Double recoursContrainte sexuelle: le tennisman Yves Allegro évitera-t-il une peine ferme?
En décembre 2019, l’ex-partenaire en double de Roger Federer écopait de 2 ans de prison avec sursis. Le Valaisan a fait appel, la procureure aussi.
- par
- Evelyne Emeri
Jeu, set et match. En tennis comme en justice, la partie se joue sur un court ou devant une Cour. En l’espèce, elle se rejouera devant les juges du Tribunal cantonal valaisan le 5 avril prochain à Sion. Spécialiste du double où il a brillé à plusieurs reprises au côté de Roger Federer, Yves Allegro, 43 ans, conteste toujours avoir frappé et agressé sexuellement une homologue autrichienne lors d’une conférence de coachs européens à Tallinn (Estonie). Les faits remontent à une nuit d’octobre 2014 et s’étaient déroulés dans la chambre d’hôtel de l’ex-joueur de l’équipe de Suisse de Coupe Davis après une soirée fortement alcoolisée.
Black-out et flashback
En décembre 2019, celui qui n’est plus l’entraîneur principal de Swiss Tennis depuis juin 2020 comparaissait devant le Tribunal du district de Sierre pour y répondre de viol et/ou de contrainte sexuelle, subsidiairement d’actes d’ordre sexuel commis sur une personne incapable de discernement ou de résistance. La parole de l’un contre la parole de l’autre. Chacun des protagonistes - la plaignante avait été dispensée de comparution - avait mis en avant un black-out en lien avec une absorption excessive d’alcool.
Suite à la découverte d’hématomes sur son corps et ressentant de fortes douleurs, la coach autrichienne soutenait avoir recouvré partiellement la mémoire deux jours plus tard. Elle restait toutefois dans l’incapacité d’affirmer si l’accusé l’avait forcé à un rapport sexuel (ndlr. du liquide séminal a été retrouvé sur son slip). Le prévenu, lui, prétendait ne se souvenir de rien jusqu’à son réveil le lendemain matin et réfutait être capable de la moindre violence.
Peine ferme requise
L’accusation soutenue par la procureure Corinne Caldelari va au-delà du double ace. La magistrate avait du reste requis 4 ans de prison ferme pour viol et contrainte sexuelle à l’encontre d’Yves Allegro. Elle s’appuyait en particulier sur des rapports médico-légaux confirmant clairement les allégations de la plaignante, à savoir que ses blessures étaient la conséquence de chocs avec des objets contondants et, partant, d’actes de brutalité.
La défense avait sans surprise plaidé l’acquittement pour l’ex-tennisman professionnel jusqu’en 2011. Tout en estimant la victime crédible, le Tribunal de première instance n’avait pas suivi le Parquet, ni sur la qualification de viol, ni sur la quotité de la peine, ni sur la sanction ferme. Il avait retenu les éléments tangibles et non l’une ou l’autre version pour rendre sa décision. Le Valaisan avait écopé de 2 ans avec sursis durant deux ans pour contrainte sexuelle.
Son adversaire: la procureure
Bien qu’assorti du sursis, ce verdict avait fait réagir immédiatement les avocats du joueur au sortir du procès de décembre 2019, qui avaient annoncé dans la foulée que leur client allait faire recours. Interpellé mercredi sur le procès en appel agendé au mardi 5 avril à Sion, la défense par la voie de l’un de ses avocats, Me Guillaume Grand, a été brève et catégorique: «Nous avons toute confiance en la justice et nous ne commenterons pas avant l’audience».
Quant à Yves Allegro, il ne s’exprimera pas non plus, nous indique encore Me Grand, avant ce nouveau duel qui s’annonce toujours aussi redoutable. La procureure Corinne Caldelari a également interjeté appel, nous a-t-elle confirmés dans un email: une adversaire qui compte bien changer le jeu, le set et le résultat du match. Le huis clos partiel a été ordonné pour cette audience d’appel tout comme en première instance. Pas de public, seuls les journalistes seront autorisés à suivre les débats.