Classement internationalIngérence du lobby du tabac: la Suisse est lanterne rouge
Le classement de la Suisse en matière d’ingérence de l’industrie du tabac a de quoi faire tousser. Notre pays se retrouve avant-dernier d’un classement de 90 États, et bon dernier en Europe.
- par
- Christine Talos
C’est un résultat peu glorieux que livre ce mardi, le nouvel Indice d’ingérence de l’industrie du tabac 2023. En effet, la Suisse est 89e sur 90 pays d’un classement international qui montre les États où l’industrie du tabac exerce le plus d’influence sur le monde politique.
Avec 95 points sur 100, la Suisse se retrouve à nouveau à l’avant-dernière place, comme en 2021 déjà. Seule, la République dominicaine fait moins bien. Et sur les 20 pays européens ayant participé, la Suisse obtient le plus mauvais score. À l’inverse, c’est au Brunei, en Nouvelle-Zélande ainsi qu’en France et aux Pays-Bas que l’influence du lobby du tabac est la plus faible.
«Le résultat est sans appel», estime l’Association suisse pour la prévention du tabagisme (AT) dans un communiqué, mardi. «L’industrie du tabac continue d’exercer une influence considérable sur les débats et les processus législatifs dans le domaine de la politique de santé publique», dénonce-t-elle. Ceci alors que l’on sait que la consommation de tabac est responsable de 14% de tous les décès en Suisse, rappelle-t-elle.
Neuchâtel et Lausanne dénoncés
Le rapport pointe notamment le soutien financier des cigarettiers à une étude de l’EPFZ. Ou encore leur participation à une campagne de l’Office fédéral de l’environnement. Il critique aussi le canton de Neuchâtel qui organise une réunion annuelle avec le lobby du tabac, sans en garder de trace. Tout comme Lausanne qui ne tient pas non plus de PV sur ses rencontres régulières avec leurs représentants. Enfin, rappelle l’AT, Philip Morris a versé des dons de 35’000 francs à l’UDC et au PLR lors des récentes élections fédérales.
«Cette étroite coopération entre les autorités et les multinationales du tabac montre l’ampleur des libertés que l’industrie du tabac peut se permettre de prendre en Suisse», dénonce l’AT. «Cette situation est due à l’absence d’une politique de contrôle du tabac, à même de donner aux responsables des directives claires pour éviter de tels partenariats industriels».
La Suisse n’a toujours pas ratifié la convention contre le tabac
La Suisse, qui abrite trois multinationales du tabac, Philip Morris International, British American Tobacco et Japan Tobacco International, est l’un des rares pays à ne pas avoir ratifié la convention-cadre de l’OMS pour la lutte contre le tabac. Elle l’a signée, mais ne l’a toujours pas ratifiée, malgré de nombreuses demandes d’organisations. «Il est grand temps que la Suisse la ratifie et mette en œuvre l’obligation qui en découle de réglementer strictement le tabac», estime la conseillère nationale Laurence Fehlmann Rielle (PS/GE), présidente de l’AT. Pour rappel, le peuple a toutefois accepté en février 2022 une initiative visant à interdire la publicité pour le tabac pouvant atteindre les jeunes, contre l’avis du Parlement. Mais cette interdiction partielle reste en deçà de l’interdiction plus complète déjà en vigueur dans de nombreux pays, selon l’AT.