FamilleUne commission propose 38 semaines de congé parental
La Commission fédérale pour les questions familiales veut le partage de la prise en charge entre les deux parents. Elle veut que les pères aient au moins quinze semaines de congé.
- par
- Christine Talos
La Commission fédérale pour les questions familiales (COFF) a choisi la Saint-Valentin pour lancer un nouveau modèle de congé parental. Elle veut un congé national et propose désormais que les parents aient droit à 38 semaines de congé au total, en se répartissant mieux la prise en charge des nouveaux-nés.
Dans ce nouveau modèle, les parents pourraient prendre chacun la moitié du congé, soit 19 semaines, ou opter pour une répartition flexible. Ainsi, les mères devraient bénéficier au moins de 16 semaines de congé et au maximum de 23. Les pères, eux, devraient prendre au moins 15 semaines et jusqu’à 22 au maximum. Les congés déjà existants, à savoir 14 semaines pour la mère et 2 semaines pour le père, seraient conservés.
Un tel congé permettrait aux pères de s'engager dès le début dans l'accompagnement du bébé. La mère aurait quant à elle de meilleures conditions pour récupérer et pourrait en outre augmenter son taux d'emploi si elle le souhaite, explique la commission.
Les pères ne prennent que peu leur congé
La COFF a en outre décidé de limiter à dessein la libre répartition des semaines entre les parents. Car des études menées dans les pays où le congé parental et entièrement flexible existe le montrent: les pères ne prennent pas assez leur congé et le transfèrent trop souvent aux mères, explique-t-elle. Avec des conséquences fâcheuses pour ces dernières en termes de carrière ou de prévoyance vieillesse, relève-t-elle.
La commission veut en outre améliorer les congés actuels de maternité et de paternité. Notamment en ce qui concerne la protection contre le licenciement pour les pères, la flexibilisation de la prise du congé, ou encore la prolongation du congé simultané en cas de besoin accru de soutien.
Le modèle que propose la COFF en détail:
Dans son modèle 2022, la COFF propose 15 semaines pour chacun des parents, en plus des 8 semaines d’interdiction de travail de la mère après la naissance. La mère peut prendre jusqu’à 2 semaines avant la naissance et transférer jusqu’à 7 semaines au père. Les mères bénéficient ainsi de 16 à 23 semaines et le second parent de 15 à 22 semaines.
Un congé simultané des deux parents n’est possible que durant 2 semaines pendant les 6 mois après la naissance, sauf exceptions.
Les 15 semaines peuvent être prises par les deux parents en un bloc, à temps partiel ou de manière fragmentée dans le temps.
En cas de reprise d’une activité professionnelle à temps partiel ou de manière fragmentée, le droit aux allocations restantes demeure. Les deux parents bénéficient en outre d’une protection contre le licenciement pour la durée et selon la répartition du congé convenues avec leur employeur.
Un coût de 2,68 milliards
Un coût supplémentaire de 1138 millions de francs serait occasionné par rapport à l’actuel congé paternité à 175 millions de francs, explique la COFF. Le coût annuel maximum de son modèle de 38 semaines est estimé à 2682 millions de francs pour une situation où les mères prennent 95% des semaines disponibles pour elles et que les pères prennent toutes les semaines qui leur sont réservées. Actuellement, le congé maternité et paternité coûte 1008 millions de francs.
Une proposition «déconnectée de la réalité»
Ce modèle fait d’ores et déjà bondir le conseiller national valaisan et co-président du PLR Suisse Philippe Nantermod: «Cette proposition est déconnectée de la réalité. On a adopté presque dix extensions des assurances sociales ces 5 dernières années. Il serait peut-être temps maintenant de penser à produire plutôt qu’à distribuer», critique-t-il. «La COFF passe de 1 à 2,6 milliards de francs de dépenses, sans indiquer comment elle pense financer ce congé. C’est effarant», reproche-t-il. «Si on continue d'augmenter systématiquement les charges sociales en cette période d'inflation, à un moment ou un autre, le système va casser», prévient-il.
En outre, le Valaisan, père lui-même d’un jeune enfant, critique le principe même de l’extension du congé. «Je ne vois pas en quoi rester à la maison 4 mois de plus permet d’être mieux intégré sur le marché du travail. Au contraire, plus longtemps on reste déconnecté, plus c’est difficile d’y revenir», indique-t-il. Et de prôner davantage de crèches et de nurseries. «Laisser les parents loin du monde du travail ne les aide pas».
Des initiatives dans les cantons
Depuis 2011, le congé parental a fait l’objet de plusieurs interventions parlementaires, qui ont toutes été rejetées. Comme elles n’aboutissent pas au niveau fédéral, plusieurs initiatives ont été lancées dans des cantons. Ainsi un congé parental de 24 semaines, en plus du congé maternité et paternité, doit bientôt être voté dans le canton de Berne. Une initiative similaire a aussi été déposée en 2020 à Zurich. Des initiatives sont également en cours à Genève et Vaud. Le Tessin, lui, a déjà introduit un congé parental de deux semaines en 2021.