Etats-Unis – Procès Theranos: l’accusation plaide la fraude, la défense la bonne foi

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États-UnisProcès Theranos: l’accusation plaide la fraude, la défense la bonne foi

Elizabeth Holmes risque des dizaines d’années de prison si le parquet parvient à convaincre le jury qu’elle a sciemment cherché à tromper les investisseurs et le public. Le procès touche à sa fin.

Elizabeth Holmes au tribunal de San José, en Californie, le 16 décembre 2021.

Elizabeth Holmes au tribunal de San José, en Californie, le 16 décembre 2021.

Getty Images via AFP

Elizabeth Holmes a-t-elle volontairement dupé investisseurs et patients ou croyait-elle en toute bonne foi qu’elle allait révolutionner les tests sanguins? L’accusation et la défense ont tour à tour défendu leurs positions jeudi à la fin du procès de l’ancienne étoile montante de la Silicon Valley.

La charismatique entrepreneuse avait 19 ans quand elle a fondé Theranos en 2003. Elle promettait de produire des outils de diagnostic plus rapides et moins chers que ceux des laboratoires traditionnels, mais les machines n’ont jamais fonctionné comme promis.

Pour le procureur, «Elizabeth Holmes avait un choix à faire» alors que Theranos perdait de l’argent et que les grands laboratoires pharmaceutiques s’intéressaient moins à son entreprise. «Mme Holmes a choisi la fraude plutôt que la faillite, elle a choisi d’être malhonnête. Ce choix était non seulement impitoyable mais encore criminel», a asséné Jeff Schenk devant les jurés d’un tribunal fédéral de San José, en Californie.

Bonne foi?

Âgée de 37 ans aujourd’hui, elle risque des dizaines d’années de prison si le parquet parvient à convaincre le jury qu’elle a sciemment cherché à tromper les investisseurs et le public. Elizabeth Holmes assure pour sa part qu’elle a vraiment cru en sa technologie de diagnostic et qu’elle a simplement commis des erreurs.

L’activité de son entreprise était réelle, des contrats ont bien été signés, a fait valoir son avocat à l’audience, Kevin Downey. Surtout, signe de sa confiance en une technologie censée pouvoir effectuer toutes sortes de tests, Theranos 4.0, elle a déposé un dossier auprès des autorités sanitaires pour pouvoir la commercialiser. «Si une personne est de bonne foi, vous n’avez aucune raison de la déclarer coupable», a avancé Kevin Downey, selon qui il faut évaluer ses actions à l’aune de ses intentions.

Elizabeth Holmes impute aussi en partie ses défaillances à l’emprise qu’elle dit avoir subie de la part de son ancien partenaire, également en charge du laboratoire, Ramesh «Sunny» Balwani. Ce dernier est poursuivi séparément.

Échec comme un autre?

L’entrepreneuse, qui pendant un temps portait régulièrement des pulls noirs à col roulé comme le mythique cofondateur d’Apple Steve Jobs, était parvenue à convaincre des personnalités comme le magnat des médias Rupert Murdoch ou l’ancien secrétaire d’État Henry Kissinger de la soutenir. Mais une série d’enquêtes du «Wall Street Journal» en 2015 a commencé à faire naître des doutes.

À la barre, d’anciens employés ont fait part de leurs doutes sur les machines, a rappelé le procureur. Une femme enceinte a raconté comment elle avait cru, à tort, avoir fait une fausse couche, tandis que l’ancien ministre américain de la Défense Jim Mattis a dit comment il était passé de la fascination à la déception vis-à-vis de Theranos lorsqu’il était à son conseil d’administration.

La jeune entrepreneuse n’évoquait pas uniquement des objectifs ambitieux, elle parlait de laboratoires déjà capables de fonctionner, a souligné Jeff Schenk. Elle a menti, selon lui, sur la précision des tests sanguins, sur les prévisions financières, sur l’utilisation des machines par l’armée ou sur des commandes de gros laboratoires. Son rôle «était de recruter des investisseurs en utilisant des inexactitudes», a asséné le procureur.

«Mme Holmes croyait qu’elle avait inventé une nouvelle technologie parfaitement valable, elle croyait que d’autres en dehors de l’entreprise partageaient ce point de vue», a défendu l’avocat.

La question au cœur du procès, entamé en septembre, est de savoir si elle est une entrepreneuse qui a tout simplement échoué, comme il en existe tant dans la Silicon Valley, ou si elle a sciemment fait des déclarations inexactes pour duper ses interlocuteurs et profiter de la situation.

L’avocat d’Elizabeth Holmes doit continuer sa plaidoirie vendredi. L’accusation aura ensuite un droit de réponse, après quoi le jury entamera ses délibérations.

(AFP)

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