BelgiqueViolée, une femme obtient le feu vert pour une euthanasie
Nathalie Huygens, 50 ans, endure une souffrance psychologique insupportable. Elle veut en finir, avec le soutien de ses enfants.
- par
- R.M.
En Belgique, une femme qui a été violée en 2016 vient d’obtenir le droit de se faire euthanasier. Cette femme de 50 ans, qui a deux enfants, n’est pas atteinte par une pathologie mortelle et n’est pas en fin de vie. Mais ses souffrances, principalement psychologiques, sont jugées insupportables.
Ce cas peut susciter l’incompréhension. Mais Nathalie Huygens a longuement témoigné dans la presse belge pour tenter d’expliquer son état et sa décision.
Tout commence par un viol subi en 2016 à Vilvorde, dans le Brabant flamand, au nord de Bruxelles. Alors qu’elle faisait un jogging au petit matin, un homme l’a jetée à terre et l’a frappée brutalement au visage, à plusieurs reprises, lui brisant la mâchoire. Puis, la menaçant d’un couteau, il a abusé d’elle, plusieurs fois.
Panique et anxiété
Hospitalisée après la terrible agression, la Belge est alors confiante. «Je pensais vraiment que j’allais surmonter cela». Elle se dit qu’elle était heureuse avant le viol, et décrit une vie de famille agréable et épanouie, «avec mon mari et nos deux beaux enfants, Tine, 22 ans, et Wout, 25 ans», rapporte 7sur7.
Mais une semaine plus tard, lorsqu’elle rentre chez elle, Nathalie Huygens se rend immédiatement compte que plus rien ne sera jamais comme avant. «Une partie de moi-même semblait être morte.»
Tout lui semble insupportable. «Je ne pouvais plus être avec ma famille. Je ne supportais plus que mon mari dorme avec moi, je ne supportais plus de manger à table avec eux. J’ai eu des crises de panique et d’anxiété, j’ai fini par avoir des pensées suicidaires et j’ai effectivement fait une tentative de suicide. Quatre mois après les faits, j’ai été admise en psychiatrie. Le début d’une longue série d’admissions au fil des ans, forcées ou non sur les conseils de mon psychiatre», détaille-t-elle.
«Je ne sais plus comment vivre»
La journée, elle tente de rester constamment occupée. «Sinon, les souvenirs peuvent s’installer. Ou pire, je peux les revivre. Alors la peur peut me submerger, ou la panique. Ou une tristesse intense. J’ai alors l’impression que je pourrais m’effondrer. Il m’arrive de rester allongée à pleurer pendant des heures», raconte-t-elle.
La Belge ressent un énorme épuisement. Depuis le viol, ses nuits sont mauvaises. «Parfois, je me réveille en pleurant et je me dis: «Dois-je encore passer un jour de plus?» Je ne sais plus comment vivre.» Elle se décrit comme toujours plus isolée, car on l’évite et qu’elle-même dit avoir «construit un mur» autour d’elle.
Aujourd’hui encore, elle a trois séances de thérapie par semaine. Mais rien n’y fait. Il y a deux ans, elle a décidé de faire une demande d’euthanasie. «Je veux que la souffrance s’arrête, qu’elle se termine», commente-t-elle. «La douleur est si profonde qu’elle prend le dessus. Il n’y a plus que cette douleur et il ne reste qu’une seule chose à souhaiter: que la souffrance s’arrête.»
Soutenue par ses enfants
Nathalie Huygens sait que sa volonté de partir peut ne pas être comprise. «Croyez-moi, demander l’euthanasie en tant que maman est déchirant et difficile. Il n’y a pas une seconde où je ne me sens pas coupable». Mais elle précise que ses deux enfants soutiennent aujourd’hui son choix.
Son fils Wout a en effet publié une lettre ouverte en ce sens. «Près de six ans plus tard, même les soignants les plus dévoués du pays ne savent plus quoi faire. Aucun enfant ne mérite de voir son parent souffrir de la sorte. Cela fait des années que nous sommes dans une situation où maman est toujours physiquement vivante, mais mentalement partie depuis longtemps. À la place de ma maman, je ne voudrais plus vivre non plus», a-t-il écrit.
Maintenant qu’elle a obtenu le droit à une euthanasie, la Belge a dit sa volonté d’en finir au plus tôt. Mais elle veut avant tenir jusqu’au procès civil de son agresseur, qui «pourrait avoir lieu le mois prochain comme l’année prochaine».
En Belgique, il existe plusieurs critères pour avoir accès à l’euthanasie. Pour l’un d’eux, une personne doit «faire état de souffrance physique et/ou psychique constante, insupportable et inapaisable». Pour Nathalie Huygens, deux psychiatres et un médecin ont jugé à l’unanimité que sa souffrance mentale était insupportable.