FootballZeki Amdouni, plus d’une flèche à son arc
Auteur d’un triplé contre Servette dimanche, l’international M21 du Lausanne-Sport s’est révélé cette saison en Super League. Décryptage de son profil, qui n’est pas seulement celui d’un buteur.
- par
- Valentin Schnorhk
Dans tout marasme, il y a la place pour une embellie. Dans celui de la politique sportive du Lausanne-Sport cette saison, Zeki Amdouni est l’élément qui permet de dire que Souleymane Cissé n’a pas fait tout faux. Ce coup-là, il l’a réussi. C’est peut-être le seul, mais c’est encore ce qui permet au LS de conserver un infime espoir de maintien après son triplé contre Servette (4-1) dimanche.
L’attaquant arrivé du Stade-Lausanne-Ouchy l’été dernier en est à neuf réalisations en Super League depuis le début de saison, soit un tiers des buts marqués par les Vaudois. Rapporté au contexte lausannois, vu les difficultés offensives rencontrées, le total est important. Surtout pour une première saison dans l’élite. Et puis, au-delà de ses buts, l’exercice réalisé par Amdouni est celui d’un attaquant complet, buteur instinctif, mais totalement intégré au jeu de son équipe. Décryptage d’un profil moderne, qui ne devrait pas rester longtemps à la Tuilière.
Buteur total
L’ouverture du score lausannoise dans le derby dimanche a eu quelque chose d’inédit: il s’agissait là du premier but de Zeki Amdouni sur penalty cette saison. Avant ça, l’international M21 ne les tirait pas. Ainsi, sur ses neuf buts, il en a inscrit huit dans le jeu. De quoi donner de la valeur à son total. Ce à quoi il faut ajouter sa capacité à marquer d’à peu près toutes les façons: du pied droit (cinq fois), de la tête (trois fois) et du pied gauche (une fois). Autrement dit, Amdouni est un buteur complet. Parce qu’il ne se met pas de limites lorsqu’il s’essaie au dernier geste. Il vise l’efficacité.
Le Genevois de 21 ans est en effet plus qu’un simple renard des surfaces. En fait, ses statistiques avancées mettent en exergue un attaquant qui ne choisit pas que les positions faciles. Selon le modèle des Expected Goals, chacune de ses tentatives en championnat a en moyenne 12,7% de chances de se terminer en but. Cela le place assez loin des buteurs les plus importants de Super League (Siebatcheu, Sène, Ceesay, ou Cabral avant l’hiver), qui optimisent leurs opportunités en cherchant à être servis dans des conditions très favorables.
Amdouni, lui, doit tirer le maximum de pas grand-chose, la faute à une équipe qui produit globalement très peu. Dans les surfaces adverses, ses déplacements visent à s’accorder du temps et de l’espace, même si cela ne représente que des gains très minimes: une demi-seconde et moins d’un mètre, par exemple. Contre Lugano avant la trêve, c’est ainsi en se plaçant dans le dos de son défenseur et en effectuant quelques petits pour se mettre dans l’axe du centre qu’il peut ajuster une superbe reprise de volée. Ou dimanche face à Servette, c’est en sortant du marquage de Vouilloz qu’il est parvenu à s’orienter dans le sens du but et placer sa tête au bon endroit, après le corner de Kukuruzovic.
Dans le dernier tiers, Zeki Amdouni cherche à s’appuyer sur ses atouts pour s’ouvrir au mieux le but adverse. Le dribble en est par exemple un. Très à l’aise dans les petits espaces où son crochet court peut faire des merveilles, il peut ensuite se dégager un angle de frappe sans défenseur. Ainsi, la position a priori compliquée devient plus abordable à gérer, puisqu’il n’y a plus que le gardien qui peut s’opposer à lui. Manière d’expliquer qu’Amdouni surperforme quelque peu ses Expected Goals, le modèle ne lui accordant «que» 7,48 buts sur les 9 inscrits. D’autant plus que son enchaînement en sortie de dribble est rapide et précis.
Joueur d’association
Reste que Zeki Amdouni n’est pas qu’un simple buteur. Le LS, par la force des choses, lui impose d’en faire un peu plus. Son talent est une variable avec laquelle peut s’ajuster la formation vaudoise. Autrement dit, il peut jouer avec un attaquant de surface (comme Pollero) ou sans. Alors le numéro 9 de la Tuilière peut adapter son jeu. Très haut, ou en décrochage, pour s’associer au reste de l’équipe. Dans ce second rôle, il a aussi des qualités à faire valoir. Notamment pour être touché dans des zones intéressantes.
Lorsqu’il est aligné dans une doublette (comme avec Pollero dès la 43e dimanche), il se permet beaucoup de dézonages. Sur des côtés, dans les demi-espaces ou simplement en décrochant entre les lignes. Il identifie les zones dans lesquels il peut être touché, et surtout depuis lesquelles il peut faire avancer le jeu. Ainsi, sa relation avec Anel Husic est prometteuse, le défenseur central le cherchant régulièrement par une passe verticale. Pareil lorsqu’il faut aller faciliter une sortie de la densité sur les côtés.
Si Borenovic puis Casanova lui accordent cette liberté, c’est notamment parce qu’il peut faire des différences à partir de ces positions. Avec une qualité majeure: une capacité à s’orienter dans le sens du jeu sur sa prise de balle. En jouant intelligemment avec son corps ou en s’appuyant sur des contrôles orientés efficaces, il peut non seulement éliminer des adversaires au marquage, mais aussi faire gagner du temps à la progression des actions lausannoises.
Ce sens de la mobilité et de l’association permet aussi à ses coéquipiers de jouer avec lui. En relais, en déviation, en remise. Mais jamais de manière décisive: Amdouni ne compte en effet aucun assist depuis le début de saison, et un très maigre total de 0,5 Expected Assists. Peut-être parce que personne d’autre n’a son sens du déplacement. Ou alors parce qu’il s’agit de l’une de ses limites.
Une première touche à affiner
Car l’ancien joueur d’Étoile Carouge n’atteint pas encore la perfection. Et ses statistiques pourraient tout à fait être encore mieux valorisées. En évoluant dans une formation de meilleure qualité, par exemple. Ce sera probablement pour la saison prochaine. Mais au niveau purement individuel, Amdouni peut faire mieux dans certaines situations. Et en particulier sur sa première touche de balle.
Son jeu fait de démarquages en vivacité et de prises de balles proactives peut en effet avoir une incidence sur la qualité du contrôle. Il n’est ainsi pas rare de le voir perdre un avantage sur son vis-à-vis en raison d’une première touche mal maîtrisée. Et il ne peut pas toujours faire la différence sur un dribble. Une donnée à intégrer et à corriger pour un joueur promis à être de plus en plus épié ces prochains mois. Sachant qu’il évoluait en 1re ligue il y a encore quatre ans, il y a de quoi être serein sur ses capacités d’adaptation.