Environnement: La menace «sans précédent» des points de basculement climatique

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EnvironnementLa menace «sans précédent» des points de basculement climatique

Vingt-six points de basculement, comme la fonte des nappes glaciaires ou la disparition massive des coraux, pourraient pousser les écosystèmes de la planète au bord du gouffre.

Un récif corallien près d’Aruba, dans les Caraïbes, le 15 novembre 2023.

Un récif corallien près d’Aruba, dans les Caraïbes, le 15 novembre 2023.

AFP

Une menace «sans précédent»: l’humanité est face à plus de deux douzaines de points de basculement sur Terre qui, s’ils sont franchis, pourraient déclencher un effet domino de catastrophes en cascade, souvent irréversibles, ont averti des chercheurs mercredi.

Cette étude, la plus complète jamais réalisée sur ces seuils irréversibles, est publiée alors que les dirigeants du monde entier sont réunis à Dubaï pour de cruciales négociations climatiques lors de la COP28, à l’issue d’une année qui devrait battre tous les records de chaleur.

Les 26 points de basculement identifiés pourraient pousser les écosystèmes de la planète au bord du gouffre. Parmi eux, cinq sont à la limite du point de non-retour, qu’il s’agisse de la fonte des nappes glaciaires, qui menace d’une élévation catastrophique du niveau de la mer, ou de la disparition massive des récifs coralliens tropicaux, indique l’étude. Certains ont peut-être déjà commencé à se transformer de manière irrémédiable.

Une fois qu’un seul de ces points de basculement sera franchi, la gestion des catastrophes qui pourraient en découler pourrait détourner l’attention des autres points critiques, créant ainsi un «cercle vicieux» contribuant à la faim, aux déplacements de population et aux conflits de masse, selon le rapport.

«Point d’équilibre»

Pour Tim Lenton, spécialiste du système terrestre à l’université d’Exeter et auteur principal du rapport, ces points de basculement constituent une «menace d’une ampleur sans précédent pour l’humanité», a-t-il déclaré à l’AFP.

Mais il n’y a pas que des mauvaises nouvelles. Le rapport met également en évidence une série de points de basculement positifs, tels que les véhicules électriques, les énergies renouvelables et l’adoption d’un régime alimentaire à base de plantes, qui pourraient rapidement prendre de l’ampleur et faire basculer les choses dans l’autre sens.

«Imaginez que vous vous appuyiez sur une chaise jusqu’au point d’équilibre où un petit coup de pouce peut faire une grande différence», explique Tim Lenton. «Vous pourriez vous retrouver sur le dos, par terre, ou, si vous avez de la chance, à la verticale».

Déjà trop tard?

Malgré tout, la plupart des seuils critiques présentent des conséquences funestes. Ainsi, la fonte des calottes glaciaires de l’Antarctique occidental et du Groenland qui, si elle franchit un certain seuil, pourrait faire augmenter le niveau des mers de deux mètres d’ici 2100, exposant près d’un demi-milliard de personnes à de fréquentes inondations côtières, est-il souligné.

Pour le Groenland, il est peut-être déjà trop tard. «Le point de basculement est-il dépassé ou bien est-il encore possible d’inverser la tendance? Personne n’en est tout à fait sûr», déclare Tim Lenton.

Les trois autres points de basculement les plus critiques sont la disparition des récifs coralliens tropicaux, la fonte du pergélisol et un courant océanique appelé gyre subpolaire de l’Atlantique Nord. Ce dernier fait partie de la «circulation méridienne de retournement atlantique» (AMOC), système complexe de courants océaniques qui permettent de réguler la chaleur entre les tropiques et l’hémisphère Nord. Le nouveau rapport indique qu’il est plausible – bien que peu probable – que l’AMOC s’effondre au cours de ce siècle.

«Potentiellement horrible»

Le risque d’effondrement de l’AMOC est comparable à la détection d’un élément susceptible de faire «tomber l’avion du ciel», estime Tim Lenton. Il pourrait entraîner une diminution considérable des précipitations dans de vastes régions, ce qui pourrait réduire de moitié la superficie mondiale où l’on peut cultiver du blé et du maïs.

Pour Manjana Milkoreit, de l’université d’Oslo, coauteur de l’étude, «notre système de gouvernance mondiale est inadapté pour faire face aux menaces à venir et mettre en œuvre les solutions requises d’urgence».

Les auteurs réclament que les points de basculement soient inclus dans le bilan mondial débattu lors des négociations de la COP28, ainsi que dans les objectifs nationaux de lutte contre le changement climatique.

Les données scientifiques sont désormais «claires comme de l’eau de roche», estime Sarah Das, scientifique à la Woods Hole Oceanographic Institution (États-Unis) qui n’a pas participé à l’élaboration du rapport. «Les risques pour l’humanité de franchir les points de basculement (…) sont terribles, et l’impact sur les vies humaines potentiellement horrible».

(AFP)

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