SantéAcné: un traitement disponible aux USA, mais pas en Europe
La clascotérone, un traitement contre l'acné développé par le laboratoire suisse Cosmo, peut être prescrit aux États-Unis depuis fin 2021. Mais il se fait attendre en Europe.
Après plusieurs décennies, c’est la première véritable avancée contre l’acné. La clascotérone, un traitement prometteur, est prescrite depuis plusieurs mois aux États-Unis mais, en Europe, on ignore quand ce médicament sera disponible. «Ce qui est vraiment prometteur avec la clascotérone, c’est qu’elle agit par un mécanisme complètement nouveau sur les causes hormonales de l’acné», résume à l’AFP le dermatologue américain John Barbieri.
Depuis la fin 2021, les médecins américains peuvent prescrire cette crème contre l’acné, une maladie de peau à laquelle il est bien rare d’échapper au cours de sa vie. L’acné, sa peau grasse et ses boutons touchent environ trois adolescents sur quatre. De nombreux adultes en sont également frappés.
Rares innovations
Face à une maladie si répandue, les innovations thérapeutiques sont rares, bien que la recherche ait récemment progressé sur d’autres plans comme les effets de l’alimentation. Avant l’apparition de la clascotérone, les traitements anti-acné n’avaient enregistré aucune nouveauté depuis presque 40 ans. La clascotérone rend les cellules de la peau moins réceptives aux hormones à l’origine du sébum, la substance grasse que les acnéiques produisent en trop grande quantité.
Un nouveau mécanisme d’action est loin d’assurer l’intérêt d’un médicament, il doit aussi prouver qu’il marche. C’est le cas de la clacostérone qu’une étude, publiée en 2020 dans le «Jama Dermatology», a jugée plus efficace qu’un placebo donné à l’aveugle, et sans effet secondaire important. Cette étude était assez probante pour que les autorités américaines approuvent le traitement.
Espoir pour les patients
Mais il ne faut pas non plus s’attendre à un médicament miracle ou à une révolution contre l’acné. L’étude «ne compare pas avec les traitements existants, donc on ne sait pas très bien comment placer tout ça», tempère auprès de l’AFP la dermatologue française Émilie Sbidian. Pour autant, elle juge «très intéressant» ce nouveau médicament car il pourrait offrir un nouvel espoir aux patients rétifs à d’autres traitements, ou bien être donné en plus de ces derniers pour accroître leur efficacité.
Pourtant, ce n’est pas à l’ordre du jour en Europe, où rien n’indique quand le traitement sera disponible. Frilosité des autorités sanitaires? Même pas: l’autorité européenne du médicament (EMA) a indiqué à l’AFP qu’elle n’avait pas commencé à évaluer le médicament. La réponse est à chercher dans les choix de l’entreprise qui produit le médicament, le suisse Cosmo Pharma.
Partenaires à trouver
«Comme nous sommes un très petit groupe, nous nous sommes d’abord concentrés sur une autorisation sur le premier marché mondial, les États-Unis» où le traitement est désormais distribué par une autre entreprise, Sun Pharma, a expliqué à l’AFP Diana Harbort, responsable de l’unité dermatologique de Cosmo.
Selon elle, le marché de la dermatologie n’intéresse pas les géants de la pharmacie, et Cosmo doit trouver un partenaire différent par région du monde. Il vient d’y arriver en Chine, ce qu’il a annoncé fin juillet lors de ses résultats trimestriels. Mais, en Europe, rien de neuf.
Erreur stratégique?
Pourquoi faut-il tant de temps pour trouver un partenaire? Le groupe évoque un marché longtemps ralenti par la crise du Covid, mais cette explication ne convainc pas tous les observateurs. «Le marché dermato est plutôt porteur», constate auprès de l’AFP l’analyste financière Jamila El Bougrini. «Je pense qu’il y a eu des erreurs de stratégie du groupe.»
L’analyste, qui comprend mal pourquoi aucune évaluation n’a été lancée auprès des autorités européennes, évoque notamment un choix malheureux de Cosmo ces dernières années: le groupe a voulu revendre sa division dermatologique, dont la clascotérone était le seul produit, avant d’y renoncer faute de repreneur.
«Est-ce qu’ils n’étaient pas trop gourmands?», s’interroge Jamila El Bougrini, qui juge difficile d’intéresser les investisseurs si un traitement n’apparaît pas plus efficace que les médicaments existants.
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