FootballDylan Dugourd: «J’ai besoin de me sentir aimé pour être bon»
Vendredi soir, le Genevois du Stade Nyonnais a inscrit le but de la victoire contre Thoune (3-2) quelques secondes après avoir fait son apparition. Banni deux semaines plus tôt, l’attaquant a su relever la tête.
- par
- Nicolas Jacquier
On appelle cela un coaching gagnant. Cela ne marche pas toujours mais quand ça fonctionne… La preuve vendredi soir à Colovray.
71e minute: alors que Nyon perd 2-1 contre Thoune, Christophe Caschili lance Quentin Fouley, qui relaie Quentin Gaillard. Bingo, le remplaçant signe l’égalisation 11 minutes plus tard d’un improbable lob.
86e minute: Dylan Dugourd remplace Christian Gomis. Quelques secondes plus tard, sur le premier ballon qu’il touche, le remplaçant envoie une mine sous la transversale au terme d’un spectaculaire solo à travers la défense bernoise.
Grâce à ses hommes du banc, le club vaudois s’est offert une victoire aussi renversante qu’historique, dans la mesure où Nyon n’avait encore jamais battu Thoune depuis la création de la Swiss Football League en 2003.
Une victoire qui porte la signature d’un banni. Lors de la large victoire contre Aarau (4-0) avant la pause internationale, Dugourd n’avait même pas été convoqué. Un choix fort de son entraîneur, qui avait sanctionné l’attitude parfois lunatique de son attaquant. Il faut croire que titiller l’orgueil de celui-ci (lui) aura fait du bien.
«Dylan, concède Christophe Caschili, c’est un sacré caractère. On a toujours un peu l’impression qu’il fait la gueule. Là, il sort de deux semaines juste incroyables à l’entraînement. Aujourd’hui (ndlr: hier), il a montré qu’il pouvait être décisif depuis le banc. Lorsqu’il est entré, je lui ai juste glissé: «Tu sais ce qu’il te reste à faire…»
Quelques secondes auront suffi au No 10 pour claquer le but de la victoire. «Dylan, reprend son coach, admiratif, il a du génie en lui. Il voit les choses avant les autres. Cela peut parfois en être perturbant.»
À Colovray, le Genevois a signé sa quatrième réussite de la saison. «Ce but est important pour moi, mais il l’est aussi pour l’équipe. On n’a jamais lâché, cette victoire récompense la qualité de notre travail à l’entraînement. Cela fait aussi du bien de marquer en toute fin de match. Habituellement, on avait plutôt la mauvaise habitude de prendre des buts.»
Sous le maillot stadiste, qu’il avait déjà revêtu lors d’un premier passage entre 2014 et 2017, Dugourd en est à 44 pions enfilés en 90 apparitions. Lucide, l’attaquant, faux lent de 1,94 m, reconnaît que ces derniers temps ont été compliqués. «Je reviens de loin, confie-t-il. Je n’étais pas bien dans ma tête, je gambergeais. Pour un attaquant, tout est souvent une affaire de confiance. Tu joues, tu ne joues plus, ou tu ne joues pas assez, etc. Et comme ce n’est pas moi qui fais l’équipe! (Rires) J’ai besoin de me sentir aimé pour être bon.»
Dédié à son grand-papa
Alors que les cris de victoire résonnaient dans les vestiaires, le héros de la soirée n’a pas manqué de dédier son chef-d’œuvre à son grand-papa Michaël, trop tôt disparu. «Je lui dédie chacun de mes buts, j’ai chaque fois une pensée pour lui. Quand j’étais petit, il m’amenait partout pour jouer au foot. Si j’en suis là, c’est grâce à lui.»
Bien avant dans une carrière qui l’avait aussi conduit à quitter en 2013 les espoirs du Servette FC (M18) pour tenter sa chance à Brescia (M19), Dugourd n’avait pas réussi à s’imposer sous le maillot de Xamax, où il avait été transféré à l’été 2019. Arrivé de Carouge, qui militait alors en 1re ligue, le transfuge de la Maladière s’était gravement blessé au genou (ligaments croisés déchirés) en match amical avant même le coup d’envoi du championnat. Une blessure qui l’avait contraint à mettre une croix sur sa première saison dans l’élite sous les couleurs «rouge et noir». «Par la suite, avec le nouvel entraîneur (ndlr: Stéphane Henchoz), ça n’a pas marché, devait expliquer en 2022 le buteur italo-suisse de Colovray dans un entretien au site Proxifoot. Xamax ne m’a jamais laissé ma chance; on me demandait de faire des choses qui n’étaient pas adaptées à mon style de jeu.»
Quatre ans plus tard, Dylan Dugourd n’est plus à 27 ans ce talent parfois incompris. Sans doute a-t-il aussi mûri. Sur une pente ascendante, Nyon, désormais installé sur le podium, a prouvé contre Thoune qu’il ne redoutait personne. «On aime bien s’en tenir à ce rôle d’outsider qui nous convient. On sait d’où l’on vient.»
Prochaine étape: vendredi 1er décembre à Tourbillon. Après avoir rendu indirectement service au FC Sion en dominant le plus sérieux rival des Valaisans, Nyon entend y jouer crânement sa chance. «C’est génial d’affronter une belle équipe, dans une chouette ambiance, conclut Dugourd. On va y aller pour faire quelque chose, idéalement ramener les trois points.» Et comme Nyon, révélation du championnat, n’est plus à un exploit près…