A Kherson, les habitants redoutent des bombardements russes

Publié

Guerre en UkraineA Kherson, les habitants redoutent des bombardements russes

Alors que la ville vient d’être libérée par les forces ukrainiennes, ses habitants craignent que les Russes ne la frappent prochainement.

A Kherson, un homme enlève une bannière de la période d'occupation russe sur laquelle il est écrit: «Les Russes et les Ukrainiens sont un seul peuple, un tout».

A Kherson, un homme enlève une bannière de la période d'occupation russe sur laquelle il est écrit: «Les Russes et les Ukrainiens sont un seul peuple, un tout».

AFP

A Kherson fraîchement libérée dans le Sud de l’Ukraine, les habitants redoutent la colère russe. Le retrait russe de Kherson, dont Moscou espérait faire sa base dans le Sud de l’Ukraine occupé, a rebattu les cartes dans cette guerre qui dure depuis près de neuf mois. L’importance de cette ville pour le Kremlin, en raison de sa situation-clef pour relier la Crimée annexée par la Russie depuis 2014 et le port ukrainien d’Odessa à l’ouest, lui a épargné la destruction. 

Sa reprise par les forces ukrainiennes au troisième mois d’une large contre-offensive entrave les projets de Moscou pour s’assurer la maîtrise de la côte ukrainienne sur la mer Noire. Kherson se trouve aujourd’hui sous les tirs en raison d’une poussée ukrainienne vers l’est dans la région éponyme, voire peut être vers la Crimée. Le danger risque de perdurer. «La Russie a le plus à gagner d’une pause et c’est pourquoi l’Ukraine est incitée à continuer sa poussée», estime Rob Lee du Foreign Policy Research Institute américain.

«Kherson fait maintenant partie du front»

Les échos des échanges d’artillerie résonnent dans la cathédrale vide où un prêtre orthodoxe marie un couple modestement vêtu. Andriï Krivov, 49 ans, soudeur de son métier, épouse enfin Natalia, l’infirmière avec laquelle il vit depuis de longues années et a eu trois enfants. Ils s’inclinent devant le pope, avec en bruit de fond les détonations des frappes ukrainiennes. Les forces russes ripostent depuis la rive gauche (orientale) du Dniepr tout proche où elles se sont repliées dans les jours précédant le 11 novembre.

«Nous pourrions mourir demain», s’effraie Andriï Krivov, à peu près certain que les Russes vont prochainement frapper la ville elle-même. «Kherson fait maintenant partie du front. Et quand ils vont commencer à bombarder, nous voulons paraître devant Dieu en étant mariés».

Prorusses discrets

«Il y a de très fortes chances qu’ils commencent à nous bombarder maintenant», assure Abdriï Krivov, main dans la main avec Natalia. Lydia Belova, elle, se dit prête à endurer de nouvelles souffrances: «La liberté c’est toujours le plus important»,  lance celle qui a passé huit mois et demi à regarder les soldats russes piller les magasins et pourchasser ceux qui refusaient leur autorité.

Le Sud, largement ukrainophone, doit faire face aux forces russes pour la première fois. La directrice de l’hôpital de Kherson, la docteure Irina Starodoumova, a pu observer les divisions au sein de son personnel s’accroître durant l’invasion. La moitié est partie avant l’annexion russe de la région de Kherson. Parmi ceux restés, certains semblaient prêts à accepter l’autorité russe, explique-t-elle.

«Je n’avais jamais soupçonné durant mes 42 années passées ici que je travaillais avec des gens dont les idées différaient de celles que nous partagions tous», observe-t-elle. «Les (prorusses) venaient, faisaient leur boulot et gardaient leurs idées pour chez eux».

«Une armée de voleurs»

La cathédrale Sainte-Catherine abritait les restes du prince Grigori Potemkine, ministre de Catherine II, impératrice russe du XVIIIe siècle. Kherson honore Potemkine comme son fondateur. Le protodiacre Andriï Krivov était fier de conserver ses restes dans la crypte. Ils n’y sont plus. «Les Russes sont venus avec leurs fusils et les ont emportés il y a environ deux semaines», explique le religieux. «Nous avons eu deux guerres mondiales, les nazis et les communistes sans Dieu, et personne ne les avait touchés».

Les Russes sont également partis avec la statue monumentale de Potemkine et d’autres œuvres de Kherson. «Je suppose qu’ils voulaient emporter chez eux leur héritage», ironise le protodiacre. «Cela montre simplement qu’ils ne sont rien qu’une armée de voleurs».

(AFP)

Ton opinion

12 commentaires