SoudanL’ONU espère une trêve pour la fin du ramadan
Explosions et tirs ont secoué Khartoum jeudi, au sixième jour des combats meurtriers entre l’armée soudanaise et les paramilitaires menés par deux généraux rivaux.
L’ONU appelle jeudi à accorder «trois jours» de répit aux Soudanais toujours pris sous les feux croisés de l’armée et des paramilitaires des deux généraux en guerre pour le pouvoir à l’occasion de la fête de fin du ramadan vendredi. Mais les appels au dialogue ou à une trêve même courte n’ont trouvé aucun écho depuis six jours, étouffés sous le fracas des raids aériens, des explosions et des combats de rue.
Jeudi, réagissant pour la première fois depuis le début des hostilités, le général Abdel Fattah al-Burhane, chef de l’armée, a tranché: il n’y aura pas «de discussions politiques» avec son rival Mohamed Hamdane Daglo, dit «Hemedti», à la tête des Forces de soutien rapide (FSR): soit il cesse de «vouloir contrôler le pays», soit il se fera «écraser militairement».
Après une réunion virtuelle avec l’Union africaine, la Ligue arabe et d’autres organisations régionales, le patron de l’ONU António Guterres a appelé à un cessez-le-feu d’«au moins trois jours» pour l’Aïd el-Fitr, la fête qui marque vendredi la fin du jeûne musulman du ramadan.
Il a aussi eu au téléphone le général Burhane, également contacté par les présidents du Soudan du Sud et de Turquie, le premier ministre de l’Éthiopie voisine, ainsi que les chefs de diplomatie américain, saoudien et qatari, a rapporté l’armée soudanaise.
Au moins 330 morts
Depuis le 15 avril, les affrontements, principalement dans la capitale et la région du Darfour (ouest), ont fait «plus de 330 morts et 3200 blessés», selon l’Organisation mondiale de la Santé (OMS). Des explosions ont aussi retenti jeudi à El-Obeid, à 350 kilomètres au sud de la capitale.
Dans «certains quartiers du centre, l’odeur de la mort et des cadavres règne», témoigne un homme en route vers un quartier plus calme. Dans la métropole de plus de 5 millions d’habitants, de nombreuses familles ont épuisé leurs dernières victuailles et n’ont plus d’électricité ni eau courante. Certaines se pressent sur les routes pour fuir raids aériens et combats de rue.
Exil au Tchad
Entre 10’000 à 20’000 personnes, en majorité des femmes et des enfants, sont passées au Tchad voisin, selon le Haut-Commissariat de l’ONU pour les réfugiés (HCR). Des deux côtés pleuvent les annonces de victoire et les accusations mutuelles, impossibles à vérifier sur le terrain tant le danger est permanent. L’armée de l’air, qui vise les bases et les positions des FSR disséminées dans les zones résidentielles, n’hésite pas à larguer des bombes, parfois au-dessus d’hôpitaux, ont témoigné des médecins.
Militaires américains déployés
En cinq jours, «70% des 74 hôpitaux de Khartoum et des zones touchées par les combats ont été mis hors d’usage», selon leur syndicat: bombardés, ils n’ont plus aucun stock pour opérer ou bien des combattants en ont pris le contrôle, chassant médecins et blessés. Dans la capitale, «des enfants sont cachés dans des écoles et des garderies au milieu des combats et des hôpitaux pour enfants ont été forcés d’évacuer face aux frappes aériennes», ajoute l’Unicef.
Les humanitaires ont pour la plupart été forcés de suspendre leur aide, cruciale dans un pays où plus d’un habitant sur trois souffre de la faim en temps normal. Trois employés du Programme alimentaire mondial (PAM) ont notamment été tués au Darfour au début des combats. Au milieu du chaos général, l’Égypte est parvenue, via une médiation des Émirats arabes unis, à évacuer «177 de ses soldats» stationnés sur une base aérienne du Nord, selon les deux pays. Et 27 autres, capturés par les paramilitaires puis remis à la Croix-Rouge, sont à l’ambassade à Khartoum, selon l’armée égyptienne.
Jeudi, les États-Unis ont annoncé dépêcher des militaires dans la région du Soudan pour faciliter une éventuelle évacuation de leur ambassade.