Mexique95’000 disparus: l’ONU critique «l’inefficacité» des autorités
Un comité des Nations unies a finalisé un voyage de 10 jours au Mexique par un constat sans appel: l’impunité domine dans les affaires de disparitions forcées.
Un comité des Nations unies contre les disparitions forcées a dénoncé «l’inefficacité» des autorités pour enquêter sur les quelque 95’000 personnes portées disparues au Mexique, ainsi que «l’impunité» dont jouissent les auteurs de ces enlèvements et assassinats souvent liés au trafic de drogue. «Nous regrettons de constater qu’il y a toujours des disparitions généralisées sur une grande partie du territoire de l’Etat pour lesquelles, comme nous le signalions dès 2015, prédomine l’impunité», a déclaré à la presse la représente du comité onusien Carmen Rosa Villa, vendredi à l’issue d’une visite au Mexique d’une dizaine de jours.
Plus d’une centaine de personnes aurait disparu «pendant notre séjour», a ajouté la représentante du comité arrivé mi-novembre à Mexico. Au total 95’121 personnes figurent au Registre national des personnes disparues et non-localisées. Le comité onusien a critiqué «l’inefficacité» des enquêtes ainsi que «l’arbitraire» des décisions du parquet dans les affaires de disparition, dans un pays où les forces de sécurité et la justice sont suspectées d’être infiltrées par les réseaux criminels du trafic de drogue dans plusieurs des 32 états.
Politique nationale nécessaire
Le Mexique doit adopter «une politique nationale de prévention pour éradiquer les disparitions, une politique qui implique toutes les autorités et qui rende effectif le droit des victimes à la vérité, la justice et aux réparations», a déclaré le comité onusien, qui visitait le Mexique pour la première fois. Le comité a estimé que cette première visite marquait une «ouverture» au soutien international de la part du président Andres Manuel Lopez Obrador, au pouvoir depuis fin 2018.
Le nombre des disparitions a explosé autant que les assassinats à partir de 2006, quand l’ex-président Felipe Calderon déclara la guerre totale au narco-trafic. «Le crime organisé reste une des causes principales des disparitions», note Laura Atuesta du Centre d’enquête et d’expertise économique (Cide), dans un grand reportage sur les disparus au Mexique que l’AFP publiera lundi.
Des charniers existent dans le nord du pays, d’après la Commission nationale des recherches (CNB) qui estime par exemple que 500 kilos de restes humains ont été retrouvés depuis 2017 près de Matamoros à la frontière avec le Texas. A Guadalajara deuxième ville du pays, un carrefour a été rebaptisé rond-point des disparus, avec des photos de jeunes gens qui manquent à l’appel. Guadalajara est le chef-lieu du Jalisco, l’état le plus frappé par les disparitions forcées (plus de 12’000). Il s’agit d’un Etat où sont présents les cartels les plus puissants du pays (Jalisco Nouvelle génération et Sinaloa).