Jura français - «Voir ces quatre corps sans vie, on reste pantois devant cette scène»

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Jura français«Voir ces quatre corps sans vie, on reste pantois devant cette scène»

Le procureur de la République, Lionel Pascal, dirige l’enquête sur les jeunes qui ont péri dans leur voiture tombée dans le lac de Chalain. Il se confie.

Evelyne Emeri
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Evelyne Emeri

«Ils avaient 15, 16, 17 et 19 ans. Le rescapé, 17.» A aucun moment, il ne prononcera leurs prénoms et encore moins leurs noms de famille lors de notre long entretien téléphonique. «C’est indécent.» Il, c’est le procureur de la République de Lons-le-Saunier, Lionel Pascal. Ce dernier instruit la tragédie épouvantable qui s’est jouée mercredi en fin d’après-midi à 35 km de la frontière suisse. Sarah, Natacha, Nathan et Noé sont morts, prisonniers des tôles de leur voiture, elle-même prisonnière des eaux glaciales du lac de Chalain. Retrouvé en état d’hypothermie, le survivant se porte physiquement bien. Psychologiquement, il est détruit.

«Une chute de 6 à 8 m»

«Ils ont chuté de 6 à 8 m en contrebas de la voie d’accès, un cul-de-sac qui mène au domaine de loisirs de Chalain. C’est un lieu très fréquenté l’été. Il y a beaucoup de monde. L’hiver, c’est fermé mais pas interdit. Ils avaient emprunté cette route qui surplombe le lac. Sans doute allaient-ils se balader, détaille le magistrat, C’est une zone boisée avec des arbres et des fourrés de part et d’autre des voies avec un talus assez raide. La malchance a voulu qu’à l’endroit précis où il quitte la route et dévale la pente, aucun arbre ne les a retenus.»

«La voiture n’était pas du tout au fond du lac»

Lionel Pascal, procureur de Lons-le-Saunier (F)

«La voiture a plongé dans le talus, elle a effleuré un seul arbre, alors qu’il y en a partout», déplore le procureur Pascal. «Leur trajectoire est légèrement diagonale. Leur cheminement est direct, de la route au lac. Il n’y a pas une trace de freinage ou de ripage, poursuit-il, Je le répète, c’était une vraie patinoire, une plaque de verre. Il était impossible de se tenir sur la route. La voiture n’était pas du tout au fond du lac, elle était tout près de la berge dans environ 2 m d’eau. Hier soir (ndlr. mercredi soir), j’ai vu l’arrière qui affleurait la surface de l’eau.»

Rescapé pas encore entendu

«A priori, la Peugeot 206 qui appartenait à la jeune fille de 19 ans était couchée dans l’eau sur le flanc gauche côté conducteur. Je ne sais pas encore si c’est la propriétaire de la 206 qui était au volant. Il semble que le rescapé aurait brisé la vitre passager et se serait extrait ainsi de l’habitacle du véhicule», note prudemment Lionel Pascal. Il confirme que le survivant n’a pas encore été entendu: «Son témoignage sera déterminant, mais nous ne sommes pas dans l’urgence absolue».

Pas d’autopsies

«Les quatre mineurs étaient internes au Lycée Paul-Emile Victor de Champagnole, la jeune majeure était demi-pensionnaire, précise aussi le représentant du Parquet, Ils viennent tous du Jura français.» Au niveau des actes de procédure, les analyses toxicologiques usuelles sont en cours. S’agissant d’éventuelles autopsies, le procureur a tranché: «Elle n’est ni souhaitable, ni indispensable, à moins que l’examen externe et l’imagerie médicale que j’ai requis auprès des légistes révèlent quelque chose de suspect. Il faut penser aux familles et leur rendre leurs enfants le plus vite possible».

«Ils étaient allongés côte à côte dans la forêt»

Lionel Pascal, procureur de Lons-le-Saunier (F)

«Manifestement, il s’agit d’un accident. Mais j’ai quand même ouvert une enquête pour homicide involontaire qui permet de donner un maximum de moyens pour déterminer les causes et les circonstances exactes.» Une sortie de route pas comme les autres pour le magistrat Lionel Pascal. «Ce sont quatre jeunes vies fauchées. De voir les corps sans vie de ces quatre jeunes gens allongés dans la forêt côte à côte après avoir été sortis du véhicule, puis transportés sur une civière avec des couvertures de survie de manière à les masquer jusqu’à un parking pour les premières constatations, c’est… On reste pantois devant cette scène.»

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