BienneSes masques écolos font flop, mais elle mise sur une quatrième vague
Les masques en microfibres lavables de Babette Keller Liechti, plus écologiques que les masques jetables, peinent à trouver preneur. Mais l’entrepreneuse biennoise reste confiante.
- par
- Vincent Donzé
L’entrepreneuse biennoise Babette Keller Liechti a produit 200 000 masques en microfibres certifiés, il lui en reste 120 000 en stock. Que s’est-il passé pour qu’un projet industriel et sanitaire s’époumone si vite, entre deux vagues de coronavirus? «Les autorités sanitaires ont misé sur le polypropylène», déplore la fondatrice de la société KT Home SA, lauréate en 2009 du Prix Veuve Clicquot et chroniqueuse au «Matin Dimanche».
À 57 ans, Babette Keller Liechti a traversé des épreuves depuis le début de la pandémie. Elle a perdu sa maman de 81 ans dans un home de Delémont et son investissement en temps et en argent dans les masques antibactériens lui a valu une dépression, soignée à l’île Maurice. Atteinte d’une maladie neurologique incurable nommée «Cluster Headache», qui la rend vulnérable à la Covid-19, l’entrepreneuse biennoise a besoin d’oxygène, au propre et au figuré.
La présidente est interloquée par les autorités sanitaires. «En mettant mon savoir-faire à disposition, je pensais aider la population suisse sur un marché bien trop petit pour réaliser du profit», répond l’entrepreneuse.
Les microfibres, elle connaît, après avoir produit avec son partenaire coréen des serviettes de polissage pour l’horlogerie puis des gants démaquillants pour la cosmétique, fabriqués avec un fil composé de 440 filaments tricotés. Hélas, mécontente des revirements opérés par les autorités sanitaires, désarçonnée par la valse des certifications et leur lenteur, elle a depuis vendu ses machines au tiers de leur valeur.
Porter un masque quatre heures et le jeter, c’est pour Babette Keller Liechti un «non-respect écologique». Elle ne croit pas en l’efficacité des masques médicaux au-delà de ce délai. Ce qui l’irrite, c’est le déferlement des masques chinois qui mettent en péril tous les fabricants suisses, forcément plus chers. «On dénombre 38 000 fabricants en Chine pour réaliser des milliards de masques», glisse-t-elle.
Selon elle, la Confédération détiendrait un stock de deux ans de masques jetables. Quant aux siens, elle espère les vendre lors des prochaines vagues, qu’elle juge inéluctable. «La Covid-19 nous montre que la planète va mal et on jette du polypropylène dans la nature», s’indigne-t-elle.
Des clusters
La pandémie, elle la prévoit cyclique, «avec des clusters tous les trois à six mois» et de nouveaux variants. Après avoir baissé le prix de ses masques pendant trois mois pour aider la population pendant le relâchement sans faire de bénéfice, aujourd’hui elle les a remis au prix initial.
Babette Keller Liechti abandonne progressivement la direction opérationnelle de ses deux sociétés «KT Home SA» et «Keller Trading SA» en conservant le département «développement» et leur présidence. Pour réduire les loyers et tenir sur la durée, elle a réintégré ses propres locaux de la rue Granges (SO) à Bienne.
Fatigués et épuisés
«Les gens sont avant tout fatigués et épuisés par cette situation interminable», constate Babette Keller Liechti. Face à cette pandémie qui n’en finit pas, son esprit d’entreprise ne s’est pas émoussé, bien au contraire. Forte de son expérience, l’entrepreneuse a imaginé trois lieux atypiques en pleine nature baptisée «Villa Babette», deux en Suisse et le troisième à l’île Maurice.
«Je crois qu’il est redevenu fondamental de prendre soin de son corps, de son âme et de son esprit», indique Babette Keller Liechti. On viendra se ressourcer chez elle en mode «Airbnb», avec ou sans masque. Ouverture prévue de la première «Villa Babette» à Orvin: le 3 septembre prochain.