Crise des opiacésUne juge invalide le plan de faillite du laboratoire Purdue
Une juge américaine a invalidé jeudi le plan de faillite de Purdue, laboratoire accusé d’avoir contribué à la crise des opiacés aux États-Unis, car il prévoyait une certaine immunité pour ses propriétaires, la famille Sackler.
Dans sa décision consultée par l’AFP, Colleen McMahon estime que le juge des faillites qui a entériné l’accord en septembre n’avait pas l’autorité pour empêcher d’éventuelles futures poursuites au civil contre les membres de la famille.
Le plan avait reçu le soutien d’une écrasante majorité des créanciers de la société ainsi que de plus de 40 États américains. Mais plusieurs parties avaient décidé de faire appel, dont un représentant du ministère de la Justice et neuf États. L’accord, arguaient-elles, ne permet pas aux victimes de se faire entendre et dénie à ceux qui le souhaiteraient la possibilité de poursuivre les Sackler devant les tribunaux.
«C’est une immense victoire pour la justice et l’obligation de rendre des comptes, qui rouvrira la faillite profondément entachée de Purdue et forcera la famille Sackler à affronter la douleur et la dévastation qu’elle a causées», a réagi le procureur général de l’État du Connecticut, William Tong, qui avait fait appel.
La promotion agressive du médicament antidouleur OxyContin par Purdue, poussée par la famille Sackler qui le savait pourtant très addictif, est considérée par beaucoup comme le déclencheur de la crise des opiacés, à l’origine de plus de 500’000 morts par overdose en 20 ans aux États-Unis.
Plan de faillite sur la sellette
Purdue, les Sackler et l’OxyContin sont devenus les symboles des excès d’une industrie pharmaceutique prête à tout pour engranger des profits. Le laboratoire Purdue s’était déclaré en cessation de paiements en septembre 2019, proposant un plan de faillite pour solder l’avalanche de litiges à son encontre et acceptant de plaider coupable.
Dans sa décision, la juge McMahon reconnaît que l’invalidation de l’immunité accordée aux Sackler «conduira presque certainement à l’annulation d’un plan soigneusement élaboré» qui contient des éléments positifs, comme le financement de programmes de lutte contre la dépendance aux opiacés. Mais «puisque le code des faillites ne confère pas une telle autorité, la décision confirmant le plan doit être abandonnée», ajoute-t-elle.
Son propre verdict peut à son tour faire l’objet d’un appel. Et elle prévoit déjà que son opinion sur la capacité des juges des faillites à accorder des immunités «ne sera pas le dernier mot sur le sujet».
Le plan prévoyait notamment que l’entreprise en elle-même ferme ses portes d’ici 2024 au profit d’une nouvelle entité gérée par un trust. Outre la vente d’OxyContin à des fins «légitimes», elle devait fournir, gratuitement ou à prix coûtant, des médicaments anti-overdose et des traitements contre la dépendance aux opiacés. Les membres de la famille Sackler s’étaient engagés à verser 4,32 milliards de dollars en plus de 225 millions déjà payés au ministère de la Justice.