COP26Les pays pauvres paient deux fois: en nature et en cash
Les pays riches et pauvres ne parviennent pas à se mettre d’accord sur le financement censé leur permettre d’anticiper et de s’adapter à l’érosion.
La promesse non tenue de milliards d’aide climat des pays riches empoisonne la COP26, mais les pays pauvres veulent faire avancer à Glasgow un autre dossier lié: celui des dommages qu’ils subissent déjà.
En 2009, les pays riches avaient promis aux plus pauvres et exposés de porter leur aide pour la lutte contre le changement climatique à 100 milliards de dollars par an en 2020. Constatant leur échec, ils ont présenté juste avant la COP un «plan de livraison» prévoyant de remplir cet engagement... en 2023.
La pilule passe mal chez les plus menacés. D’autant qu’ils sont pour la plupart des contributeurs insignifiants au réchauffement. Et que la majeure partie des fonds qui leur sont alloués va à des mesures de réduction des émissions. Résultat, ils ont l’impression de payer deux fois, au portefeuille et en nature.
«Vous êtes les premiers à souffrir et les derniers à recevoir de l’aide», a reconnu le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, lors d’une réunion à la COP des pays du Climate Vulnerable Forum (CVF).
Paranoïa
La lutte contre le réchauffement et ses effets repose sur «l’atténuation», lutte contre les émissions par exemple, et «l’adaptation», préparation à faire face aux conséquences prévisibles. Les pays vulnérables veulent y ajouter les «pertes et préjudices» qu’ils subissent déjà.
Ce thème est bien mentionné dans l’accord de Paris et un «mécanisme international» existe même sur la question, mais les pays riches rechignent à ce qu’il soit sur la table en tant que tel.
«C’est principalement la crainte voire la paranoïa sur les questions de responsabilité et de compensations» possibles explique à l’AFP Yamine Dagnet, du groupe de réflexion World Resources Institute. «Mais il ne s’agit pas de ça, il s’agit de ce qui va se passer quand ces petites îles vont disparaître».
Le thème a bien été mentionné dans une déclaration pré-COP de la «coalition de la haute ambition», qui réunit «petits» et «grands» pays.
300 milliards par an
Mais les riches veulent en faire une partie du volet «adaptation» du financement. Volet qui n’atteint pour l’instant que le quart des sommes débloquées, conte 75% pour l’atténuation, alors que l’ONU comme les pays pauvres réclament au moins la parité.
D’autant que le besoins estimés d’aide aux plus vulnérables sont de «300 milliards par an à horizon 2030» selon M. Guterres.
Et que c’est précisément «l’échec à financer l’adaptation qui s’est transformé en pertes et préjudices», souligne Abul Kalam Azad, émissaire de la présidence bangladaise du CVF.
Etats insulaires
L’Alliance des petits Etats insulaires (AOSIS) insiste elle aussi en tirant le bilan de la première semaine de la COP pour que les «pertes et préjudices» figurent dans le «bilan mondial (des financements), dès à présent et avec des objectifs quantifiés».
Comme en témoigne le révérend James Bhagwan, de la Conférence des églises du Pacifique, pour qui tout ce débat souligne «les inégalités grossières en matière de changement climatique».
«Dans le Pacifique, pertes et dommages signifie vie ou mort», souligne-t-il. La prise en compte de ce volet du financement «doit se faire dans les prochains jours. S’ils (les pays riches) n’acceptent pas, la judiciarisation sera la seule option».
L’Australie s’engage à… continuer à vendre du charbon!
L’Australie a affirmé ce lundi, qu’elle continuera à vendre du charbon pendant «des décennies», après avoir rejeté un accord visant à abandonner progressivement ce combustible fossile polluant, afin de limiter le changement climatique.
Une quarantaine de pays se sont engagés à sortir du charbon dans les décennies à venir, lors de la conférence climat cruciale COP26 de Glasgow.
L’Australie, comme plusieurs pays grands consommateurs de charbon tels que la Chine et les Etats-Unis, n’a pas signé cet engagement.