’incompréhension, du mécontentement et de la colère. La Confédération met en danger le désir de défendre la Suisse». Ces propos tenus dans «Blick» sont ceux président de l’Association suisse des tireurs vétérans (ASTV), le Haut-Valaisan Beat Abgottspon, lui-même fine gâchette. Pourquoi un tel courroux dans les milieux du tir? Tout simplement à cause d’une augmentation en 2024 du prix de la munition GP11 utilisée dans les stands de tir avec le fusil d’assaut 57 et quelques autres armes.
Selon ses chiffres, 70% des quelque 17 500 membres de l’ASTV utilisent cette munition. Actuellement une cartouche coûte 30 centimes en étant subventionnée par la Confédération. Pour des raisons d’économies, le Conseil fédéral veut réduire cette aide financière et la cartouche va passer à 60 centimes. Par ailleurs, cette décision fait suite à une recommandation du Contrôle fédéral des finances en 2022. Celui-ci estime que les subventions aux munitions GP11 ne sont pas optimales dans la mesure où elle favorise l’usage du fusil d’assaut 57 au détriment de l’actuel fusil d’assaut 90.
Si la Confédération estime pouvoir économiser 4 millions de francs dans cette opération, pour les tireurs, cela représente un certain coût supplémentaire. Beat Abgottspon, qui se considère en dessous de la moyenne, tire quelque 1500 coups par année. Pour lui, l’augmentation sera donc de 450 francs.
«En cas de guerre, nous avons besoin de tout le monde»
Les tireurs ont décidé de faire bouger leurs lobbyistes à Berne. Le conseiller aux États Werner Salzmann (UDC/BE) a déposé une motion au Parlement pour que le Conseil fédéral revienne en arrière. Pour le Bernois, une telle hausse du prix de la cartouche GP11 va dissuader certains de poursuivre la pratique du tir dans les clubs, ce qui signifierait un affaiblissement de la force de défense de la Suisse: «En période de crise, déclare-t-il au journal alémanique, comme celle que nous vivons actuellement avec la guerre en Ukraine, c’est tout simplement irresponsable. (…) En cas de guerre, nous avons besoin de tout le monde. Le changement est superficiel, d’autant plus que l’exercice ne permet pratiquement pas d’économiser de l’argent».