Adolescent abattu en France: Après deux nuits de violences, la fièvre ne retombe pas

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Adolescent abattu en FranceAprès deux nuits de violences, la fièvre ne retombe pas

Dégradations, pillages et échauffourées ont repris jeudi dans de nombreuses villes pour la troisième soirée consécutive, deux jours après le décès de Nahel, tué par un policier.

Un manifestant fuit les gaz lacrymogènes lors des affrontements qui ont éclaté après une marche de commémoration d’un adolescent abattu par un policier, dans la banlieue parisienne de Nanterre, le 29 juin 2023.

Un manifestant fuit les gaz lacrymogènes lors des affrontements qui ont éclaté après une marche de commémoration d’un adolescent abattu par un policier, dans la banlieue parisienne de Nanterre, le 29 juin 2023.

AFP

Saisi par une vidéo amateur, le tir à bout portant du fonctionnaire sur l’adolescent lors d’un contrôle routier a embrasé de nombreux quartiers populaires du pays.

Pour endiguer une «généralisation» des violences urbaines, les autorités ont mobilisé 40’000 policiers et gendarmes, ainsi que des unités d’intervention d’élite comme le Raid (police) et ses véhicules noirs blindés ou le Groupe d’intervention de la gendarmerie nationale (GIGN), déployés dans plusieurs villes.

Des couvre-feux nocturnes ont été décrétés à Clamart (Hauts-de-Seine), Neuilly-sur-Marne (Seine-Saint-Denis) et Compiègne (Oise). Et dans le Nord, la préfecture a interdit tout rassemblement à Lille et Tourcoing et mobilisé un hélicoptère et des drones.

Malgré ce déploiement massif, des violences et des dégradations ont été signalées jeudi soir dans de multiples villes. Peu après 3 h, les forces de l’ordre avaient procédé à au moins 421 interpellations au niveau national, selon l’entourage de Gérald Darmanin, dont «l’essentiel» est âgé entre 14 et 18 ans.

«Il n’y a pas d’affrontement très violent en contact direct avec les forces de l’ordre, mais il y a un certain nombre de magasins vandalisés, de commerces pillés voire incendiés», a détaillé un haut gradé de la police nationale. Cela a été le cas notamment dans le cœur de Paris, aux Halles et dans la rue de Rivoli, qui mène au Louvre.

Comme la veille, les forces de l’ordre ont également été visées, des poubelles, des voitures et des bus brûlés, notamment à Villeurbanne (Rhône) ou à Aubervilliers (Seine-Saint-Denis). À nouveau, des bâtiments publics ont été pris pour cibles par des groupes souvent encagoulés ou dissimulés sous des capuches, comme à la mairie du quartier prioritaire de l’Argon à Orléans. «Le bureau de police situé au pôle Laherrère à Pau» a par exemple été visé par un cocktail molotov, selon la préfecture des Pyrénées-Atlantiques.

Marche blanche

Dans le centre-ville de Marseille, c’est la devanture de la bibliothèque municipale de l’Alcazar qui a été endommagée, selon la mairie. À quelques encablures de là, sur le Vieux Port, des échauffourées ont éclaté plus tôt quand les forces de l’ordre ont dispersé avec des gaz lacrymogènes un groupe de 100 à 150 personnes qui auraient tenté de monter des barricades.

À Lille, dans le nord de la France, un jeu du chat et de la souris s’est enclenché dans la nuit de jeudi à vendredi entre de petits groupes dispersés et un important dispositif policier. Une mairie de quartier a été incendiée, une autre caillassée et des pillages et des dégradations ont été commis.

En Seine-Saint-Denis, «quasiment toutes les communes» ont été touchées, souvent des actions éclair, de nombreux bâtiments publics pris pour cible comme la mairie de Clichy-sous-Bois et des commerces pillés, selon une source policière.

À Nanterre, épicentre des violences, la tension est montée vers minuit, avec des fusées d’artifice et des grenades dans le quartier populaire de Pablo Picasso où vivait l’adolescent tué. La Brigade de recherche et d’intervention (BRI) de la préfecture de police de Paris s’est déployée un moment à l’entrée de la cité et ses célèbres tours nuages, épaulée dans le ciel par un hélicoptère.

Vers 3 h, 245 interpellations ont eu lieu à Paris et la petite couronne, selon la préfecture de police.

C’est de Nanterre qu’est partie dans l’après-midi une «marche blanche» à la mémoire de Nahel qui a rassemblé 6200 participants, selon la préfecture de police, aux cris de «justice pour Nahel» et «plus jamais ça». «J’en veux pas à la police, j’en veux à une personne, celui qui a enlevé la vie de mon fils», a déclaré la mère de la victime, Mounia M., au micro de l’émission «C à vous» sur France 5.

La marche qu’elle menait s’est terminée dans la confusion par des heurts. Du mobilier urbain a été détruit, des voitures incendiées et le monument de la Résistance et de la Déportation a été dégradé. Dix-neuf personnes ont alors été interpellées, selon la préfecture de police.

Violences «injustifiables» 

Depuis la mort de Nahel mardi, des écoles, des mairies et des édifices publics ont été la cible de la colère des jeunes habitants des quartiers populaires et incendiés dans de multiples villes de France, rappelant les émeutes qui avaient embrasé la France en 2005 après la mort de deux jeunes. Des «scènes de violences» contre «les institutions et la République» qui sont «injustifiables», a fustigé Emmanuel Macron.

Le drame à l’origine de l’embrasement s’est produit à proximité de la station de RER Nanterre-Préfecture, lors d’un contrôle de police sur la voiture conduite par Nahel, un mineur connu pour des refus d’obtempérer. «Le parquet considère que les conditions légales d’usage de l’arme» par le policier auteur du tir «ne sont pas réunies», a déclaré jeudi matin le procureur de la République de Nanterre, Pascal Prache.

Ce policier de 38 ans a été mis en examen pour homicide volontaire et placé en détention provisoire dans l’après-midi. Lors de sa garde à vue, «les premiers mots» que le fonctionnaire «a prononcés étaient pour dire pardon et les derniers mots qu’il a prononcés étaient pour dire pardon à la famille», a indiqué son avocat, Me Laurent-Franck Liénard, sur BFMTV.

(AFP)

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