FootballQuand il ose, le Servette FC peut être tout à fait déconcertant
Young Boys menait au score et dominait, mais les Grenat se sont réveillés pour une rébellion victorieuse (2-1).
- par
- Daniel Visentini Genève
Trahi par ses propres fragilités, Servette n’était pas cette équipe capable de bousculer Young Boys, comme par le passé. Cela a duré une mi-temps. Et puis il y a dû y avoir une sorte de travail de mémoire, l’assurance transmise par certains aux autres que c’était possible, que, par tradition, depuis son retour dans l’élite, Servette était bien le meilleur contradicteur de l’ogre bernois. À l’arrivée, la certitude transformée en vérité. Au but de Nsame, les réponses de Bedia et de Pflücke après la mi-temps. Des fragilités devenues forces, un miracle servettien.
On pourrait retourner le match dans tous les sens que le sentiment resterait le même, par-delà les circonstances. YB qui touche deux fois le poteau de Frick après son premier but, YB qui doit doubler la mise quand Frick sauve devant Nsame (47e), mais YB qui perd le fil de sa supériorité au moment même où Servette oublie celui de sa soumission. Double élan contraire, avec l’issue que l’on sait.
Kevin Mbabu, qui connaît la maison bernoise mieux qu’aucun Grenat, avait dit tout ce qu’il fallait faire: obliger YB à défendre en reculant. Pour cela, il fallait que Servette trouve la profondeur, la «verticalité». C’est tout ce qui a cruellement manqué durant la première période. Les Bernois étaient trop compacts, trop organisés, leur 4-4-2 fermait tous les espaces et Servette n’existait que par ses individualités.
À témoin l’étourdissant slalom de Cognat, contré au dernier moment. Mais un constat: trop de déchets techniques face à la pression bernoise. «Trop de respect, dira Alain Geiger. Nous n’osions pas les bousculer, on les regardait jouer. J’ai insisté sur cela à la pause. Et sur le fait qu’il était encore possible de renverser la tendance.»
Des idées pour mercredi
L’entraîneur a aidé à la prise de conscience. Il a organisé son équipe comme celle d’YB: en 4-4-2 losange, avec deux attaquants donc. Symétrie des intentions, avec un flux qui s’est inversé imperceptiblement. «Cela n’a pas été simple, il a fallu un peu de temps pour nous organiser correctement dans ce schéma, mais je n’avais pas le choix, expliquait Geiger. C’était ma dernière chance pour changer quelque chose. Et comme YB n’avait pas réussi à inscrire le deuxième but.»
C’est tout le paradoxe qui flottait dans l’air. Young Boys, de loin la meilleure attaque du championnat, qui n’arrive pas à doubler la mise malgré plusieurs occasions, voit Servette, parmi les moins efficaces de la ligue au moment de conclure, marquer deux buts pour s’adjuger la victoire. On ne sait pas encore si cela servira de déclic pour les Grenat. Mais retrouver la liesse d’un succès, devant près de 10’000 spectateurs quatre jours avant une demi-finale de Coupe (contre Lugano), c’est un bonheur qui tombe à pic. Le faire avec le jeune Hussayn Touati (21 ans) comme déclencheur du retour en grâce (la géniale déviation pour Bedia, c’est lui), c’est une promesse de plus. De quoi donner des idées pour mercredi soir: une place en finale est en jeu.
Le dernier trophée soulevé par Servette, c’était justement la Coupe de Suisse. C’était en 2001. Il y a plus de deux décennies de disette à effacer.