Suisse: Les bénéfices réalisés grâce à la guerre en Ukraine divisent

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SuisseLes bénéfices réalisés grâce à la guerre en Ukraine divisent

Une commission du National rejette une initiative parlementaire demandant un impôt spécial pour les entreprises qui ont pu engranger des chiffres records grâce au conflit. Une alliance de la société civile demande, dans une lettre ouverte au Parlement, de corriger le tir.

Christine Talos
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Christine Talos
Le groupe genevois Vitol, plus grand négociant de pétrole au monde, a enregistré en 2022 un bénéfice de 15 milliards de dollars, soit autant que les bénéfices cumulés des six années précédentes, dénonce une alliance.

Le groupe genevois Vitol, plus grand négociant de pétrole au monde, a enregistré en 2022 un bénéfice de 15 milliards de dollars, soit autant que les bénéfices cumulés des six années précédentes, dénonce une alliance.

AFP

La Commission de l’économie et des redevances du Conseil national (CER-N) ne veut pas imposer temporairement les bénéfices exceptionnels réalisés par des entreprises suisses grâce à la guerre en Ukraine. Elle a dit non par 15 voix contre 10 à une initiative parlementaire en ce sens du conseiller national Balthasar Glättli (Verts/NE) qui visait notamment les firmes actives dans le négoce des matières premières.

La majorité de la commission a estimé qu’un tel impôt «perturberait considérablement les mécanismes du marché et aurait des effets collatéraux indésirables». Par ailleurs, elle relève que l’imposition de bénéfices exceptionnels est «difficilement applicable sur le plan technique». Une minorité a elle soutenu l’initiative, afin d’obliger les entreprises à faire preuve de davantage de solidarité.

L’alliance pour un impôt sur les bénéfices de guerre, qui regroupe des organisations de la société civile, des associations et des ONG, n’a pas manqué de réagir face à ce refus. «La commission manque l’occasion d’assumer pleinement la responsabilité de la place suisse de négoce de matières premières et son rôle dans la guerre en Ukraine», a-t-elle dénoncé.

Des bénéfices «tout simplement illégitimes»

Elle a rappelé qu’avant le début de la guerre, plus d’un tiers des revenus de l’État russe provenait du commerce du pétrole et du gaz. Et «en raison de la spéculation boursière, des pénuries, des difficultés logistiques et des sanctions, les prix des matières premières se sont envolés à tel point que des groupes locaux comme Glencore ou Cargill ont réalisé des bénéfices de crise leur rapportant plusieurs milliards», a-t-elle souligné.

«De telles augmentations de bénéfices en temps de crise sont tout simplement illégitimes. La conséquence politique de cette situation – que l’UE ainsi que divers pays ont déjà introduite – doit être, en Suisse également, l’instauration d’un impôt sur les bénéfices de guerre exceptionnels des négociants de matières premières», souligne Silvie Lang, experte en négoce de matières premières chez Public Eye.

L’alliance a du coup demandé dans une lettre ouverte au Parlement de corriger le tir au National.

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