Football en Italie: Dans le collimateur de la justice, la Juventus est dans le rouge vif

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Football en ItalieDans le collimateur de la justice, la Juventus est dans le rouge vif

Le club turinois doit approuver mardi un bilan 2021/22 en déficit de quelque 240 millions d’euros. Et marquer la fin de l’ère de son président démissionnaire Andrea Agnelli.

Andrea Agnelli a rendu son tablier fin novembre, sous la pression d’une enquête pour des irrégularités comptables.

Andrea Agnelli a rendu son tablier fin novembre, sous la pression d’une enquête pour des irrégularités comptables.

imago images/Nicolo Campo

La Juventus Turin, sportivement à la peine et dans le collimateur de la justice, solde l’ère Andrea Agnelli, son président démissionnaire, en approuvant mardi des résultats financiers dans le rouge vif, quelques semaines avant de désigner sa nouvelle équipe dirigeante.

La «Vieille Dame» va valider des comptes en déficit pour la cinquième année consécutive, et pour la deuxième de suite au-delà des 200 millions de pertes: 239,3 millions d’euros pour l’exercice 2021/2022 après 226,8 millions la saison précédente.

Cette assemblée générale des actionnaires à l’ambiance morose, déjà repoussée à deux reprises, se tient alors que la Juve est officiellement sans direction: Andrea Agnelli a démissionné le 28 novembre, avec l’ensemble du conseil d’administration, sous la pression d’une enquête pour des irrégularités comptables présumées. Voici les principaux aspects du dossier.

Andrea Agnelli a du souci à se faire.

Andrea Agnelli a du souci à se faire.

AFP

De quoi la Juve est-elle accusée?

Le parquet de Turin a demandé le 1er décembre le renvoi en justice d’Andrea Agnelli et de 11 autres dirigeants soupçonnés d’irrégularités dans la gestion financière du club. Le patron de la «Vieille Dame» depuis 2010 avait devancé cette nouvelle étape judiciaire en démissionnant trois jours plus tôt avec l’ensemble du conseil d’administration, dont le vice-président Pavel Nedved. Une audience préliminaire est attendue début 2023 dans le cadre de ce dossier ouvert l’an dernier.

Le club le plus titré du football italien (36 scudetti), coté en bourse, est entre autres accusé d’avoir manipulé le marché en transmettant des informations financières biaisées à ses investisseurs sur la période 2018-2021. Notamment en enregistrant des «plus-values fictives» lors de la vente de joueurs et en procédant à des «manoeuvres» pour différer le paiement de salaires pendant la pandémie de Covid 19.

Le parquet de Turin a pointé les «différences importantes entre les bilans tels qu’approuvés et ceux qui auraient dû l’être».  La Juventus a toujours affirmé avoir «agi dans le respect des lois et des normes qui encadrent les communications financières».

Que sont les plus-values «fictives»?

Au coeur de l’enquête figure la pratique des «faux échanges», soit des ventes croisées de joueurs entre deux clubs, avec peu ou pas d’argent effectivement versé.

La Juventus a multiplié ces opérations, par exemple avec le FC Barcelone en 2020 pour les transferts croisés du Brésilien Arthur Melo (72 millions) et du Bosnien Miralem Pjanic (60 millions). Peu d’argent avait circulé mais l’effet avait été immédiat sur les comptes des deux clubs grâce à la notion de plus-value.

Lors d’un transfert, le coût d’achat d’un joueur est étalé sous forme d’amortissement sur la durée de son contrat. Mais une éventuelle plus-value sur la vente peut elle immédiatement être enregistrée. Avec Pjanic, la Juventus avait ainsi affiché une belle plus-value de 43 millions.

Miralem Pjanic, qui a rapporté plus de 40 millions à la Juve, n’a jamais convaincu avec le maillot du Barça.

Miralem Pjanic, qui a rapporté plus de 40 millions à la Juve, n’a jamais convaincu avec le maillot du Barça.

imago images/Marco Canoniero

L’accusation estime toutefois que la Juve a fixé des valeurs exagérément élevées à certains joueurs lors des ventes pour pouvoir accroître la plus-value et réduire artificiellement ses pertes. Le parquet a chiffré à quelque 155 millions ces plus-values dites «fictives» entre 2018 et 2021, selon les documents consultés par l’AFP.

Reste la difficulté voire l’impossibilité de fixer un barème objectif à la valeur d’un joueur: la justice sportive italienne avait acquitté en avril les 11 clubs poursuivis, dont la Juventus, mais a rouvert le dossier en décembre.

Quel est le problème avec les salaires?

L’autre astuce comptable présumée reprochée à la Juventus tient à des accords conclus avec ses joueurs pour différer le paiement de certains salaires lors de la pandémie, en 2020 puis 2021.

La Juve avait évoqué un «impact positif de 90 millions» sur ses comptes après avoir annoncé un accord pour ne pas régler quatre mois de salaires au printemps 2020. Mais l’accusation estime qu’elle aurait dû faire apparaître en passif le fait qu’elle s’était engagée en parallèle, via des accords privés avec ses joueurs, à régler trois des quatre mensualités plus tard.

Le club aurait par ailleurs conclu d’autres accords privés et secrets avec ses joueurs, dont l’un avec Cristiano Ronaldo à qui la Juve devrait encore quelque 20 millions, selon des médias.

CR7 a marqué plus de 100 buts pour la «Vieille Dame».

CR7 a marqué plus de 100 buts pour la «Vieille Dame».

imago images/PA Images

Que risque la Juventus?

Au-delà des possibles sanctions judiciaires, la Fédération italienne de football a ouvert une nouvelle enquête concernant les «manoeuvres» salariales, selon l’agence italienne Ansa. Ce qui pourrait valoir une nouvelle procédure au club avec à la clé de possibles sanctions (amende ou retrait de points).

L’UEFA a également annoncé le 1er décembre l’ouverture d’une enquête sur les «violations financières présumées» de la Juve. La «Vieille Dame», après des entorses aux règles comptables du fair-play financier, a conclu en août avec l’instance européenne un plan de redressement sur trois ans pour rentrer dans les clous. Elle est sous la menace d’une lourde amende voire d’une exclusion des compétitions européennes si elle ne le respecte pas.

D’autant que la Juve est en conflit ouvert avec l’UEFA depuis des mois au sujet de la Super Ligue, projet de compétition privée que les Turinois sont les derniers à défendre avec le Real Madrid et le FC Barcelone.

(AFP)

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