FranceTrente ans de prison pour avoir tué son ex-femme à coups de marteau
L’auteur d’un féminicide aussi soudain que «barbare» survenu en 2019 a été condamné par la justice française mercredi.
Jean J., 50 ans, ex-haut cadre devenu dépressif, a été condamné mercredi par la cour d’assises des Yvelines à 30 ans de réclusion criminelle pour l’assassinat de son ex-femme en 2019 lors d’un féminicide aussi violent que soudain.
A l’énoncé du verdict, Jean J. n’a pas cillé.
Après trois heures de délibéré, la cour et le jury ont ainsi suivi les réquisitions de l’avocate générale Lauriane Pinard, qui avait souligné «la barbarie des faits commis» par cet homme «impassible, presque insondable», dont la personnalité fait s’interroger la cour d’assises depuis le début du procès, vendredi à Versailles.
Comment passe-t-on d’un homme cultivé, diplômé, heureux au travail et en famille, à celui qui, de 22 coups de couteau puis de 15 coups de marteau, assassine un matin son ex-femme en une poignée de minutes, sans aucune violence physique préalable ?
«Ce qui m’a motivé, c’était d’effacer, d’annihiler cette réalité», celle d’un divorce subi, avait-il tenté d’expliquer à la cour mardi de son ton monocorde, sans émotion, glaçant. Dès son premier interrogatoire par les gendarmes, il avait reconnu avoir tué son ex-femme, avec préméditation.
«Isabelle a été la 17e, la 17e victime de féminicide en 2019», a rappelé Me Elsa Crozatier, avocate des parties civiles. C’était le 24 janvier.
Selon, le ministère de l’Intérieur, 146 femmes ont été victimes de féminicide, c’est-à-dire tuées par leur conjoint ou ex-conjoint en 2019, et 102 en 2020.
«Ça monte, ça monte...»
«Les actes de l’accusé ont rompu le contrat social», reconnaît d’emblée Me Sophie Martin-Siegfried son avocate.
«Sur la ruine de cet acte odieux, on cherche des explications», poursuit l’avocate, qui raconte l’autre versant de la vie de l’accusé: un homme diplômé de Sciences Po Strasbourg, devenu un mari et père heureux, haut-cadre dans une mairie avant qu’un changement de majorité municipale, d’employeur donc, ne provoque en 2014 «un effondrement de tout son édifice»: tentative de suicide, dépression profonde, alcool.
Sa femme Isabelle T, 48 ans, prof de sport, dynamique mère de leurs deux enfants, le quitte deux ans et demi plus tard, puis le divorce est prononcé en septembre 2018.
Au même moment, l’accusé apprend que son ex-femme a un nouveau compagnon. A partir de là, des SMS incendiaires témoignent de son sentiment de haine.
Pour l’avocate générale, «ça monte, ça monte, ça monte progressivement». «Il sait très bien qu’elle est heureuse et c’est pour ça qu’il va la tuer».
«J’étais dans un état second»
Début janvier, comme pour son profond mal-être, la mécanique s’accélère et se clarifie: il cherche comment endormir sa femme, puis achète un couteau, un marteau.
Avec comme projet de se donner la mort, après avoir vu la mer à Honfleur. Il survivra et sera arrêté huit jours plus tard.
Le matin du 24 janvier, il assenera 22 coups de couteau à son ex-épouse.
Les parents de la victime, présents pour aider leur fille à déménager, tentent de s’interposer, il les blesse: le père au cou et au thorax, la mère près du poumon. Jean J. est également reconnu coupable d’une double tentative de meurtre.
«Ensuite, je me souviens d’avoir pris le marteau et d’avoir donné des coups sur le crâne de mon ex-épouse», dit l’accusé. Quinze coups seront comptés, soit trente-sept plaies au total.
«Quand j’ai commis ce crime odieux, je n’étais plus moi-même, j’étais dans un état second, submergé par la haine et la rage», a dit l’accusé de sa voix plate juste avant que la cour d’assises ne se retire pour délibérer. Un peu plus tôt, Vincent Niclot, également avocat de la défense, avait plaidé l’altération du discernement, ce qui n’a pas été retenu par la cour.
Durant ces derniers mots, il a exprimé – pour la première fois durant le procès –, des regrets, puis un pardon. Il a enfin demandé, une fois condamné, à changer de prison «pour mieux poursuivre (son) chemin de rédemption et de repentance.»
«La Justice a fait son travail, mais rien ne nous ramènera Isabelle», a simplement déclaré Guy, le père de la victime, à l’issue du verdict.