Thaïlande: Sur la sellette, le Premier ministre peut finalement rester à son poste

Arrivé au pouvoir lors d’un coup d’État militaire en 2014, Prayut Chan-O-Cha a été suspendu le mois dernier. Le temps que le tribunal examine une plainte de l’opposition soutenant qu’il avait atteint la limite de son mandat de Premier ministre. La Cour constitutionnelle du pays a finalement tranché en sa faveur. Les autorités de Bangkok sont en alerte pour de possibles troubles après cette décision. Plusieurs groupes de manifestants ont en effet prévenu qu’ils descendraient dans les rues si la Cour donnait raison à Prayut.

«Le début des fonctions de chef de gouvernement du défendeur est compté à partir du 6 avril 2017», soit la date d’entrée en vigueur de la Constitution, a déclaré la Cour. L’article 158 limite à huit années la durée du mandat du Premier ministre. Mais le texte ne précisait pas le point de départ du calcul, laissant un vide juridique que la Cour vient de trancher. Cette décision permet à Prayut de rester jusqu’en 2025, si tant est qu’il conserve son poste lors du scrutin prévu au début de l’année prochaine.

Le Premier ministre, âgé de 68 ans, a salué la décision sur sa page Facebook, en disant qu’il utiliserait le temps restant pour faire avancer les projets d’infrastructures. «Je vais faire de mon mieux et travailler de toutes mes forces pour changer le pays», a-t-il écrit.

Ses opposants, qui ont lancé en août la démarche pour saisir la Cour, plaidaient pour la rétroactivité de la Constitution en estimant donc que l’ancien général avait atteint la limite en août. Après sa suspension, son adjoint Prawit Wongsuwan a pris le relais en tant que Premier ministre intérimaire, tandis que Prayut est resté ministre de la Défense. Mais cet épisode lui a fait «perdre la face» aux yeux de l’opinion, a estimé Napisa Waitoolkiat, politologue de l’université Naresuan.

Prayut et son parti, le Palang Pracharat, sont en perte de vitesse dans l’électorat, alors que les ménages souffrent de la faiblesse de l’économie thaïlandaise. L’homme a également été pris pour cible lors des grands rassemblements pro-démocratie dirigés par la jeunesse qui ont éclaté à Bangkok, en 2020, pour demander sa démission et une réforme de la société.

«Je pense qu’il y aura des protestations dans la rue et des manifestations à Bangkok contre la décision», si celle-ci est favorable à Prayut, a estimé la politologue jeudi. Trois groupes de jeunes protestataires ont déjà annoncé des rassemblements. Le porte-parole adjoint de la police nationale, Kissana Phathanacharoen, a déclaré que des agents seraient déployés pour assurer la sécurité près du tribunal et dans le centre de Bangkok.