Carnaval de Rio«À chaque fois, j’ai envie de pleurer et ça me donne la chair de poule»
Faste, fantaisie et émotions ont marqué les premiers défilés du mythique carnaval, dimanche.
Du retour à l’enfance à l’incarnation de la mort: les 70’000 spectateurs massés dans le sambodrome de Rio sont passés dimanche, par toutes les émotions lors de la première des deux nuits de défilés des écoles de samba, point d’orgue du carnaval le plus célèbre de la planète. Certains chars somptueux et démesurés ont évoqué les souvenirs d’enfance, avec notamment un manège à l’ancienne suspendu à trois mètres de haut pour ouvrir le défilé de l’école Grande Rio.
Sur les chevaux roses, pas d’enfants, mais des cavaliers intrépides en costumes dorés qui ne craignent pas le vertige, sous un ciel illuminé par les étincelles envoyées dans les airs par les chars. Quelques mètres plus loin, des danseurs arborent des costumes en barbe à papa plus vrais que nature, jusqu’à en donner l’eau à la bouche. Plus tôt dans la soirée, l’école Imperio Serrano avait ouvert le bal, avec un immense char aux têtes de dragons saillantes.
Mais le défilé de l’établissement Salgueiro était de loin le plus glaçant, avec la mort incarnée par des danseurs en habits flottants noirs et un couple de démons écarlates qui jouent à s’éclabousser dans une fontaine.
«L’espoir d’un meilleur avenir»
Cette année marque le grand retour du carnaval de Rio dans toute sa splendeur. En 2021, il avait été annulé en raison de la pandémie et l’an dernier, il avait été reporté à avril, les cortèges de rue n’ayant pas été autorisés. C’est également la première édition depuis le retour au pouvoir de Luiz Inacio Lula da Silva. Celui-ci a d’ailleurs promis de redonner à la culture brésilienne, ses lettres de noblesse.
«Ce carnaval a lieu après une élection historique. Après les ténèbres, nous retrouvons l’espoir d’un meilleur avenir», confie Débora Soares, une mannequin de 25 ans. «Avec ce changement de gouvernement, on ressent deux fois plus de bonheur», renchérit Amanda Olivia, costumière de 34 ans.
Neuf critères très précis
Les écoles de samba, basées pour la plupart dans des favelas, portent les couleurs de tout un quartier. Elles se préparent toute l’année pour leur grand show qui ne peut dépasser les 70 minutes, sous peine de se voir retirer des points par des jurés impitoyables. Les douze principales écoles (six défilent le dimanche, six autres le lundi) sont évaluées selon neuf critères très précis, parmi lesquels la qualité des chars, des costumes, le choix du thème ou la chorégraphie de la «comissao de frente», groupe de danseurs hors pair qui ouvre le défilé.
«Je défile depuis que j’ai sept ans, mais à chaque fois que j’entre au sambodrome, c’est comme si c’était la première fois, j’ai envie de pleurer et ça me donne la chair de poule», confie Iaraci Santos, infirmière de 64 ans. La nouvelle ministre de la Culture, Margareth Menezes, a défilé tout en haut d’un char avec la dernière école à s’élancer dans la nuit de dimanche à lundi, qui a montré la richesse du carnaval de Salvador de Bahia, berceau de la culture afro-brésilienne.